Le lendemain, Hana quitta la maison de bonne heure. Tout le monde était encore endormi, le soleil commençait tout juste à se lever. Elle avait laissé un mot sur la porte d'entrée, à la vue de tous. « Merci beaucoup pour la fête ! Désolée de partir si tôt. Je vous embrasse, Hana. »
La lumière matinale l'éblouit. Sur la route, les cerisiers fleurissaient, le gazon était jonché de pâquerettes et les jardins se teintaient d'un vert encore jeune. Ce paysage lui aurait habituellement donné le sourire, mais ce matin-là, Hana se sentait minable. Tout le monde savait fleurir ; la nature répondait à l'appel du printemps, ses amis semblaient tous si épanouis, mais elle, elle était perdue.
Elle avançait sur le goudron de la route, accrochant nerveusement ses mains aux bretelles de son sac à dos. Elle qui avait si peur d'être seule, elle se retrouvait à marcher dans un quartier qu'elle ne connaissait pas, sans aucun compagnon. Cela l'apeurait mais elle ne se sentait pas capable de rester à la fête et jouer à nouveau la comédie. Elle ne voulait plus tromper personne, ni ses amis ni elle-même. Alors elle marchait seule, sans guide. Elle ne savait pas où aller. Elle n'avait pas envie de rentrer chez elle. Pas là, pas tout de suite.
Comme instinctivement attirée par les effluves du printemps, Hana suivit les arbres en fleurs et se retrouva dans un parc qu'elle ne connaissait pas. À cette heure-là, il n'y avait encore personne. L'endroit était paisible sous les clairs rayons filtrés par les arbres. Hana marcha sur l'herbe, mouillant ses bottines de rosée, et s'assit sur un banc en face d'une aire de jeu. Elle entendait les oiseaux siffloter et le vent souffler, sans la moindre voiture, sans une seule voix s'élevant au-dessus du reste, comme si elle était seule au monde. L'idée était effrayante et en même temps, Hana ne s'était jamais sentie aussi libre.
Là, posée sur son banc, la jeune fille ferma ses paupières et se laissa porter par la brise, comme attendant que les nuages de ses iris se dissipent.