CHAPITRE 11: LES PHOTOS

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Julien semblait extrêmement concentré. Il manipulait l'appareil photo avec soin en le montant sur son « piédestal ? ».
Mon cœur battait la chamade dans ma cage thoracique mais mon esprit semblait ailleurs comme si j'allais me réveiller d'un instant à l'autre.
J'étais tellement heureuse d'être en compagnie de Julien ! Surtout que je ne lui avais rien demandé. Il était venu me voir de son propre chef.
Zoé n'en revenait toujours pas. Elle ne me l'avait pas dit mais je pouvais lire la stupeur toujours ancré dans son visage. Ses yeux bleus semblaient perdus dans la contemplation d'un point inconnu dans l'au-delà. Ou en tout cas très loin de nous. Je la trouvais belle. Grande, mince (presque maigre) mais avec une taille bien marquée et un corps de mannequin. Son visage m'évoquait un angelot déchu avec son nez en trompette et ses beaux yeux rieurs. Sa bouche paraissait un peu trop grande pour son visage harmonieux mais il restait tout de même délicat. Ses cheveux châtains-blonds attachées en une queue de cheval lâche, je lui trouvais un charme fou. Pourtant j'étais bien la seule. Sans que je puisse savoir pourquoi, la plupart des gens affirmaient la trouver banale et d'autre « moche ». Je ne les comprenais pas. Mais après tout, c'était leur avis. J'avais le mien. De plus j'étais connue pour voir la beauté, même quand elle était inexistante, des gens qui m'entouraient. Peut-être amplifiai-je de façon considérable son charme ?
. . .
Julien avait fini de monter l'appareil sur son pied. Il m'appela, me tirant de ma rêverie.
« _ Tu commences ?
_ Non vas-y. Je sais pas vraiment comment faire. »
Mais que m'arrivait-il ? Je savais prendre des photos quand même ! Qui ne savait pas ! Pourtant il me gênait. J'étais mal à l'aise en sa présence et je n'aimais pas du tout ça. Il fallait que je me reprenne.
. . .
Ayant fini avec les peintures, la guide qui s'appelait Jasmine, nous dirigea vers les statues.
Je marchai en bloc avec Julien, Zoé et Bastien. Ils s'étaient mis respectivement avec Lola, une fille pas très intéressante, et Théo, un gars avec lequel je n'avais jamais eu de vraie conversation. Zoé semblait vexée. D'une part parce que je l'avais un peu laissée en plan et d'autre part parce que ce n'était pas pour n'importe qui.
Bastien me lança :
« _ T'es amie avec Julien toi ?
_ Euh... Ouais !
_ Tu sais que la dame s'appelle Jasmine ?
_ Oui et ?
_ Et bah c'est comme dans... CE RÊVE BLEUUUUU ! se mit-il à chanter (mal)
_ Comment tu gâches ma chanson ! Je suis obligée de te rejoindre là il faut la souiller comme il se doit ! »
Et je me mis moi aussi à déclamer le plus mal possible et sans le rythme. Julien se retourna et nous fixa en fronçant les sourcils. Je continuai de chanter.
. . .
Nous prenions des photos de sculptures romaines où ils étaient TOUS nus. Non mais franchement c'est quoi leur problème avec le naturisme ? Je me sentais plus à l'aise avec Julien sans pour autant pouvoir me lâcher et être moi-même. Et s'il n'aimait pas celle que j'étais réellement ? Parfois nous passions devant Bastien et Théo et je me lançai dans un grand débat avec Bastien, ce qui avait l'air d'agacer Julien sans que je puisse en savoir la raison.
. . .
L'atelier passa relativement vite et c'était plutôt amusant, surtout quand on est en bonne compagnie. Pourtant oserais-je avouer que j'étais un peu déçue ? Julien et moi n'avions pas vraiment parlé. Enfin... D'autre chose que de lui j'entends. Aurais-je le courage et l'honnêteté de penser tout bas que j'aurais préféré être avec Bastien parce que j'étais sûre de m'amuser avec lui ? Non.
Dans l'ensemble, c'était... cool. J'avais passé un bon moment avec Julien et c'était le principal. Je retenais surtout qu'il avait pensé à moi pour ce travail, au détriment de sa soit disant « meilleure-amie », qui elle, l'avait toujours mauvaise. Donc oui, bien entendu, j'étais ravie.
« _ Alors c'était bien ? demandai-je, enthousiaste, à Bastien
_ Ouais c'était cool. Et toi ?
_ Super.
_ J'aurais voulu que tu viennes avec moi.
_ Moi aussi...(oups) Mais on s'est bien amusés quand même ! C'était hyper bien ! essayai-je de me rattraper alors que Julien se tenait derrière moi et avait sûrement entendu.
_ La prochaine fois.
_ Ouais, dis-je, en lui tapant dans la main. Il faut qu'on fasse un truc pour symboliser notre amitié !
_ Tu penses à quoi ?
_ Je sais pas... un mug !
_ Un mug ?
_ Ouais avec une photo de nous deux !
_ Ou un tee-shirt !
_ Et des cartes de vœux !
_ Un album photo !
_ Une coque de téléphone !
_ Des posters ! »
Les gens qui nous entendaient parler nous regardaient bizarrement, mais, franchement, je m'en foutais.
Nous arrivâmes à l'entrée du Louvre, sous la pyramide. Les autres nous attendaient.
"_ C'était bien ? demanda Camille, à côté d'Alice.
_ Ouais super ! Juliette était avec Julien !" lança Zoé, l'air désinvolte.
Elles me fixèrent avec un regard suspicieux, les sourcils levés et l'air de dire « c'est vrai ce qu'elle dit ? »
J'acquiesçais et commençais à leur raconter tout. En laissant de côté le fait que je ne me sentais pas du tout à l'aise avec Julien et que ça m'avait gêné toute la matinée. Omettre n'était pas mentir. Même si là c'était plutôt à moi-même.
. . .
Malgré ma légère déception vite oubliée face à l'enthousiasme de mes amies, cette matinée avait été cool. Elle nous avait surtout permis de ne pas avoir Maths. Je n'aimais pas le prof qui partageait la même animosité à mon égards. Sûrement ne m'aimait-il pas parce que j'étais l'une des seuls à comprendre son charabia bizarre à propos d'équations, de puissances et d'inconnus. Et oui, on a le talent ou pas, comme dirait Bastien.
J'étais en tout cas ravie, d'autant plus que la reine des poufs avait eu l'air outrée et vexée que je fasse le travail avec Julien.
. . .
En rentrant chez moi, je m'affalai sur le canapé et consultai mon iPad. Je relu les premières pages de mon histoire, vous savez celle sur le père alcoolique, et décidai de tout effacer. Pour recommencer. Déjà que je n'avançais pas, je venais de me rendre compte que c'était nul. Ou étais-je trop exigeante envers moi-même ?
J'entamai ainsi mon histoire à nouveau. Puis effaçai encore. Je recommencerai plus tard.
. . .
#Conversation SMS avec Bastien#
Coucou !
Salut !
Ça va ?
Ouais et toi ?
(J'ai remarqué quelque chose. La plupart du temps, on ne répond jamais « non » à cette question. Parce que ce n'est que de la politesse et on le sait.)
Ouais.
Tu fais quoi ?
Je suis sur l'ordi. Et toi ?
Télé.
J'ai pensé à un truc hyper important : on n'a pas de surnoms !!!
Et ???
Bah il faut VITE qu'on s'en trouve.
Oh non moi je veux pas de surnom.
Mais t'es nuuuuuuuul !
Je sais.
Je vais quand même pas t'appeler Bastien ????
Pourtant c'est le nom qui figure sur mon passeport.
C'est aussi le nom du gars dans L'histoire sans fin.
Ouah quelle référence ! Et où veux tu en venir ?
Bah... toi tu as le nom d'un garçon tellement drogué qu'il s'imagine une vie avec un espèce de dragon-chien volant et moi le nom d'une idiote qui se suicide à la fin d'une pièce parce que son mec, le glandu, est mort la croyant morte.
Et ???
On doit se trouver des surnoms !!!
Ce sera sans moi.
Mais je veux mon surnom !!!
Alors je t'en trouverai un.
Promis ?
Promis.
Quand ?
Laisse moi réfléchir je te le dis demain.
Ça marche.
. . .
Je m'endormis avec l'image de Julien près de moi et ses beaux yeux bleus qui berçaient ma nuit. Bastien fit même son apparition sur le monstre dragon-chien de L'histoire sans fin. Mon imagination n'avait pas de limites.
. . .
Ce matin-là en ouvrant les yeux j'eu un bref aperçu de ma matinée de la veille. Je pensai alors que Julien, peut-être, serait entreprenant avec moi. Comme la veille. Et peut-être qu'on se rapprocherait.
. . .
Dans la cour, alors que j'attendais dans le froid glacial, les lèvres gercées et le visage enrubanné dans une écharpe en laine, quelqu'un m'attira à lui. Je sentis des mains se refermer autour de ma taille tel un étau et m'approcher du corps de l'inconnu. J'aurais pu m'inquiéter mais je savais qui s'était. Je me retournais alors pour faire face à :
" _ Bastien !
_ Ouah ! Si j'avais su que c'était le meilleur moyen pour que tu sois aussi enthousiaste le matin ça fait longtemps que je j'aurais fait ça.
_ Arrête tes bêtises. L'heure est grave." lâchai-je avec un visage sinistre.
Il sembla s'inquiéter sincèrement. Ses sourcils se dressèrent et la commissure de ses lèvres s'affaissa.
« _ Qu'est-ce qu'il y a ?
_ Tu ne m'as pas dit mon surnom ! »
Il sembla en colère un instant, se retourna, fit trois pas et se replaça face à moi. Mais plus près.
« _ T'es complètement malade j'ai cru que t'allais me dire que t'avais un cancer !
_ Ah non !
_ Ne refais plus jamais ça. »
Son regard était éteint mais il s'efforçait de sourire. Il me fit de la peine. J'avais dû lui faire vraiment peur avec mon manque de retenu face à son câlin et mes paroles déprimantes.
« Ok ? »
Il plaqua ses paumes brûlantes (sans gant) sur mes joues et ferma ses doigts le long de mes mâchoires. Bastien me fixa intensément et je fus tout d'un coup perdue dans la profondeur de son regard, incapable de formuler une phrase. Ni un mot.
« Juliette ! Ok ? »
Il resserra son étreinte et je cru bien qu'il allait m'étrangler. Il était en phase de le faire, indépendamment de sa volonté. Ceci me réveilla.
Je plaçai mes mains gantées sur les siennes pour les retirer.
« C'est promis. »
Il souffla et sourit à nouveau, l'étincelle de son regard réapparu tout à coup.
« _ Sauf que tu ne m'as toujours pas dit mon surnom ! Non ! Ne me dis pas que t'as pas cherché ?
_ Si si j'ai cherché.
_ Oui mais le plus important : t'as trouvé ?
_ J'ai une idée.
_ Je t'écoute.
_Ok alors qu'est que tu dis de... Clementine girl ? »
Je cru que j'allais m'étouffer tant je riais.
« _ T'es sérieux ? Pour de vrai ?
_ Quoi t'aimes pas ?
_ Bah... disons que là c'est un euphémisme... On dirait un nom de super-héros, mais nul... le superhéros, hein pas le nom... enfin le nom aussi... »
Son sourire se fana et je me rendis compte que j'avais peut-être exagéré.
« _ Enfin c'est cool mais... C'est pas trop... moi. Mais si un jour je deviens super-héros je te jure je prends ce nom !
_ Pas la peine. Il est moche, hein ?
_ Atroce. Mais c'est pas grave ! T'as autre chose. (il ne répondit rien) T'as bien d'autres idées, rassure-moi.
_ Bah... je pensais que t'aimerais.
_ C'est pas possible d'aimer un surnom pareil ! criai-je.
_ Non mais t'es sérieuse? T'es en colère en plus! gueula-t-il
_ Non mais ça me saoule tu fais aucun effort.
_ Excuse moi, princesse." lâcha-t-il dans un sarcasme mauvais.
Puis son regard s'agrandit et il sourit.
« _ Il y a un problème ? T'es drogué ? Tu vas faire un malaise ?
_ Princesse ! Mais oui c'est ça !
_ Pardon ?
_ C'est super comme surnom !
_ Non ça me fait passer pour une mégère.
_ Mais nan ! C'est gentil, c'est mignon, c'est un peu arrogant mais c'est classe et distingué... c'est toi quoi !
_ Mais... On dirait que je suis esclavagiste quand tu me dis ça.
_ Mais non ! Ca évoque même les princesses Disney tu devrais être contente !
_ Eh, j'ai pas huit ans !
_ Ca dépend des jours.
_ N'importe quoi !
_ Alors ? On garde, Princesse ?
_ Bon... on garde. »
Il avait l'air tellement emballé que je ne pouvais rien lui refuser. De plus, j'aimais bien. C'était pas mal. Je souris à mon tour.
« _ Malgré le fait que tu n'aies pas voulu que je t'en trouve un j'ai cherché quand même...
_ Non t'as pas fait ça ?
_ Et si !
_ Juliette ! J'avais dit non !
_ Alors tu ne veux pas l'entendre ?
_ Non ! »
Je m'approchai de lui avec un sourire malicieux.
« Tu en es sûr ? Je suis persuadée que tu vas adorer. »
Il soupira puis hocha la tête :
« _ Vas-y...
_ Alors le surnom que j'ai trouvé, tellement beau tellement original et tellement classe est : Baba.
_ T'es pas sérieuse ?
_ Oh que si ! Je vais même déposer la marque !
_ Mais c'est atroce !
_ Je trouve pas, Baba.
_ C''est le nom d'un gâteau pas bon et ça aurait pu être le surnom d'un éléphant de dessin animé !
_ Qui ?
_ Babar !
_ Ah ouais ! Moi j'aime bien.
_ C'est impossible. Tu ne m'appelles pas comme ça !
_ Ok ok c'est bon, je le ferai pas. »
Je m'avançais vers lui.
« Câlin ? »
Il acquiesça et j'approchai mon visage de son oreille jusqu'à lui chuchoter lentement :
« Moi j'aime bien, Baba. »
. . .
Ce matin-là nous commençâmes par sport. Gym. Je haïssais la gym. Toutes les disciplines qui nécessitaient de la souplesse, de la grâce ou simplement le fait d'être douée ne me convenaient pas. Voilà pourquoi je réussissais à avoir 17 en rugby et 11 en danse ou acrosport.
Alors que je me débattais avec mes pieds et mes bras, je voyais Laura se tordre dans tous les sens et lever sa jambe jusqu'à la tenir près de sa tête. Elle avait dû être construite en kit. Avec un peu de chance elle venait d'Ikea et s'effondrerait bientôt. En tout cas, la pouffe se vantait de savoir faire le grand écart et patati et patata. Moi je savais écrire des textes en latin, lire le grec et résoudre des problèmes mathématiques complexes. Pourtant est-ce-que je me baladais avec ma calculette en main pour le montrer à tout le monde ? Non !
Cette pouffiasse se tordait à moitié sans grande difficulté mais lorsqu'elle se penchait en avant, sa poitrine l'emportait et elle tombait presque. Voilà le seul et unique avantage des petits seins!
Le prof étant partie soigner Louis qui avait, je ne sais trop comment, réussi à se cogner la tête, les gens étaient éparpillés dans la salle, tous affalés sur le sol comme des chenilles en phase de devenir chrysalide. Certains se trainaient même les uns les autres ou s'amusaient à se porter jusqu'à se lâcher et se faire mal. Quels blaireaux ! J'étais à côté de Camille, Alice et Julien.
Il n'avait opéré aucun changement quant à son attitude envers moi. Bon... au moins il me parlait.
Tout à coup il s'approcha de moi pour me dire : « J'ai quand même dû te supporter hier. Mais bon, tu me faisais de la peine et les gens se moquaient de toi alors je me suis dit que je faisais une bonne action."
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Coucou!!!!
Et la vous vous dites: ah bah non Julien reste Julien.
Pas cool....
A votre avis, comment Juliette va-t-elle réagir face aux paroles de Julien?
Sinon dites ce que vous pensez de tout ce qui vous plaît et de ce qui vous plaît pas! C'est avec plaisir que je vous répondrai. Votez aussi si vous aimer svp.
Voili voilou
Gros bisous à tous!!! 😊

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