Chapitre 17 sauvé par le gong

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"Il n'y avait pas que ma mère" dis-je difficilement. Un mélange d'émotions se reflète dans les yeux de Paul, mais c'est l'angoisse qui domine. Il attend patiemment la suite de mon récit. Je pousse un grand soupir pour me donner du courage.

"Notre mère a ramené un petit ami à la maison, je devais avoir onze ans... C'est lui qui m'a fait le plus de mal". dis-je sans le regarder dans les yeux par crainte de ce que je pourrai y voir.

Il se tait pendant de longues secondes qui me paraissent une éternité. Puis, il demande "Où est-il aujourd'hui?" sa voix est douce mais il est tendu et bouge nerveusement. Il est indubitablement en colère.

"Il est en détention provisoire, en attendant son jugement" dis-je faussement détachée. Rien que la pensée de ce monstre me donne envie de vomir.

"Pour quel motif?" demande Paul à voix basse. Il a arrêté de bouger. Il est maintenant statique, figé, ce qui ne me rassure pas pour autant. Il me fait penser à un félin prêt à bondir sur sa proie.

"Violence ayant entrainé une longue incapacité, exploitation sexuelle, viol, avec comme facteur aggravant le fait que tout ça soit sur mineurs..."dis-je dans un murmure.

Il reste des motifs d'inculpation mais je suis dans l'incapacité de continuer cette discussion.  Mon dieu, j'ai -presque- tout raconté à quelqu'un. Qui plus est, à l'homme de mes rêves. Je dois être folle, il va partir en courant, c'est sûr.

Contrairement à son habitude, la petite voix dans ma tête se tait. Tout comme Paul. Je retrouve le courage de parler. "Le mineur en question, c'est moi...."ajouté-je souhaitant disparaitre.

Paul se lève d'un bond.

"Je suis désolé, je ne peux pas... je dois te laisser, je suis désolé..." dit-il en proie à une forte agitation. Quand il quitte la pièce, ses membres tremblent tellement qu'il en devient flou. Je dois être sous le choc car j'ai l'impression qu'il bouge anormalement, comme si il n'était pas humain.

C'est sans doute à cause de la nausée qu'il tremble autant. Il doit être dégouté au plus haut point, se demandant comment  j'ai osé le toucher de mes doigts sales. Et il a raison. Jamais je n'aurais dû croire que quelqu'un comme lui puisse un jour s'intéresser à quelqu'un comme moi.

Me revient en mémoire une phrase que ma mère avait l'habitude de me répéter "avec ton physique, tu ne vas attirer que les mauvais garçons, qui voudront profiter de toi. Les bons, eux, vont te fuir, dégoûtés de voir à quel point tu es salis". Elle avait raison.

Je m'allonge sur le canapé en pleurant toutes les larmes de mon corps, brisée par le rejet de l'homme que j'aime.

On sonne à la porte et j'espère qu'il est revenu. Mais à la place c'est Jacob, Embry et Quil qui se tiennent dans l'entrée. Il n'ont pas l'air choqué de voir ma tête pourtant bien marquée par les larmes.

Sans réfléchir, Jacob m'enlace. Moi qui n'aime pas les contacts physiques, je dois dire que ça me fait du bien, d'être étreinte par un ami.

"Je suis désolée" balbutie-je.

"Tu n'as pas a t'excuser" dit Quil en me prenant délicatement par le bras pour me diriger vers le canapé. Il s'assoit à côté de moi pendant qu'Embry m'apporte un verre d'eau.

"Ça va mieux?" demande Jacob doucement.

"Oui" répondis-je dans un murmure. 

"On a appris ta discussion avec Paul, il est bouleversé et il s'en veut beaucoup d'être parti comme ça... il nous a demandé de venir voir comment tu allais." dit Embry en s'adressant à moi comme on parle à quelqu'un en état de choc.

"Pour... pourquoi n'est-il pas... pas là pour... pour me le dire en face?" Demandé-je entre deux sanglots.

Les trois amis s'échangent un regard gêné.

"Il y a une bonne raison", dit Jacob en se raclant la gorge.

"Oui et crois-moi il fait tout ce qui est en son pouvoir pour revenir le plus rapidement près de toi" complète Quil.

"Parfois, il ne gère pas très bien ses émotions, surtout quand elles sont trop fortes. Ils n'arrive pas à se calmer et il ne veut pas que tu le vois dans cet état." Ajoute Embry.

"Dans quel état?" demandé-je agacée par tous ces mystères.

Quil ouvre la bouche pour répondre, très mal à l'aise mais ne termine pas sa phrase car le téléphone fixe de la maison sonne. Il pousse un soupir de soulagement.

"Résidence Uley j'écoute?" répond Jacob qui a décroché, sans gêne. Il est visiblement ravi d'avoir pu échapper à la discussion. "Ah Sam, c'est toi, oui... oui... je vais lui dire". Son visage s'illumine au fur et à mesure de l'appel et je suis très frustrée de ne pas entendre ce qui se dit. Il raccroche, un sourire satisfait sur les lèvres.

"C'était Sam et Emily...  Mila a obtenu sa conditionnelle! Ils passent te chercher pour que vous puissiez l'accueillir à sa sortie" dit-il joyeusement.

Mon cœur fait un petit peu abstraction de la peine que je ressens pour Paul et la remplace par la joie de retrouver ma sœur . Elle m'a tellement manquée. Nous sommes très fusionnelles elle et moi. En même temps, nous avons vécu tant de choses ensemble, alors, comment pourrait-il en être autrement?

"Je dois préparer mes affaires" dis-je excitée par l'annonce.

"Dire que le repas préparé par Sam hier soir ne sera pas mangé, quel gâchis!" se lamente Jacob, feignant la tristesse.

"Servez-vous" répondis-je avant de me précipiter dans ma chambre.

Je suis occupée à chercher  mes écouteurs quand j'entends frapper à la porte. Il s'agit sûrement de Quil qui va me demander où se trouve la clé du cadenas qu'Emily à mis sur le placard à gâteaux.

J'ouvre la porte et à ma grande surprise, Paul se tient devant moi. Il a le regard meurtri et mon cœur s'emballe douloureusement.

"Je suis désolé Sarah, j'ai essayé de me contrôler, de ne pas perdre pieds... Mais j'ai été faible, un vrai lâche et je m'excuse." dit-il la voix tremblante sous le coup de l'émotion.

Je ne comprends pas tout ce qu'il me raconte mais ce que je sais, c'est que j'ai terriblement besoin de lui dans ma vie.

"Ce n'est rien Paul, j'ai eu une bonne nouvelle entre-temps".  Ça me coûte quand même de lui dire ça. Je suis toujours blessée par son attitude et j'aimerai des explications de sa part. A la place, je fais comme si de rien n'était et j'ajoute "Nous allons chercher Mila avec Sam et Emily".

"Je suis heureux pour toi" dit Paul dans un sourire forcé. Visiblement il s'en veut toujours.

 On klaxonne dans l'entrée, sûrement mon frère et sa fiancée. Paul comprend que je suis pressée et s'en va rapidement. Je monte en vitesse dans la voiture impatiente de ramener Mila chez elle, là où est sa place. Je rigole d'avance  en imaginant sa réaction devant tous ces jeunes hommes baraqués, à moitié nu. Elle n'a pas sa langue dans sa poche, on risque de bien s'amuser. J'espère qu'elle ne jettera pas son dévolu sur Paul, car il est de loin le plus sexy et le plus beau des Quileutes.Tiens, la voix n'intervient pas. Serait-elle partie pour de bon, en même temps que mon lourd secret?






Vu et revu [Paul Lahote]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant