« Croyez-vous au destin, faucheurs ? Croyez-vous en sa main sans pitié, sans cœur ?
Croyez-vous aux prophéties ? Croyez-vous ne pas être maudits ?
Prenez-garde à lui. Vous craignez la Lune, vous craignez la Mort... Mais de tous les dieux, le destin est le plus cruel.
Et un jour sa cruauté s'abattra sur vous. »Dernières paroles d'une sorcière condamnée au bûcher,
An 104. Annales de procès, deuxième siècle.
*
Certains murmuraient que la mort changeait. D'autres qu'elle figeait à jamais dans le temps. En cet instant, Valentin était plutôt enclin à confirmer la seconde position. Son père n'avait absolument pas changé. Toujours le même regard glacé, toujours le même pli sévère, toujours cette barbe poivre et sel... Et toujours le même timbre de voix, en éternelle maîtrise de soi alors qu'il demandait :
« Si tu es ici, je suppose que c'est parce que tu sais tout.
Reffrenant tous les sentiments qu'il pouvait ressentir à cette retrouvaille, le nouveau Patron se redressa légèrement, bombant le poitrail pour ne pas perdre la face, et rétorqua :
— Presque tout, sinon, je ne me tiendrais pas devant toi.
Chose inouïe mais vraie : Amadeus esquissa un petit rictus, comme si la réponse de son fils l'avait amusé. Mais ce sourire en coin se volatilisa aussi vite qu'il n'était apparu. S'avançant d'un pas, il fronça des sourcils. Son regard de lynx scruta quelques instants le jeune homme avant qu'il n'interroge, un peu sèchement :
— Tu as revu ta mère ?
— Elle m'est apparue en rêve, acquiesça Valentin, sur la réserve.
— De quel côté était-elle dans cette guerre ?
— Elle n'a toujours été que d'un côté, père : le mien.
Aussitôt finit-il de prononcer sa phrase qu'il écarquilla les yeux, en se rendant compte des sous-entendus qui planaient dans ses mots. Venait-il véritablement de lui reprocher la mort de sa mère ? Il ne l'avait même pas voulu. Il n'en avait jamais tenu rigueur à son père tant il comprenait son geste. Ce dernier sembla accuser le coup douloureusement. Le ton lugubre, il protesta, un éclair traversant ses iris bleus :
— C'était une sorcière. J'avais beau l'aimer, je n'ai pas eu le choix.
— Tout comme tu aimais et as tué ton propre père !
— Si je n'étais pas mort, tu aurais dû le faire toi aussi.
Il avait raison. Et bien malgré lui, Valentin éprouvait un certain soulagement quant au fait que la sirène d'Erik l'ait devancé dans sa tâche. Un soulagement coupable mais il ne pouvait pas nier le ressentir. Pourtant, là encore, le faucheur ne pouvait pas s'imaginer une seule seconde accomplir un tel geste. Presque dans un murmure, il s'enquit, cherchant réellement à comprendre, loin de toute accusation :
— Mais comment as-tu pu seulement y parvenir ?
Une ombre voila le regard du défunt patron. Son fils recula, surpris. Cette ombre ressemblait à du chagrin. À du regret. Et c'était bien la première fois de sa vie qu'il voyait Amadeus éprouver des remords. Son parricide avait dû être un geste profondément douloureux à exécuter. Le jeune homme éprouva presque instantanément une fugace peine à l'idée de remuer ainsi le couteau dans la plaie. Qu'importe leur dissonance, il n'aimait pas voir ce semblant de souffrance. Son père ouvrit la bouche, prêt à répondre, mais n'en eu pas le temps. Une nouvelle voix grave s'éleva, tranchant le silence :
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Les faucheurs IV - Funeste Destin
Paranormal- Ceci est le quatrième et dernier tome de la saga des Faucheurs. Il est très fortement conseillé d'avoir lu les trois tomes précédents pour comprendre l'intrigue et éviter les spoils - La guerre entre la Mort et la Lune se poursuit, et faucheurs e...