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Le mois a passé et les révisions accentuées. 

Les examens arrivent bientôt, ils sont à la porte. Les semaines défilent comme des secondes et le temps passe vite, trop vite pour les deux lycéennes. 

Mei Li aime encore Justine. Justine aime encore Mei Li. 

Au lycée, tout le monde est au courant. Mais elles laissent parler les mauvaises langues qui insultent leur relation. 

Mei Li ne parle presque plus à Takao, trop occupée à passer du temps avec Justine. Takao ne lui en veut pas, il a fait presque pareil lorsqu'il a rencontré Komaro. Il sait que les premières semaines, on oublie le monde qui nous entoure. Que l'amour parait tellement essentiel que plus rien ne compte, même pas manger ni boire. Alors il les défend des mauvaises langues, son copain et lui répliquent aux homophobes que l'amour n'a pas de genre. 

Que seuls les sentiments comptent. 

Qu'on ne fait pas tout une histoire sur les couples hétérosexuels du lycée. 

Qu'iels devraient avoir autre chose à faire que les insulter en permanence. 

Qu'au final, seule Mei Li aura son Bac, puisqu'iels sont tous trop occupé'e's à lui inventer des coups tordus afin de lui planter leurs armes dans le dos pour réviser. 

Que cela se retournera contre elleux. 

Et puis un jour, 

Justine arrive au lycée. 

Elle cherche des yeux Mei Li. Elle ne la trouve pas. 

C'est étrange se dit-elle. 

D'habitude, Mei Li l'attend toujours à côté du portail blanc. 

Et si elle était malade... 

Justine regarde son téléphone. 

Aucun message. 

De personne. 

Elle cherche l'ami de Mei Li des yeux. 

Takao. 

La raison de leur rencontre. 

Mais elle ne le trouve pas non plus. 

Elle est affolée. 

Mais elle ne dit rien à personne. Parce que déjà, elle remarque les regards qu'elle ignore quand Mei Li est là. On la regarde comme si elle était un monstre. On l'insulte. 

Les insultes, elle en fait fi. 

Ne les entend pas. 

Elle sait juste que si elle arrive à les supporter, son amoureuse n'y arrivera pas. 

Pas seule, Mei Li est trop timide. Trop réservée. Trop douce. Trop sensible. 

Elle attend, seule, en vain. Elle espère. 

Elle pense à toutes les choses qui pourraient lui être arrivées. 

Pour se rassurer, elle lui envoie un message. C'est le tout premier. Les deux s'étaient refusé cela d'un accord commun. 

Et elle en envoie aussi un à Takao. 

"Salut." 

C'est Komaro. L'amoureux de Takao. 

"Toi aussi tu les cherche?

-Oui. Mei Li n'est jamais en retard. Et elle a dit qu'elle me préviendrait si elle venait à ne pas pouvoir aller en cours. 

-Pareil pour Taka. J'espère qu'il ne leur est rien arrivé de grave.

-Moi aussi." 

Iels sont restés tous les deux contre le mur du préau. Gênés. 

Et puis la sonnerie les a poussés dans leurs rangs. 

Puis dans leurs cours. 

A la pause, les doigts de Mei Li n'ont pas effleuré ceux de Justine. 

Et le regard de Justine ne croisa pas d'autre regard que celui de Komaro. 

Elle écouta distraitement, d'une seule oreille les problèmes de Rafaëlla, et le merveilleux après-midi de la veille de Louison. 

Et Komaro regarda toute la journée les places de Mei Li et Takao. Vides. 

A la sortie des cours, iels se retrouvèrent. 

"Iels ne sont pas arrivés dans la journée j'imagine?" 

Komaro baissa les yeux 

"Non...mais j'ai réfléchi en cours. J'arrivais pas à suivre. Mais avant... T'as des nouvelles? 

-Non, aucun des deux n'a répondu à mon message... C'est quoi la conclusion de ta réflexion? 

-Je sais où habite Takao. Et où habite Mei Li aussi. 

-Bah qu'est-ce qu'on attend? 

-Je sais pas, on y va? 

-Evidemment! 

Iels marchèrent, sans parler, sous le ciel qui était encore clair. Iels n'osaient ni faire des hypothèses négatives, ni positiver. Au bout d'une grosse demi-heure de marche, iels s'arrêtèrent devant un petit pavillon, tout ce qui a de plus classique. Iels échangèrent un regard et appuyèrent sur la sonnette. Personne ne répondit. Iels marchèrent un peu plus et se retrouvèrent face à la petite maison de Mei Li. 


Elle était petite en largeur mais très haute. Les volets de tous les étages étaient peints en vert bouteille. Un petit jardin planté uniquement de fleurs était devant la maison, et Justine devina qu'il y en avait un avec plus de choses à manger derrière. Iels observèrent les fruitiers. Komaro expliqua : 

"Si elle est partie ce matin, elle n'est pas revenue depuis, car elle s'occupe des framboises dès qu'elle rentre, de sorte que les framboisiers soient vides de fruits mûrs avant le lendemain, sa famille et elle les mangeant au dessert." 

Le cœur de Justine se serra, et cela dût transparaitre sur son visage car Komaro le remarqua. Il s'excusa :

"Pardon. J'aurais pas dû dire ça. Je suis désolé. "

Elle secoua la tête

" C'est pas grave. De toute façon, tu as sûrement raison..." 

Elle appuya sur le petit bouton tout peinturluré de la sonnette de la maison de Mei Li. 

"Famille Clestaline", lut elle sur la boîte aux lettres. 

Elle essuya la larme sur sa joue, et l'expression lui franchit les lèvres. 

"C'est pas des larmes, c'est des flocons de neige fondus"

Alors, après tout le stress de cette horrible journée d'attente et de peurs, après cette expression qui lui faisait tellement penser à elle, elle éclata en sanglots. 

Elle ne réussit pas à lire le contact faisant vibrer son téléphone, alors elle le donna toute tremblante à Komaro qui se tenait à côté d'elle, luttant pour retenir ses larmes.

Pour quelques instants entre ses brasOù les histoires vivent. Découvrez maintenant