11111 - Confidences

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Elle ne se rappelait pas avoir déjà remarqué les reflets d'or dans ses iris sombres quand elles étaient exposées au soleil, ni à quel point ses pupilles artificielles pouvaient se dilater quand l'émotion s'emparait de lui. La lumière modelait son visage, telle la main d'un sculpteur, creusant sa joue pour mettre la pommette en valeur, illuminant son nez long et droit, accentuant la légère fossette de son menton, créant un jeu d'ombres qui le rendait particulièrement attirant.

Mais ce qui retenait le plus son attention, c'était ses lèvres, leur tracé sensuel, leur modelé parfait qui appelait les baisers. Depuis combien de temps les fixait-elle avec envie ? Depuis combien de temps le détaillait-elle entièrement, depuis ses cheveux dégageant sa nuque inflexible jusqu'à ses jambes athlétiques ? Il était si beau qu'elle en était presque éblouie, comme d'avoir trop regardé le soleil.

Une sensation agréable la réchauffait de l'intérieur, un sentiment diffus qu'elle avait du mal à identifier. Était-ce le soulagement ? Le bonheur ? Elle y réfléchirait plus tard. Pour le moment elle voulait juste savourer l'instant qui semblait s'étirer dans le temps à l'infini. Juste elle et lui.

Quand elle sentit enfin ses lèvres sur les siennes, elle eut l'impression que le monde volait en éclat. Tout devint plus intense, la sensation de son corps contre le sien, sa chaleur enveloppante, même la lumière devenait incandescente autour d'eux. Leurs langues entamèrent une danse sensuelle, lui faisant ressentir mille flèches de désir dans le creux du ventre, lui arrachant des gémissements extatiques.

Le monde autour d'eux n'existait plus, le temps même n'avait plus cours dans cet espace de félicité rien qu'à eux, créé par la magie d'un baiser échangé.

Mais quand elle s'écarta pour le regarder encore, ses yeux s'écarquillèrent d'horreur, sa bouche s'ouvrit sur un cri silencieux. Ce n'était plus le beau visage qui se trouvait devant elle mais un amas informe de circuits électroniques de forme vaguement humaine. Des leds rouges clignotaient furieusement à côté de fins tuyaux dégoulinants de thirium d'un bleu hypnotisant.

Plic ploc

Les yeux bruns aux reflets d'or s'ouvrirent soudainement au milieu des fils électroniques entremêlés, la fixant d'un air terrifié.

Plic ploc,

Le thirium gouttait sur le sol. La masse informe changea imperceptiblement, fondant lentement, révélant un trou sombre sous les yeux qui la fixaient toujours.

Plic, ploc, plic, ploc

Le bruit du sang s'écoulant était de plus en plus fort. L'atmosphère devenait étouffante, la lumière du soleil s'était changée en longues langues de feu brûlantes les entourant plus étroitement.

- Aide-moi ! Gémit la bouche sombre. Aide-moi !

PLIC, PLOC

Elle plaqua ses mains contre ses oreilles pour ne plus entendre les cris qui la bouleversaient et lui donnaient la nausée. Le son des gouttes de thirium sur le sol devenait malgré tout assourdissant, envahissant tout l'espace.

Elle se réveilla en sursaut, le coeur battant à tout rompre. Les yeux bien ouverts sur le plafond de son salon où elle s'était endormi en regardant un film, elle ressentait encore le désir mêlé à la peur. Elle se redressa d'un coup, haletante, quand elle crut entendre de nouveau les gouttes de sang. Un instant elle se crut devenu folle, puis elle l'entendit de nouveau. Cette fois son esprit totalement réveillé localisa le bruit dans la cuisine.

- Merde ! Le robinet ! S'exclama-t-elle en se levant précipitamment.

Les derniers lambeaux de son rêve s'évanouirent tandis qu'elle appelait un plombier pouvant rapidement venir réparer la fuite.

(Not) Alive - Machine | Detroit Become Human [Terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant