𝐑𝐞𝐝 𝐖𝐢𝐧𝐞『KNY X OC』

Chapitre 十二

『𝐜𝐡𝐚𝐩𝐢𝐭𝐫𝐞 𝟏𝟐』

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Japon, Domaine des Ubuyashiki, 14 Septembre 1903

La lune brillait toujours au milieu des étoiles et de leur lumière blanchâtre. Les hiboux et autres oiseaux de nuits hululaient encore. Le vent soufflait pourtant dans les feuilles des arbres, secouant les branches qui craquaient dans une mélodie presque joyeuse. Malgré tout cela, j'avais l'impression que le temps c'était arrêté, que l'Univers ne tournait plus.

Devant moi se superposaient des morceaux de cadavres, encore vivants il y'a quelques minutes. Derrière moi se trouvait un démon, Dōma, contre qui je ne faisais pas le poids, dans aucun contexte imaginable. Tremblante, les mains plaquées sur ma bouche, je ne pouvais bouger, mon corps en était juste incapable. Je sentais des frissons me parcourir, des sueurs froides glissant le long de mon dos, alors que l'odeur terrible du sang s'emparait de mon nez. Malgré cette puanteur, une autre senteur se distinguait, incohérente avec la situation. Elle rappelait la fraicheur de printemps et de la végétation naissante, des fleurs en bourgeons, d'un soleil à peine levé. Sans vraiment savoir d'où elle venait, je me concentrais dessus en espérant éclipser celle de la mort. Mais il y'avait une chose que rien ne pouvait faire disparaitre. La présence pesante derrière moi, dont une main était posée autour de mon cou, ses ongles tranchants appuyant sur la peau fine sous laquelle se cachait ma jugulaire.

« Trouvée... susurra-t-il.

La voix était grave et presque chantante, comme empreinte d'un véritable amusement. Son souffle s'approcha de mon oreille et je crus que mes genoux allaient lâcher. Mais je tins bon. Je n'avais pas la moindre idée de comment réagir ou de quoi faire. Mon cerveau me donnait l'impression d'être embourbé dans toutes les choses qu'il venait de se passer. Je sentais ses doigts caresser presque imperceptiblement ma peau, sans me donner l'impression de vouloir m'arracher la tête. Alors peut-être... Une idée folle me traversa l'esprit, mais c'était là ma seule planche de salut. Si le démon ne voulait pas me tuer, j'avais une infime chance de me libérer de sa poigne. Lui échapper était une autre paire de manches, mais je devais au moins m'éloigner de lui.

Essayant tant bien que mal d'arrêter mes tremblements, je rassemblais tout le courage qu'il me restait, et renversais violemment ma tête en arrière, rencontrant le bas de son menton que j'entendis violemment craquer. Dans le même mouvement j'attrapais le bras qui venait de me lâcher et le retournais, rapprochant mon dos de son torse, et en prenant appui sur lui, je le projetais sur les gravats, provoquant un bruit fracassant. Il s'écrasa dans la poussière et le sang, son pantalon blanc rayé absorbant le liquide rouge qui le teintait peu à peu. Ses longs cheveux blonds étaient salis, et un éventail doré s'était retrouvé écarté de son propriétaire, qui ne s'attendait visiblement pas à ce que je me rebelle.

Le souffle court, le cœur battant à tout rompre je le regardais, et ma respiration se bloqua dans ma gorge. Alors que je pensais qu'il allait immédiatement se relever pour faire de moi son quatre-heures, il n'en fit rien et se contenta de me regarder, sans même s'asseoir. Allongé au sol comme s'il avait voulu se retrouver là, il me fixait de ces yeux aux couleurs hypnotiques. Je comprenais pourquoi ce démon était chef de culte. Rien qu'en voyant ses yeux on le pensait béni des dieux, le reste n'était qu'une suite logique.

Choquée par son comportement, je n'arrivais pas à bouger, mes pieds étaient comme cloués au sol. Jamais je n'avais réfléchi aussi vite qu'à l'instant, mais la situation ne s'arrangerait pas sans rien. Je ne le lâchais pas du regard, à l'affut du moindre mouvement de sa part, même si au fond, je me doutais bien que s'il le voulait je me retrouverais morte en moins de temps qu'il ne fallait pour le dire. J'avais peur qu'à l'instant où je me décidais à courir loin d'ici, il se ferait un malin plaisir de m'attraper. Et je préférais ne pas penser à ce qu'il me ferait. Mais je ne pouvais pas rester ici sans bouger à le regarder dans le blanc des yeux indéfiniment.