Chapitre 6

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Anastasia se réveilla ce matin avec un affreux mal de crâne. Son cerveau semblait fourmiller et la rousse avait l'impression qu'on lui chuchotait à l'oreille.

Lorsqu'elle se leva, elle manqua de s'effondrer tant la tête lui tournait. Elle rejoignit tant bien que mal le bureau où travaillait habituellement son père, et le trouva assis devant la cheminée qui trônait au fond de la pièce richement décorée. Un imposant bureau occupait le centre de la salle, recouvert de divers papiers, de livres et de travaux à l'air important. Sur le mur droit de la pièce était suspendu un magnifique portrait d'Anastasia et de sa mère.

La rouquine s'avança en titubant vers son père, qui semblait préoccupé.

« Papa...

- Oui ma chérie ? Que se passe-t-il ? Répondit-il en tournant ses yeux vers elle.

- J'ai mal à la tête... j'entends des gens qui parlent... je ne comprends pas, je ne reconnais pas leurs voix... »

Inquiet, son père la fit s'asseoir dans le fauteuil moelleux placé face à la cheminée. Malgré la douceur printanière, le fait d'être près de l'âtre réconforta quelque peu la jeune fille.

« Tu entends des gens tu dis ? Mmh... Je vais aller faire de rapides recherches, je pense que cela peut être une manifestation de ton don. »

Anastasia gémit. Il ne manquait plus que ça ! Que son don la rende folle ! Elle compliquait suffisamment la vie de son père pour en plus rajouter cela à son fardeau.Pendant que ce dernier s'affairait à son bureau, fouillant parmi les montagnes de papier et feuilletant de temps à autre un livre, la jeune fille observa longuement le tableau sur lequel sa mère figurait. Avec horreur, Ana se rendit compte que les traits de celle qu'elle aimait tant s'estompaient de son esprit, et scruta plus attentivement la peinture afin de s'imprégner du visage qu'elle refusait d'oublier. La douceur de sa mère était frappante et transparaissait sur tout son être. Ses longs cheveux blond vénitien étaient lisses et légers, et tombaient jusqu'à sa taille où reposaient ses mains croisées. Ses doigts étaient fins et délicats, ornés de nombreuses bagues. Une tout particulièrement, ressortait. Elle était faite d'or rose et finement travaillée. C'était son alliance, et celle-ci reviendrait un jour à Anastasia. Cette dernière continua de parcourir du regard le tableau et s'arrêta de nouveau sur son visage. Encadré donc par ses cheveux, il était éclairé par un regard doux et pétillant. Ses iris étaient verts, avant d'être ravagés par l'or de la maladie.

En repensant à cet épisode douloureux, Ana ferma les yeux et décida de ne plus penser à rien. Doucement, bercée par les chuchotements des voix qu'elle entendait, elle glissa dans un sommeil agité.

Au bout de quelques instants, son père la secoua doucement pour la réveiller. Son regard était brillant et il indiqua à sa fille un extrait d'un livre qu'il venait de trouver sous son bureau, sur le tapis rouge.

Le livre s'intitulait « Relevé et symptômes des Dons connus à ce jour». la couverture sobre et les annotations en marge indiquait que ce livre n'était pas officiel et que le père d'Anastasia l'avait obtenu grâce à ses contacts. De plus, il contenait bien plus d'information que ce que l'on pouvait trouvait en ligne.

« Les recherches importantes restent donc mises sur papier... Les scientifiques n'ont pas une totale confiance dans le réseau. Intéressant », se dit Ana, pensive.

Elle saisit le livre et lu rapidement le texte que lui indiquait son père.

Il n'y a eu pour le moment que deux cas de télépathie avérée. Dans le premier cas, le patient se plaignait de forts mots de tête et disait entendre des voix qu'il ne reconnaissait pas.

Le deuxième cas, qui nous a semblé être à un stade plus avancé, affirmait avoir la sensation d'être lié à certaines personnes en particulier, qu'il pouvait entendre de n'importe où. Il ne pouvait en revanche communiquer avec les « non-liés » que s'ils étaient assez proches de lui.

Par précaution, nous les avons empêchés de dormir pendant plusieurs jours afin de les diminuer physiquement et psychiquement. Trop de danger dans cette capacité.

Après les avoir confinés derrière une vitre, nous avons essayé de mettre en lien ces deux télépathes dans l'institut de recherche basé sous la tour Eiffel, mais à part des maux de tête et de courtes bribes de communication, l'expérience n'était pas concluante, possiblement à cause de leur épuisement mental.

Nous avons marqué ces deux patients du symbole ψ (psi) sur l'intérieur de l'avant-bras pour signifier la catégorisation psychique de leurs capacités.

Plus de tests à venir.

Anastasia releva la tête vers son père, perturbée. Ce qu'elle venait de lire correspondait à ses ressentis, mais ce n'était pas cela qui la dérangeait.

« Papa... Les chercheurs... Pourquoi leur... non, nous font-ils du mal ? Demanda-t-elle.

- Eh bien... Je présume qu'ils ont peur. Mais je ne les laisserai pas t'emmener. Et tu sais quoi ? Maintenant que nous sommes presque sûrs de ton Don, nous allons le travailler », dit le père de la rouquine d'un air déterminé.

Anastasia hocha la tête. D'un côté, elle était heureuse de savoir que son père ne la considérait pas comme un monstre et ne la laissait pas tomber. Mais de l'autre, elle ne pouvait s'empêcher de penser aux autres personnes touchées par le virus, qui étaient pour la plupart retenues dans des centres comme des rats de laboratoire et qui étaient certainement maltraités.

Lui restait donc à savoir à qui appartenait la voix aux accents étranges qu'elle avait entendu. Ana était-elle liée à cette personne ?

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