Chapitre 15

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Coucou toi ! Avant de commencer ce chapitre, je t'invite à aller jeter un coup d'œil à mon nouveau roman : Aveuglément. Mafia, amour, handicap, suspens, guerre seront au rendez-vous !

Je ne t'embête pas plus, bonne lecture ! ;)

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Lara et moi nous engouffrons dans cette foule compacte d’inconnu. Les gens sont si éméchés et euphoriques qu’il nous rentre dedans pour la plupart. Outre le fait que ce soit quelque peu dérangeant, je redoute de tomber à tout moment du haut de mes échasses… Ce n’est vraiment pas rassurant, soit dit en passant. La chute pourrait être douloureuse.

— On va boire un verre ? Je meurs de soif ! me demande ma meilleure amie en me désignant le bar non loin.

 
La chaleur est étouffante, un rafraîchissement serait le bienvenu.
 
— Je te suis.
 
En jouant des coudes, on parvient à se frayer un chemin dans la foule. Si Lara opte pour une bière afin de « commencer tranquillement la soirée » selon ces dires. Je me penche sur un diluant. Un jus de pomme fera amplement l’affaire. Je n’oublie pas chez qui je suis, il suffit que je baisse ma garde un instant et c’en sera fini de mes résistances. L’alcool a — comme on dit — le don de désinhiber les plus timides. Lara lève les yeux au ciel face à mon choix plus que raisonnable. Tant pis, je suis dans la tanière du tigre ! Un endroit design et somptueuse, mais ça reste sa tanière !
 
— Ce n’est pas ce que j’avais en tête quand je t’ai proposé de sortir pour qu’on aille s’amuser !
 
— Peut-être, mais c’est ce qu’il y a de mieux à faire !
 
Mon amie descendant sa bière avec lenteur. Je profite de ce moment statique pour observer la foule. Même si la façon dont je suis apprêtée ne me ressemble pas, je suis loin de faire tache parmi les autres. Toutes les filles sont sublimes et il en va de même pour les garçons, je ne serais pas étonnée qu’il y ait tout type d’athlète et de mannequin aux alentours. Je suis bien contente que Lara ait eu la bonne idée de nous métamorphoser. On se fond dans le décor.
 
« Fondre » reste un bien grand mot, je peux percevoir quelques regards masculins se promenant dans notre direction… il y a peut-être moyen de s’amuser tout en gardant le maître des lieux à distance ce soir. Essayer ne coûte rien. Comme à son habitude, Lara commence à se déhancher. Elle a le rythme dans la peau et à force de sortir, elle m’a refilé cette « maladie ». En latina qui se respecte, elle m’a tout appris et je ne me débrouille même pas trop mal. Lorsqu’un hit s’élève, il n’en faut pas plus pour que Lara m’entraîne au milieu de la piste, presque hystérique.
 
C’est son truc, une musique qui sait la stimuler peut en un rien de temps le rendre possédé par une gourou de la danse. Outre son talent, elle se fiche du monde qui l’entoure. Elle agit pour elle-même, simplement pour s’amuser, et c’est quelque chose que j’ai toujours beaucoup admiré chez elle. Se foutre de l’avis des autres n’est pas une capacité à la portée de tous. La fréquenter me permet d’être un peu plus sûre de moi chaque jour.
 
Lorsque les basses vibrent, je l’ai de toute évidence perdue. Très bien, il ne me reste plus qu’une chose à faire, l’imiter ! Peu hardi au début, je bouge lentement. Les inconnus autour de nous me crispent. Puis progressivement, je me détends jusqu’à être plus audacieuse. À force de mouvements et de musiques, on en oublie la gêne et les autres. Je me laisse totalement aller, le corps souple et fiévreux. Je veux seulement m’amuser à n’en plus finir. J’ignore si notre DJ à des origines latines, mais il a son quart d’heure de folie espagnol ce qui n’est pas pour déplaire à mon amie au sang colombien.
 
Les talons sont tout de même handicapants, je ne peux pas bouger autant ou aussi bien que je le souhaiterais, contrairement à Lara que rien n’entrave. Je ne sais pas comment elle fait : mes voûtes plantaires implorent pitié ! Sans gêne, je décide de m’en défaire et les dépose non loin d’une cheminée sous le regard railleur de ma partenaire.
 
— Quoi ? J’y peux rien, ça fait un mal de chien !
 
Hilares, nous poursuivons. Je suis… libérée, délivrée pour citer la princesse Disney ! C’est très agréable le contact avec terre ferme, je n’ai plus cette sensation d’être une longue liane et j’ai retrouvé ma petite taille. Les gens alentour me surpassent grandement, peu importe. Je réexpérimente cette période d’étude où Lara et moi décompressions par la danse. Ça fait du bien, plus de tresse, d’appréhension. Juste nous, la musique et un regard. Je le sens peser sur mon corps. Une seule personne me fait cet effet sans avoir besoin du toucher. Un sentiment sûr, alors même que j’ignore où il se situe. Il m’épie. Perturbée, j’observe les alentours, tâche peu aisée au vu de ma petite taille retrouvée. Les gens sont si grands… Je finis par le distinguer, adossé sur le mur blanc d’une sorte d’estrade en parquet où se dresse une table.
 
Il est en compagnie du pentagramme magique, comme j’aime à les appeler. Son regard ne dévie pas. Il est brûlant, inquisiteur, presque… Possessif ? Je m’emballe, je le ressens grâce à mon rythme cardiaque, cet engourdissement ankylosant… Du calme ! Je ne suis que sa distraction, il joue avec moi parce que je suis la seule à lui dire « non ». C’est juste du physique, et rien de bon ne ressort de cela. Remontée sans raison précise et effrontée, je lui lance un regard de défi méprisant et l’ignore superbement en détournant la tête. Il peut m’espionner tant qu’il le veut, il ne touchera pas. Qu’il aille titiller les greluches qui ouvrent les cuisses à la simple évocation de son nom. Moi je passe. Enfin, je m’en convaincs… Plus fougueuse, je me déhanche avec ardeur, tourne de temps en temps sur moi-même, effectue de savants mouvements de buste qui font virevolter la cascade de mes cheveux, remue des fesses quand il faut et comme il faut pour ne pas glisser de sexy à vulgaire… En bref, je mets en pratique tout ce que j’ai appris de ma mentore, Lara. L’élève surpasse bientôt le maître. Qu’est-ce que je cherche à prouver ?
 
— Qu’est-ce qui te prend ? me demande cette dernière quelque peu étonnée de me voir ainsi, moi qui fais habituellement montre de retenue.
 
— Tu voulais que je m’amuse, nan ? C’est ce que je fais !
 
— Je suis de si bons conseils…
 
Dis ça à mon rabbit… Je me moque de la prétention de Lara et du coin de l’œil je perçois Archibald parler avec Percy. Ce dernier se fraye un rapide chemin dans la foule, vers nous. Focalisé sur Lara, il ne m’accorde pas d’attention. Il aura eu vite fait de m’oublier face aux jolis yeux de mon amie, celui-là !
 
— Je crois que ton casse-croûte arrive.
 
Lara regarde autour d’elle et paraît tout excitée en voyant le beau hockeyeur.
 
— Mesdemoiselles, voulez-vous vous joindre à nous pour un petit jeu ?
 
Étrangement, ça ne me dit trop rien. Jouer avec Archibald King n’est clairement pas une bonne idée. À chaque fois que je m’y suis frotté, les évènements ont dérapé en ma défaveur. Archibald n’est pas de ceux qu’on bat, il gagne. Il me l’a suffisamment fait comprendre. Son nom de famille lui-même en est une preuve ! Et en fonction du jeu, les conséquences peuvent être lourdes. Je n’ai nullement confiance en cet homme, il est bien trop malin et, quelle qu’en soit la manière, il parvient toujours à tirer la situation à son avantage.
 
— Quel jeu ?
 
— On ne sait pas encore, on est justement en train de choisir. Vous pouvez proposer quelque chose si vous voulez.
 
Je ne doute pas qu’Archibald a demandé à Percy de venir nous suggérer de jouer. Ce stratège a déjà tout prévu, et le mal qu’il se donne pour m’avoir m’émoustille. Je ne me défilerai pas. Mes chances résident dans le choix du jeu qui n’a pas encore été décidé. Je n’ai clairement pas l’intention de me laisser impressionner comme il l’a insinué un peu plus tôt. Il s’est attaqué à la mauvaise femme. Sans attendre, je me dirige vers l’estrade et je ne peux qu’entendre Percy s’exclamer dans mon dos.
 
— Je prends ça pour un accord.
 
Autour de la table, les garçons discutent avec animation indécis, en contradiction. Archibald quant à lui ne cache pas son étonnement que je sois venue si rapidement et la première qui plus est. J’en ai ras le bol de ces provocations, s’il croit que je vais courber l’échine à chaque fois, il peut toujours rêver. Je me la suis fermée parce que j’étais la petite nouvelle, dorénavant je vais lui montrer qui est Juliana Mickaelson ! J’ai une chance de le battre à son propre jeu.
 
— Messieurs ! On va trancher !
 
Tous se taisent, confrontés à mon aplomb. Lara qui nous a rejoints avec Percy sourit, elle a compris.
 
— Comme on dit, honneur aux femmes et j’ai choisi ce qu’on va faire, dis-je en me saisissant d’une pile de gobelets rouges. Un bière-pong !
 
Silence.
 
— Quoi vous ne savez pas viser, les mecs ? Étonnant pour des personnes qui pissent debout…
 
Ne me demandez pas ce qui me passe par la tête ! Je n’en ai aucune idée… Cette soirée est juste en train de me retourner le cerveau ! En tout cas, mon pic fait mouche. Ils rient et positionnent les gobelets en un instant, les remplissant de bière à partir d’un fut non loin et que je n’avais même pas remarqué. Archibald esquisse une moue malicieuse, je frémis. Il ne semble pas me prendre au sérieux, tant pis pour lui, il s’en mordra les doigts au moment voulu. Je n’y ai certes plus joué depuis un petit moment, cela remonte à plusieurs années. Toutefois, je suis persuadée que j’ai encore de bons restes, c’est comme le vélo, ça ne s’oublie pas.
 
Sans ciller, nous nous affrontons du regard, je refuse de détourner les yeux. Il veut la guerre, il va l’avoir. Je vais lui ôter cette petite expression suffisante et horripilante. La seule qui va gagner c’est moi et je m’assurerais que ce mec insupportablement attirant quitte cette table à quatre pattes, même si pour cela ce colosse doit boire des litres et des litres d’alcool. À peine César demande-t-il qui veut commencer qu’Archibald et moi répondons à l’unisson un « moi » franc et déterminé.
 
Les autres sont amusés aussi bien qu’étonnés de cette soudaine rivalité évidente. Nous prenons place et je saisis les deux balles qui inaugurent la partie. À la fac, j’étais indétrônable à ce jeu, il faut dire que je détestais tellement le goût âcre de la bière que j’ai très vite appris à devenir la meilleure pour ne plus avoir à en ingérer. Bilan, je ressortais toujours vainqueure et sobre. À côté, Lara est morte de rire sous les yeux médusés des garçons qui ne comprennent pas encore l’ampleur de mon expertise. Je suis si surexcitée que je peine à retenir mon euphorie.
 
— Allez, ma belle, lance… Murmure Archibald de manière à ce que moi seule puisse l’entendre.
 
Ma respiration se bloque, le surnom doucereux qui sort de ces lèvres me fait vibrer. C’est ce qu’on appelle de la distraction, et il ne m’aura pas de la sorte. Même s’il me fout les nerfs en pelote ! Concentrée je fais abstraction de tout, et lance la première balle puis la deuxième. Les deux font mouche. Ravie, je sautille et m’exclame :
 
— Tu bois, King ! Et jusqu’à la dernière goûte, on se dégonfle pas !
 
Les spectateurs s’amassent lentement et se marrent tandis qu’Archibald se divertit de mon attitude délurée. Son sourire cachottier semble me dire « Tu es trop sûre de toi, tu vas le regretter ». Je m’en moque, je compte bien l’achever et me venger pour toutes ses fois où il m’a rendu chèvre ! Dans sa veste de cuir, alors qu’il avale ses verres d’une traite et sans difficulté, il est indécemment et injustement sexy… Bon sang, pourquoi ne puis-je m’empêcher de toujours le reluquer ? Pour ma défense, sa virile paume d’Adam qui monte et descend au fil de ses gorgées ne m’aide pas à faire ignorer le magnétisme animal qu’il possède. Bordel ! Ma vieille, c’est pas le moment de dérailler… L’occasion de lui mettre la pâtée est trop belle pour la laisser m’échapper !
 
— À mon tour, beauté…
 
Sans me quitter un instant du regard, il lance sa balle que je vois atterrir dans mon verre. Je suis sur le cul ! Sans les yeux ? Vraiment ?
 
— La chance du débutant, c’est tout…
 
Il rit de ce qui s’apparente à de la mauvaise fois, tandis que j’empoigne dédaigneuse le gobelet que je bois en dissimulant difficilement une grimace dégoutée… l’aigretté de la bière ! J’enchaîne rapidement, impatiente de lui rabattre le caquet.
 
— Allez, King, on se ramollit pas !
 
Visiblement, le fait qu’un petit bout de femme comme moi provoque ainsi le grand hockeyeur, capitaine des Tigers, divertit l’assemblée qui enfle graduellement. Tant mieux, ça le remet à sa place. Nullement impressionné par mes tirs parfaits, il plonge à nouveau une de ses balles dans l’un de mes gobelets avec désinvolture… Il me cherche.
 
— Toujours la chance du débutant ?
 
C’est dingue ce qu’il peut m’insupporter. Parfois, j’ai une de ces envies folles de le gifler, histoire de voir son petit air suffisant et arrogant disparaître. L’expression « des claques se perdent » prend tout son sens ! Je ne me donne pas la peine de répondre et bois agacée. Rebelote, j’en mets une autre, lui aussi…
 
— Jamais deux, sans trois ! Que de la chance.
 
Il rit ouvertement. De ce son viril, masculin si hypnotique qui est le sien… Seulement après un énième tir concluant de ma part, il m’en fait ingurgiter un quatrième. C’est mauvais : il est bon. Et je n’avais pas envisagé qu’il me fasse tant boire. Jusque là, mes opposants finissaient toujours par se déconcentrer, s’énerver ou être vite bourrés. Je gagnais donc rapidement, sobre. Mais me frotter à un adversaire aussi doué que moi change la donne. D’autant plus que je ne tiens pas bien l’alcool. Pour ne pas dire, très mal. En bref, les effets indésirables commencent à se manifester.
 
Cette sorte de langueur qui alourdit les sens et ralentit les réflexes m’assaille. Merde ! Je m’interdis de perdre, quitte à finir ivre morte je compte bien infliger une défaite à cet imbuvable prétentieux. Je parviens encore à contrôler le cinquième tir et me console : il ne reste plus que quatre gobelets à Archibald, contre cinq dans mon cas. J’ai le dessus, je ne détruirai pas cette avance. Il suffit que je me concentre. Enfin si c’était vraiment assez… Un problème demeure : au fil des millilitres, l’ivresse se fait plus forte, les cibles s’amoindrissent et il me faut viser avec une précision chaque fois plus accrue. Après un lancé limite, mais correct, il ne lui reste que trois verres.
 
— Tu sens King ?
 
Faisant mine de regarder autour de moi j’intrigue l’assistance.
 
— Quoi ?
 
— La défaite.
 
Mon expression est carnassière, je prends un plaisir certain à mener le score. Pince-sans-rire, il boit sans problème. J’ai l’impression qu’il tient mieux l’alcool que moi.
 
— T’es sûr que ça va Barbie ?
 
Je tapote le bras de Jackson, comme on le ferait avec un enfant.
 
— Mais oui !
 
— T’es complètement bourrée ! s’exclame Lara hilare.
 
— Pas du tout !
 
Je nie en bloc tout en attaquant ma sixième bière.
 
— Juste un peu éméchée et ça ne m’empêche pas de gagner ; j’élude d’une voix traînante en lançant ma balle de ping-pong qui atterrit par miracle dans l’un des trois verres restants.
 
Pleine d’une énergie inconnue, je sautille sur place à l’instar d’une fillette !
 
— Elle est déchaînée, se moque Anthony quelque peu stupéfait de me voir si loin de mon rôle d’assistante consciencieuse.
 
En parlant de mon boulot, est-ce que je le regretterai demain ? Peut-être. Mais je m’en fous comme de ma première robe ! Pour l’heure, je m’amuse comme une folle !
 
— Je te prends en duel quand tu veux après mon p’tit Anthony, laisse-moi juste le temps d’en finir avec ton cap’taine !
 
Tout semble beaucoup plus fun après avoir bu ! Sans comprendre pourquoi je ris, comme la plupart des gens qui observent le match, je n’aspire qu’à la victoire ! Désireuse de perturber le prochain tir du colosse, je contourne la table et passe du côté ennemie. S’il m’étudie avec méfiance, il abaisse ses défenses face à mon immobilisme… c’est mal me connaître ! Lara le sait mieux que personne au vu de la tête consternée qu’elle affiche. Alors qu’il lance la balle, ma main se déplace rapidement et vient claquer son fessier, ma foi très attirant. Il se retourne d’un bon, surpris par mon geste, mais je me suis déjà précipitée de mon côté pour tirer, bien trop heureuse de ne pas avoir un énième verre à boire. Les garçons pleurent de rire, outrés et choqués. Qu’ils ne me regardent pas comme ça ! Je ne savais pas moi-même ce que j’allais faire avant de le faire… Je viens de « claquer le boule d’Archibald King » ! Seigneur…
 
Quand je disais que l’alcool désinhibe même les plus timides. Quoi qu’il en soit, ce fut très agréable, ces fesses sont fermes, musclées… En bref : comme tous les fessiers masculins devraient l’être, pour mon plus grand plaisir ! Prise d’un fou rire, j’observe le géant. Bouffer du regard, c’est possible. Et j’adore cette expression… Ses yeux sont si pénétrants ! J’ai réveillé son côté brut et primaire, quelque chose me dit que la promesse de vengeance lisible sur ses traits sera loin d’être douloureuse. Bordel, n’est-ce pas ma culotte que j’ai mouillée ? Foutue attraction !
 
— Tu as triché, là ?
 
Question purement rhétorique. Dessinant une auréole imaginaire au-dessus de ma tête, je feins de ne pas savoir de quoi il parle.
 
— J’appelle ça : détournement de l’attention de l’adversaire.
 
Souriante, je m’accoude à la table, et une main près des lèvres, je mordille le premier doigt venu. Je le cherche ? Assurément. Ce n’est que justice. Je lui rends la monnaie de sa pièce, c’est jouissif. Pour une fois, JE contrôle la situation et j’ai deux verres d’avance. Insolente, rebelle, je désigne le gobelet dans lequel j’ai marqué et mime l’action de boire. Il n’insiste pas et s’exécute avec une mine revancharde et déterminée, quelque chose me dit qu’il saisira l’occasion de me le faire payer… un peu plus tard.
 
Il tire et cette fois ne rate pas. J’en fais autant ensuite. La tête commence sérieusement à me tourner. Je peux le faire… Il ne lui reste qu’une bière et moi, trois. Malheureusement, j’échoue à deux reprises consécutives ce qui n’est pas son cas. Nous sommes désormais à égalité et tout se décide maintenant. Le score est serré je dois réussir. Tout comme moi, les observateurs sont concentrés, c’est la balle de match.
 
Je stabilise ma respiration, m’immobilise en m’aidant du meuble, focalise suffisamment mon regard pour que ma vision ne dédouble pas le gobelet… je tire et… marque ! Folle de joie, je m’exclame comme les autres. Archibald King a perdu ! Je l’ai battu à son propre jeu ! Il n’a pas eu le dernier mot ce soir ! En guise d’ultime provocation, je me glisse au côté de l’homme qui me surpasse aisément et lui prend le dernier survivant dont il s’était saisi pour le vider.
 
— Allez, celui-là il est pour moi ! Je ne voudrais pas que tu sois bourré…
 
Mon culot en divertit plus d’un et tandis que je bois son verre. Je détaille le colosse dont l’expression est insondable. Ou alors je suis trop ivre pour la définir… Ma main se pose sur son pectoral droit sans trop de réflexion. Aussitôt, une décharge électrique me traverse. Son muscle est d’une fermeté délicieuse sous mes doigts. Pourquoi m’allume-t-il ainsi ? C’est comme si j’avais été en sommeil toute ma vie et que lui seul était parvenu à m’animer.
 
— Tu n’as pas gagné partout ce soir, King…
 
— Je n’en suis pas si sûr, souffle-t-il alors que sa main se pose doucement sur la mienne.
 
Putain ! Mon cœur part faire un petit tour de grand huit et j’ai cette irrépressible envie de m’approcher plus encore de son corps, je suis affamée.

King of IceOù les histoires vivent. Découvrez maintenant