8 : départ

94 15 10
                                    

La pluie commence à tomber la semaine suivante.

-On va chez ma sœur, le week-end prochain, pour les préparatifs du mariage.

Héctor pose le livre qu'il est en train de lire, et Valentin découvre son visage avec un sourcil haussé.

-On ?

Valentin hausse les épaules, à présent hésitant. Lui qui était si sûr de lui à soudainement l'impression d'avoir dit une bêtise.

-Bah... ta saison de football sera terminée, et comme tu es venu la dernière fois...

-Mais... en quoi je vais être utile pour les préparatifs, moi ? Mon avis n'est absolument pas pertinent étant donné que ce n'est pas mon mariage et que je ne serai même pas là.

Le visage de Valentin se décompose à l'entente de ces mots.

-Val, je croyais qu'on avait déjà clarifié ça. Je ne peux pas venir à ce mariage.

-Même après les avoir rencontrés ?

Héctor secoue la tête.

-Même après les avoir rencontrés. C'était ça, pour toi, cette rencontre ? Une manière de les humaniser pour moi, pour que je change d'avis ?

-Non, répond Valentin.

-Je les ai rencontrés justement pour te prouver que je pouvais faire des concessions. Que je suis sérieux avec toi. Je suis amoureux de toi, Valentin, vraiment, mais ça ne change rien.

-Donc rencontrer ma famille, c'est faire des concessions, répète Valentin, et Héctor lève les yeux au ciel.

-Ne sors pas les choses hors de leur contexte. Tu sais très bien que ma carrière...

-Qu'est-ce qui va t'arriver ? Si t'es vu avec moi ? Dis-moi, Héctor, qu'est-ce qui va t'arriver ?

Héctor le dévisage, surpris par cet air de défi.

-Tu n'attends que ça. Que je sois pris sur le fait. Parce que tu t'imagines le pire, moi viré, devenu la risée du pays, et tu t'imagines qu'après ça je n'aurais plus aucune raison de cacher la vérité au monde entier et qu'on pourra vivre cet amour non plus caché, mais révélé au grand jour. Quand j'ai accepté de rencontrer ta famille, je savais que ça finirait par arriver : tu allais forcément me demander plus. C'est pas ta faute, on veut toujours plus que ce qu'on a. Mais je ne peux pas venir à ce mariage, Valentin. Je te l'ai dit dès le début, je ne peux pas être vu avec un homme. Et si tu ne peux pas l'accepter, je préfère te libérer que de te rendre malheureux.

Valentin ne réfléchit plus correctement, tout est flou dans son esprit. Il ne sait plus qui a tort et qui a raison, il ne sait plus si Héctor est méchant ou si c'est lui qui exige trop de choses.

Valentin n'y comprend rien, tout ce qu'il sait, c'est qu'il est triste. Alors Valentin hoche la tête.

-Merci.

Héctor met son marque-page dans son livre et le ferme. Puis il se lève du lit et récupère son pull qui était posé sur le bureau. Il sort de la chambre, et Valentin ne le suit pas. Il est triste. Il entend Héctor qui récupère ses affaires, peut-être même qu'il lui vole deux trois petites choses qui lui plaisent. Et il l'entend partir en fermant la porte.

Et la tristesse de Valentin se mêle à la colère. La colère de voir que l'Espagnol ne se bat même pas pour lui, ne fait rien pour essayer de le retenir. La colère de le voir partir aussi simplement, en prenant son temps comme si ça suffisait à Valentin pour remettre ses idées en question. La colère de l'entendre fermer délicatement la porte et non pas la claquer, comme s'il était déjà en paix avec cette décision qui n'est même pas sienne.

Valentin se met à pleurer à la fois de tristesse et de colère. Valentin se met à pleurer d'amour, aussi, parce qu'il est amoureux de Héctor. Valentin se met à pleurer car il est fatigué de passer au second plan, fatigué de devoir faire attention à ce qu'il dit et ce qu'il fait pour protéger ce secret. Valentin pleure parce que le fait d'aimer quelqu'un ne devrait jamais avoir à être un secret.

La pluie est tombée, et quand il se met à pleuvoir pour de vrai dehors, Valentin se roule en boule dans la couverture de son lit et continue de pleurer.

Caché » BELLERÍN ✓ #WrittenWithPrideOù les histoires vivent. Découvrez maintenant