Chapitre 9: le petit-déjeuner

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Je me réveille en pleure, ce qui contraste fortement avec mon attitude immobile de la veille.  La lumière s'allume et quelqu'un se précipite dans la chambre. La porte s'ouvre à la volée. Je suis totalement alerte quand je vois Emily fondre sur moi afin de me prendre dans ses bras. Je me laisse faire, sans protester.

Mes pleurs redoublent alors d'intensité  car ça fait depuis longtemps que je ne m'étais pas permise de baisser ma garde avec quelqu'un et j'ai l'impression qu'on m'enlève un poids des épaules, que je ne suis plus seule au monde. Emily, maternante, me réconforte. "Merci" dis-je entre deux sanglots.

"Tu es de la famille maintenant Sarah, rien ne pourra jamais changer ça et je suis désolée qu'à cause de ma négligence tu te sois perdue"... Je reconnais bien là Emily, endosser tous les tords, même ceux qui ne sont pas les siens.

"Tu n'as rien fais de mal Emily, c'était irresponsable de ma part de partir sans téléphone." Je me blâme, mais au fond je ne peux pas m'empêcher d'en vouloir à Leah. Je garde mes reproches pour moi, car je crois qu'Emily ignore que j'étais avec sa cousine et au vue du dégoût de cette dernière pour la maison, je suis sûre qu'elles ne sont pas proches.

"Emily, qu'est-ce qui t'es arrivée au visage?"dis-je tout à trac. Tu crois que c'est le moment d'avoir cette discussion? me reproche la voix.

"Tu en as mis du temps pour me poser la question" répond-elle dans un rire nerveux. "Un ours m'a attaqué en forêt".

Je l'observe parler. Ses lèvres sont pincées et ses sourcils sont tirés vers le haut. Signe qu'elle  ment. Pourquoi me cache-t-elle la vérité?

"Je suis désolée" murmuré-je.

"Bon c'est pas tout ça mais tu dois être affamée" dit-elle, pressée de clore cette discussion.

"C'est vrai que je commence à avoir faim". Comme pour acquiescer, mon ventre se met à gargouiller fortement. La honte. Je sors prudemment de mon lit et encore un peu chancelante, je suis Emily dans la pièce principale.

"Bonjour, Sarah, content de te voir sur pieds, j'espère que tu as faim, j'ai fais à manger". Dit Sam chaleureusement. Pour mon frère, qui ne jure que par la la viande, mettre des fruits et du pain complet sur la table, c'est une attention plus que délicate. Ça me touche beaucoup et les larmes commencent à me monter aux yeux. C'est fini la fontaine?  Rouspète la voix. Sam s'en aperçoit mais ne dit rien. Il reste debout, un peu gêné, ne sachant pas trop ou se mettre. Les adolescentes émotives ça n'a pas l'air d'être sa tasse de thé. . Je me ressaisi rapidement.

Je m'attable donc avec eux. La bonne odeur de café me chatouille les narines. Je parcours machinalement la pièce des yeux, quand je retiens un hoquet de stupeur.

Paul est en train de dormir sur les canapé! Il est là, l'air calme, apaisé, la respiration régulière, beau comme un dieu.

Sam  explique "c'est Paul qui t'a trouvé hier, il t'a donc ramené ici, il était crevé de t'avoir porté  et s'est endormi comme une masse sur le canapé".

Ben dit donc, il est drôlement fort! Je sais que c'est lui qui m'a porté secours car j'ai reconnu sa voix. Mais de là à m'amener jusqu'à la maison... Sam émet un raclement de gorge gêné devant mon regard suspicieux.

La honte m'envahit en repensant à hier. Pour qui je passe devant Paul? Me perdre comme une gamine, sur un sentier côtier et réagir en drama queen, en m'évanouissant sur le sol! J'aurai pu faire comme tout le monde, m'asseoir calmement et attendre qu'on vienne me chercher. Mais non, il a fallu que je fasse une crise d'angoisse, ben voyons!

Vu et revu [Paul Lahote]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant