18 juin 2014

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Bonne lecture !

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Killian se réveilla en sentant une vibration sous son oreiller. Entortillé dans ses draps, de la pluie tombant contre les carreaux de sa chambre, il ouvrit les yeux en sursaut et se redressa pour trouver l'origine de ce bruit.

Quand il enroula enfin ses doigts autour de son téléphone, ses écouteurs perdus quelque part dans son lit, son corps se figea en lisant le nom inscrit au dessus des touches rouge et verte.

— Qu'est-ce que...

Killian se mordit la lèvre, puis décrocha avant de porter le téléphone à son oreille. Tout d'abord, il n'entendit rien.

— Blaize ?

Puis, en faisant un peu plus attention, il comprit que ce qui résonnait dans sa chambre n'était pas simplement le bruit de sa simple respiration, mais bien des sanglots. Il eut l'impression que son cœur venait de ralentir dans sa poitrine.

— Blaize ? T'es là ?

J'en peux plus...

Sa voix le prit par surprise, tant elle était rauque et inaudible. Cette fois, Killian se redressa vraiment, et balança ses jambes hors de son lit. Il resta assis là, sur le coin du matelas, les yeux fixés sur le store presque fermé qui laissait entrer la lumière diffuse d'un réverbère.

Quelques rayons tombaient sur ses jambes nues et éclairaient ses pieds.

— Blaize ? Dis moi ce qui se passe, j'entends pas bien...

J'en peux plus, j'en ai marre.

Cela faisait plus de trois semaines qu'il ne l'avait pas vu. Depuis que Blaize avait pris la suite de son père, décédé d'une crise cardiaque au volant de sa voiture, il peinait à trouver quelques secondes à lui accorder. Projeté ainsi à la tête d'une entreprise, uniquement accompagné par quelques associés qui ne lui étaient d'aucune aide, et se sentant obligé de continuer ce que son père avait commencé : ce n'était pas que Blaize n'était pas qualifié, loin de là, car après tout il avait tous les diplômes nécessaires, autant que les compétences. C'était ce qui était convenu, son père le lui avait toujours dit, seulement il aurait dû avoir quelques années de plus. Continuer de bosser dans différents services, apprendre et voir, s'attaquer à la réalité avant de prendre les rennes.

Mais ne même pas avoir le temps de faire son deuil, ne pas pouvoir parler à ses amis, ne pas pouvoir les voir plus de deux heures dans un bar : ils avaient fini par s'engueuler, pour une raison idiote dont Killian ne se souvenait même plus, et les derniers mots de Blaize avait été « parce que tu crois que j'ai besoin de toi ? ».

Il avait claqué la porte de l'appartement de Killian, dans lequel il n'était même pas resté dix minutes, puis avait disparu.

J'arrive pas à dormir, j'ai plus faim et tout a un goût de...de...

Killian avait déjà entend Blaize pleurer. Après une rupture, une bagarre, une mauvaise nouvelle. Il avait été là à l'enterrement de son père, et lui avait tenu la main en s'assurant d'être l'ami dont il avait besoin.

Je mange plus, et je...merde...

Mais ça, ces sanglots, cette difficulté à respirer, ce souffle rapide et inquiétant.

Killian ferma les yeux.

— Blaize, tu veux que je vienne ?

J'y arrive pas, Killian. J'y arriverai jamais, j'ai pas les épaules pour...

— Est-ce que tu veux que je vienne ?

Son sanglot redoubla, et Killian sentit son poing se serrer autour de son drap. Il se leva rapidement, puis marcha jusqu'à sa chaise de bureau où il attrapa un jogging et un pull. S'il partait maintenant, il pouvait traverser la ville en moins de vingt-cinq minutes.

Peut-être même moins, en petite foulée.

— J'arrive, d'accord ? Je suis là dans vingt minutes et..

Non. Ne viens pas, s'il te plaît, juste... reste là.

Encore une fois, sa voix s'éteignit d'elle-même à la fin de sa phrase et il ne resta plus que la pluie. La pièce vide, silencieuse, son téléphone trop lourd, et l'ombre du sourire de Blaize quelque part dans son esprit.

Killian s'assit sur la chaise, les lèvres pincées. Il l'écouta, pendant près d'une heure, pleurer à n'en plus finir. Quand Blaize raccrocha enfin, il n'avait pas dit un mot de plus.

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Un jour à la foisOù les histoires vivent. Découvrez maintenant