Bonne lecture !
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Killian attrapa le gobelet en plastique qui trônait sur la table basse, et posa la paille qui sortait du capuchon transparent entre ses lèvres. Le goût de la vodka ne dépassa pas celui du multi-fruit dans lequel il l'avait noyé, et il décida que son verre était parfait.
À ses côtés, à moitié allongé sur lui, Blaize ne regardait même pas le film qu'il avait lui même mis trente minutes à choisir.
— Qu'est-ce que c'est ? Tu regardes quoi ?
Il tenait entre ses mains des dizaines de feuilles volantes, et passait son temps à les étudier une à une. De là où il était, Killian n'arrivait pas à distinguer ce qui pouvait bien y être inscrit.
C'était étrange, en un sens : quand il était avec lui, Blaize ne ramenait jamais de boulot. Il en parlait quand il en avait besoin, bien sûr, mais finissait toujours par éteindre son téléphone Il ne prononçait même plus le mot de son entreprise, du moins jusqu'à ce Killian finisse par repartir.
— Mmmh.
Killian se renfrogna. Il ne put résister à l'envie de lui donner un petit coup de pied, et fut satisfait en observant les yeux de Blaize se relever vers lui.
— Alors, c'est quoi ?
— Tu veux vraiment le savoir ?
Il n'y avait pas de plaisanterie dans son ton, et soudain Killian ne fut plus sûr de sa propre réponse. Il fronça les sourcils, et pensa à ce jour où il avait porté son courage pour venir jusqu'à l'appartement de Daishou. Appuyer sur la sonnette avait été le plus difficile : ensuite, il n'avait eu qu'à se présenter devant sa porte, et soutenir le poids de son corps quand il lui avait sauté dans les bras.
« On n'en parle plus, d'accord ? On fait comme si de rien n'était, et on redevient comme avant. »
Et depuis, Blaize ne le regardait presque plus avec cet air-là.
Killian hocha la tête. Blaize haussa les épaules.
— Ma mère me harcèle depuis des années pour que je me marie. Apparemment, mon petit neveu adorable ne semble pas lui suffire, et elle insiste. Je lui ai dit y'a une semaine que j'y réfléchirais, et elle m'a envoyé ces propositions de mariage. C'est ce qui se fait, apparemment.
— Tu veux dire... entre les gens riches ?
Blaize acquiesça avec un sourire distrait.
— Ça ne m'enchantait pas vraiment, à l'époque. Mais bon, maintenant je me dis...
Il ne terminera pas sa phrase, mais Killian n'en eut pas besoin. Il se cachait légèrement derrière son gobelet, puis émit un petit « mmmh » compréhensif.
La télévision émettait une lumière diffuse dans la pièce, et il ne put ignorer le regard insistant de Blaize. Finalement, il demanda :
— Ça veut dire que tu comptes en accepter une ?
— Ouais. On n'est plus tout jeune, tu sais ?
Killian le sentait : son cœur qui se serrait douloureusement, une irritation qu'il ne put contenir prendre place sur ses traits, son ventre qui se retournait. Il essaya de l'ignorer, comme il le faisait à chaque fois. Il essaya vraiment.
Penser à leur amitié, qu'un simple baiser avait mis en péril. À ce qui se produirait si par hasard, leurs sentiments finissaient par changer un jour. Ils pouvaient être amis, ça ils l'avaient déjà essayé, mais plus ? Killian avait passé des nuits à se le demander.
Blaize était son meilleur ami, peut-être même son âme-sœur. Tout balancer par la fenêtre pour quelques baisers, ça lui arrachait le cœur.
— Tant qu'elle est pas aussi chiante que toi, je m'en fiche.
Il essayait de plaisanter. Blaize afficha un sourire un peu distant, et détourna le regard à son tour vers la télévision. Mais cette fois, Killian ne parvint pas à faire comme d'habitude. Car sa question, ses interrogations, sa petite voix qui lui demandait tous les soirs si telle ou telle chose vaudrait le coup : Blaize vaudrait toujours le coup, et c'était bien là le soucis.
Dans un souffle un peu plus puissant que les autres, il se redressa, arracha les papiers des mains de Blaize, et les balança dans la pièce. Son regard flamboya tandis que ses mains attrapaient ses épaules et qu'il le plaquait contre le tissu certainement très cher du canapé.
— Ki...llian ?
Les yeux écarquillés, le souffle court : Killian observa les cernes de Blaize, son expression fatiguée, ses joues roses, et son air médusé. Complètement figé, il semblait essayer de comprendre ce qu'il venait de se passer.
— Je pensais que j'y arriverai. Parce que malgré ce qu'on en dit, j'aime être ton ami. C'est toi, mon meilleur ami. Et j'ai bien vu que je pouvais pas vivre correctement, sans toi. Mais malgré ça...
Son visage se froissa, et ses mains se resserrèrent. Blaize grimaça.
— Je peux pas faire comme s'il s'était rien passé. J'étais perdu, et je le suis toujours, mais... j'ai envie de plus.
— Killian...
— Ce voyage, à la mer. Je pensais qu'être ton ami, c'était plus important que tout. Et au final, j'ai même plus osé te parler. Ça devrait nous servir de leçon, non ? Mais j'y arrive pas. Blaize, j'y arrive pas.
Il leva l'une de ses mains, posa ses doigts sur sa joue, se pencha légèrement....
— Repousse moi, supplia-t-il presque. Repousse-moi, et on ira pas plus loin. On pourra essayer à nouveau d'être comme avant.
Mais l'expression de Blaize lui confirma ce qu'il pensait, et les bras de ce dernier entourèrent sa nuque. Il se releva légèrement, lui offrant ses lèvres en fermant les yeux, et Killian ne tint que quelques secondes de plus.
Il espérait juste ne pas tout gâcher.
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Un jour à la fois
Romance| Boy's love | Histoire terminée | Blaize et Killian se rencontrent un soir, et ce qui devait être une aventure sans lendemain devient l'amitié d'une vie. Les années passent, les liens se créent, se renforcent, se cassent et se brisent. Faut-il r...