Ce qui Nous Unit

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La pression? Elle en a gâchées des vies. On la ressent vraiment. Combien de personnes se sont précipitées à prendre une décision qui devrait pourtant être plus réfléchie.
Je pense à cette femme qui lasse de se faire rappeller qu'elle doit se marier à son âge s'engage dans un ménage où elle ne récoltera que peines et malheurs juste parce qu'elle en a l'âge. Cet âge là qu'on fixe. C'est l'âge, le bon âge pour entrer dans un ménage. C'est comme une norme qu'on met en place. Et qu'elle est capricieuse cette pression sociale qui te force à faire un choix,un choix qui devrait être indépendant. Combien de personnes sont prêtes à prendre leur destin en main? Mais un bon nombre de ces personnes se plient à cette pression sociale là.
Moi la pression que j'ai ressentie est venue de ma mère. Un ultimatum lancé.Je devais me marier tout simplement. Et ces crises incessantes me mettaient encore plus devant le fait accompli. Elle avait des problèmes au cœur. Il fallait surtout que j'abroge ses appréhension sur ma personne.
Mes problèmes avec moi même ne s'arrangeaient toujours pas, je fréquentais un centre. Un centre bizarre sous certains égards puisque c'était pas du tout commun de trouver celà dans ma société. Il était destiné à des personnes en difficulté qu'elles soient riches ou pauvres. ll suffisait juste de venir et raconter son histoire à une assemblée prête à t'écouter sans te juger. Et dans cet assemblée chacun recelait à l'intérieur d'elle même des secrets terrifiants,lourds et dès fois même adabracabrants. Et pourtant dans cet endroit on se retrouvait libre,libre de s'exprimer. C'était comme ci des êtres invisibles nous octroyaient un supplément d'âme et de courage pour parler et libérer nos cœurs.
Les visages étaient tout le temps blêmes, flegmatiques surtout.Et aucune once de sentiments n'y paraîssait.A ces instants là je me disais que j'étais peut être un peu verni car ce que je percevais dans ces visages là je le ressentais peut être pas. On dit souvent qu'à chaque fois qu'on se sent au plus bas.A chaque fois que des envies de disparaître nous submergent il faut juste penser aux personnes qui vivent de plus grandes calamités et qui s'accrochent pourtant à la vie.
Aussi contradictoire que celà puisse paraître j'écoutais rarement ce que les autres débitaient.Ce fut pourtant un des principes de ces rencontres là.Il fallait parler mais il fallait écouter aussi.
Et pourtant ce jour là,une fois n'est pas coutume,une histoire me captiva. C'est une femme qui prit la parole et nous raconta.
-je fus une jeune fille pleine de vie avec des rêves pleins la tête. Je me voyais aller loin,plus loin que tout ceux de ma lignée puisqu'il y'en avait rarement des personnes de ma famille qui s'en sortaient dans le milieu scolaire.De surcroît une fille. Moi je me voyais déjà devenir la première fille qui serait allée aussi loin dans les études. Ainsi donc je persévèrais de jour en jour et ce ne fut pas facile du tout.
A 8h,heure du début des cours j'étais toujours chez moi. Je devais d'abord aider ma mère à préparer le petit déjeuner avant de penser à arpenter le chemin de l'école. C'est la même ritournelle tous les matins et j'arrivais de justesse à ne pas être en retard en classe. Mais je tenais toujours bon car c'etait la seule condition de père pour fréquenter « l'école française » comme il disait. Je ne devais pas délaisser les tâches ménagères.
Mon Père, né après la première guerre mondiale vouait une haine viscérale aux blancs. Pour lui la crise des valeurs en Afrique, l'économie régressive...découlait indubitablement des agissements de cet envahisseur. Il fallait l'entendre s'adresser à nous au détour d'une discussion
-il fut une époque où la situation était figée avec des rôles pour chacun. Le Roi se chargeait de gouverner son territoire et ses sujets fructifiaient les richesses.Mais cet ordre fut bouleversé par des entités qui apportèrent le désarroi, la terreur, la violence et une dépravation des mœurs sans pareille. Si seulement ils étaient resté chez eux...débattait-il nostalgique.
C'est pour cela que je fus pas surprise quand il opposa un niet catégorique quand un de mes frères lui proposa de m'inscrire dans l'école primaire de notre village. Je venais d'entrer dans mes six hivernages et je fus inscrite qu'un an plus tard après d'intenses négociations et un compromis.
Moi Fatima j'étais donc devenue l'une des rares filles à fréquenter l'école française. Et ce fut comme un affront à la tradition. Mes oncles en ont tenu rigueur à mon père. Et malgré toutes leurs bisbilles je suis restée sereine.
J'en ai vues de toutes les couleurs. Les railleries de mes cousines qui ne rataient jamais une occasion de me faire comprendre que je serai comme toutes ses filles là, mariées et que les diplômes que j'aurais ne serviront que de meubles m'ont conforté dans mes certitudes. Et je ne cessais de me répéter que :je changerai la donne. Car j'avais remarqué que les profondes mutations dans le monde ne concernait pas encore mon peuple. Des femmes cantonnées aux rôles de mères,épouses. Elles n'avait pas le droit d'être indépendantes. Ce droit qu'on acquiert normalement dès la naissance. L'indépendance n'est pas sensée être clamée qu'on soit homme où femme. Mais la vie s'est chargée de mettre en place une hiérarchie qu'on devait respecter. Je me disais toujours que je pouvais bouleverser cette hiérarchie là. Je ne voulais surtout pas faire partie du lot de toutes ces filles qui souffrent de maux qui peuvent être tantôt les mariages précoces, tantôt la discrimination....je me voulais surtout indépendante.
J'avançais donc dans ma quête. Et j'obtins mon premier graal,oui c'en était un. Avoir un baccalauréat dans ce milieu ajouté à celà une bourse qui m'ouvrait les portes de la France. Les perceptions de mon père moururent bientôt sous la teneur de sa fierté. La fierté d'avoir une fille qui avait relevé un grand défi et avait validé son choix.
Je devais passer le mois qui restait des vacances chez des gens qu'on considéraient comme faisant partie de la famille. A chaque fois que l'occasion se présentait,cet ami à mon père et toute sa famille venaient nous rendre visite pour échapper disait-il à la grande congestion de la ville.Cette dernière étouffait à les entendre.Tout le monde veut y demeurer et celà crée une grande fourmilière humaine où chacun essayait de tirer son épingle du jeu. Moi je les plaignait et je comprenais pas du tout les jeunes de mon village qui s'entêtaient à rallier la ville malgré les difficultés qu'ils y rencontrent.
Passer chez eux était une étape,une passade pour régler les derniers tractations relatives à mon voyage.
Mon séjour se passait bien. je devais y rester pendant un moment avant le grand saut. Mais il y'avait un hic et c'était l'ami à mon père. Le jour qu'il vint me récupèrer,on eut une discussion et moi qui adorait parler je me donnais à cœur joies à une série de questions réponses.Il s'adressa à moi:
_Serais tu prête à entrer dans un ménage polygame?
-Je comprends la polygamie dans une certaine mesure.De nombreuses fois je vois des hommes menés par le bout du nez par de viles femmes juste parcequ'ils avaient opté pour la monogamie. Une erreur je le concède. Dans ces cas là les hommes vivent une souffrance perpétuelle.Un enfer dont il ont du mal à s'échapper.Tu me parleras de divorces,mais que ferait un homme dont le sens de la famille est tout aussi important que le bonheur qu'il pourrait acquérir ailleurs?
Mais je comprends pas la polygamie. Je me dis qu'il est très difficile de se donner plusieurs fois,d'être équitable.Ce qui me répugne par dessus tout ce sont les éternels bisbilles,les dissensions pour l'héritage entre les épouses,les fils lorsque le mari rend l'âme. C'est littéralement un champ de bataille où tous les coups sont permis. Les plus sensibles finissent le plus souvent par déchanter.Quel injustice tout ça.
Le sens de sa question m'était inconnu en ce moment là. Je pensais que c'était juste une discussion entre un père et sa fille. Et là sous un ton plaisantin il osa:
-Et si je faisais de toi ma seconde epouse,je pourrais te laisser partir en France et te retrouver là bas de temps en temps puisque la moitié de mon travail s'y fait.
Je répliquais en souriant
-je suis pas faite pour me marier à cet âge.
La discussion s'arrêta net jusqu'à notre arrivée.
Chez lui je vivais tranquillement dans l'attente de mon départ sous la protection de sa femme et sous l'amour de ses enfant qui me considéraient comme leur sœur.
Cependant une semaine avant mon voyage,sa fille avec qui je partageait une chambre décida d'aller passer du temps chez sa marraine. je devais rester seule cette nuit là. Mon sommeil étant léger j'entendis des pas dans la chambre. Surprise je n'en fit pas cas quand même. A un moment donné une main se logea brutalement sur mes seins,une autre sur ma bouche et une bouche sur mon oreille qui me chuchota:
-Je viens juste te prendre par la force ce que je t'ai proposé d'ôter légalement et que tu m'as refusé.Je m'en irais tranquillement après.
Ma vie défila sous mes yeux.Je pensais à mon périple prochain, à ma famille,aux choses auxquelles je me prédestinais, à mes rêves.Il ne fallait surtout pas qu'il réussisse son forfait. La peur m'empêchait de bouger mais les mots pouvaient sortir. Il commença à se mettre à l'aise et je hurlais de toutes mes entrailles.Un cri de détresse.Les choses allèrent très vite.Il se releva expressément et sortit de la chambre.
Je me maudissais et les regards appuyés qu'il me lançait à chaque fois me revinrent comme des lames qui me cisaillent.Je devais prévoir celà.Mais le pouvais-je, serais-je capable de m'imaginer même dans mes pires cauchemars que cet homme là oserait m'approcher?Les "secours" arrivèrent trop tard. Quand sa femme se retrouva seule avec moi je me libérais et lui avoua tout. Je décelais dans ses yeux une confiance en moi.je savais qu'elle me croyais.Cependant un autre sentiment l'envahissait,la peur.Peur d'être la femme dont le mari a essayé de violer une minette.Une honte pour certaines femmes égoïstes qui mettent en avant leur désir premier de se faire respecter oubliant la victime qui en perd honneur et crédibilité.Elle m'implora les larmes aux yeux:
-Tout ce qui se passe dans cette chambre doit y rester.
J'étais là sidérée et surtout révoltée et je n'était pas du tout au bout de ma peine. Ce qui suivit ces événements me mit encore plus bas que terre.
Au lendemain de cet horrible nuit, j'ai trouvé mon père au salon de mes hôtes et je fus très surprise.je me demandais ce qu'il pouvait bien faire ici car même nos au-revoirs on se l'était fait avant que je ne vienne. Je n'était pas sensé le revoir de sitôt. Dés qu'il me vit il se leva et commença à me battre. Il me battit si fort que j'en perdit l'usage de tout mon corps. Il me prit par les cheveux et m'incita à sortir de la maison. Mes bagages étaient déjà faits et nous embarquions pour Saraya mon village.
Le jour d'après j'avais d'énormes question en tête.Mon voyage?Mon père y répondit bien plus tôt
- C'est même plus la peine de penser à cet maudit voyage. Je laisserai jamais une dévergondée quitter ma maison pour aller si loin. Je viens de brûler tous tes papiers.La seule erreur que j'ai faite c'est de t'avoir laisser assimiler toutes ces choses qui n'ont fait que te pervertir.J'aurais jamais du accepter que tu fréquentes cet école.
Là je compris tout, même l'entrevue où j'ai été la grande absente avec mon père et son "chère" ami. J'avais mon mot à dire pourtant. Un entrevue où j'ai été égratignée ,mon honneur et ma dignité piétinés. Mon père n'en avait cure de de mes protestations et c'est ainsi que mon voyage fut annulé.Depuis ce jour là j'exécrais les hommes et surtout un homme en particulier.
...
Le reste de son histoire je ne l'entendit même plus. Un tout nouveau sentiment m'animait.Je me disais que je devais aider cette femme là. Qu'il fallait qu'on rosse les maux de nos vies ensemble...
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AbdallahOù les histoires vivent. Découvrez maintenant