Perfect Illusion ( Nouvelle version)

Chapitre 7 ( partie 2/3)

Matthew

Matthew passa tout le trajet à tapoter distraitement sur ses genoux du bout des doigts en rythme avec la musique qui envahissait l'habitacle du taxi. Il jetait de temps à autre un regard discret vers son collègue sans pouvoir retenir le sourire que cette vision déclenchait.

Il ne savait pas vraiment pourquoi il l'avait embrassé. Il en avait eu envie et il l'avait fait. C'était aussi simple que ça. Les mots de Gabriel avaient débloqué quelque chose au fond de lui et les barrières qui le tenaient prisonnier depuis tant d'années, s'étaient tout bonnement effondrées faisant souffler un puissant vent de liberté au creux de son cœur.

Il soupira de soulagement en passant le seuil de son appartement. Gabriel n'avait pas prononcé le moindre mot depuis leur départ du studio. Il eut une brève pensée pour Taylor, dans la pénombre du vestibule, avant d'appuyer sur l'interrupteur.

Il invita Gabriel à rejoindre le salon pendant qu'il se faufilait vers la cuisine pour leur prendre de quoi se désaltérer. À son retour dans la pièce, il lui avait tendu la bouteille en verre, un sourire un peu moqueur ornant ses lèvres.

— Une bière, sans pression.

Gabriel le remercia, offrant en réponse à sa taquinerie l'un de ses immenses sourires, sincères et lumineux, dont lui seul avait le secret. Matthew prit place à ses côtés sur le sofa, le buste tourné dans sa direction et une jambe repliée sur l'assise. Gabriel copia sa position et ils restèrent ainsi pendant quelques minutes à déguster leur boisson, communiquant uniquement par le regard. Ils étaient là pour parler, mais aucun d'eux ne semblait savoir comment lancer les hostilités. Ce fut finalement lui qui énonça les premiers mots.

— Je suis désolé de t'avoir embrassé. Tu m'as dit que rien ne pourrait gâcher notre amitié et j'avais vraiment envie, ou besoin, plutôt, de retrouver cette sensation qui m'a complètement retourné le cerveau pendant le défi.

— Tu n'as pas à t'excuser, j'en avais tout autant envie que toi.

— Mais tu ne l'as pas fait.

— Non. Tu m'avais l'air totalement perturbé. Je ne voulais pas aggraver les choses.

Un nouveau silence s'imposa entre eux, mais il n'était pas dérangeant. Il était juste nécessaire pour leur laisser prendre en considération leur envie commune. Désir toujours présent à ce moment précis, si l'on en jugeait par leurs prunelles brillantes.

Matthew se mordilla distraitement la lèvre inférieure, luttant de toutes ses forces pour ne pas se pencher en avant et faire disparaître la distance entre eux. Son collègue et ami, qu'il connaissait depuis bientôt deux ans, s'avérait en mesure de faire palpiter son cœur à un rythme effréné. Il ne pouvait, ni ne voulait, nommer ce qu'il ressentait pour le moment à l'égard de Gabriel, mais se sentait prêt à explorer cette piste.

Il avait passé tant de temps à fuir l'évidence qui s'était imposée à lui dans son adolescence. Et pourtant, à présent, il n'avait qu'une envie : se faufiler dans cette brèche, oser enfin franchir cette porte entrouverte et voir ce qu'il se passerait s'il arrêtait de contrôler ses actes. Et il devait tout ce courage à la personne face à lui.

— Et maintenant ?

— Il y a pas mal de choses dont il faut qu'on parle, je pense.

— Ta femme ne va pas t'attendre ?

— Non. Elle sait parfaitement où je suis et pour quelle raison.

Matthew blêmit brusquement. Au-delà de cette véritable connexion entre eux qu'il ne pouvait désormais ignorer, il avait complètement oublié sa situation : Gabriel était marié.