Les pages jaunes de mon livre souffraient devant mes yeux, qui, d'eux, perlait de l'eau sur l'encre séchée.
Dans un souffle court, j'essuyais mon visage du dos de ma main, encore ensanglanté, et tirai sur le fin bout de tissu qui recouvrait mon corps.
- Minha querida ? Je vais bientôt fermer, il faut partir.
Je soupirai, comprenant ainsi que cette soirée allait sûrement être la dernière.
Mes yeux s'attardèrent sur cette ville, qui renfermait mes plus beaux rêves et mes pires cauchemars.
Les conversations dansaient dans le vent froid, et tous les détails de celles-ci formaient un puzzle dans ma tête. Je comprenais ainsi le pourquoi du comment, alors que ces personnes, je ne les connaissais même pas.
Les immeubles délavés moisis pourrissaient devant tous, les fleurs ne fleurissaient plus depuis des années déjà, les habitants ne vivaient plus dans cette ville. Ils survivaient.
Un peu comme moi.
L'air frais fit frissonner ma peau caramel qui contrastait avec ce paysage. Et je redoutais le moment où j'allais enfin partir de cette ville.
J'en rêvais peut-être, mais était-ce si agréable que je le pensais de ne plus vivre ici ?
Je ne savais pas.
Je passais mon temps à écouter aux portes, aucunes discussions ne m'échappaient, les autres n'en savaient rien, alors que je savais tout. Le moindre détail passait par mes oreilles, et ne quittait pas ma mémoire.
𝐄𝐥𝐥𝐞 m'a dit que ça ne se faisait pas, qu'un jour, quelqu'un me le fera regretter.
Mais je ne l'ai jamais vraiment écouté. Pas elle, tout le monde, sauf 𝐞𝐥𝐥𝐞.
Et puis, comme me l'a dit cet homme de la nuit :
« Deus lhe deu dois ouvidos e uma língua para que você possa ouvir muito mais do que falar.
Dieu te donne deux oreilles et une seule langue pour que tu écoutes beaucoup plus que tu ne parles. »
Boa noite minha querida.All Rights Reserved