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3 : discussion

Quand Valentin se réveille, le lendemain matin, il a vingt-et-un messages de Héctor. Il décide de les ignorer pour aller se préparer. Il n'a pas envie de boire de café, il n'a pas envie de manger quoi que ce soit, alors il se prépare et prend la direction de son bureau le ventre vide, et sans prendre son thermos.

La veille, il était bien trop déçu pour se soucier de son téléphone : à peine les pieds mis dans sa voiture pour prendre la direction de son appartement, le téléphone a été mis en silencieux. De toute manière, Héctor ne lui téléphonait jamais sans avoir son accord préalable, tout comme cela fonctionnait aussi dans l'autre sens, au cas où Héctor serait accompagné. Il ne voulait pas voir ses messages, pas voir ses excuses. Il n'était pas en colère, de toute façon ; il avait simplement besoin de temps pour encaisser la bonne nouvelle de Scarlett, gâchée par la mauvaise de Héctor.

Une fois devant sa tablette graphique, impossible de se concentrer. Les vingt-et-un messages qui l'attendaient sagement dans son téléphone ne veulent pas quitter son esprit. Valentin soupire et sort son téléphone.

La moitié des messages sont des messages pour lui demander l'autorisation de l'appeler. Un quart sont des messages composés uniquement de déclarations d'amour diverses et variées. Le dernier quart représente les derniers messages dans lesquels il lui dit qu'il peut prendre son temps pour répondre, qu'il ne va nulle part et qu'il lui souhaite une bonne nuit et de beaux rêves.

Valentin range son téléphone. Il ne veut pas répondre sur le moment, il a besoin de temps pour réfléchir à ses mots.

À midi quarante, avant d'aller prendre sa pause déjeuner, il envoie un message à Héctor.

Valentin
On peut se voir ce soir ?

La réponse arrive moins d'une minute après l'envoi.

Heccy❤️
Bonjour, j'espère que tu as passé une super nuit et une super matinée ❤️
Bien sûr, pour ce soir. Quelle heure ? Chez toi ?

Valentin
Je pars du bureau à 17h30.

Heccy❤️
Je t'attends chez toi ?

Valentin
À ce soir.

Toute la journée, Valentin est distrait. Ses pensées sont embrumées, il ne sait pas s'il est en colère contre Héctor, en colère contre lui, s'il comprend Héctor ou s'il se comprend lui. Tout est flou, un brouillard épais l'empêche d'y voir clair dans ses retranchements.

Lorsqu'il ouvre la porte de son appartement, à 17h49 très précisément, Valentin n'a toujours pas démêlé les nœuds de son esprit. Il trouve Héctor sur son téléphone, assis sur le canapé. Dès que celui-ci voit Valentin, il abandonne son cellulaire.

-Salut, souffle-t-il, et Valentin ne sait pas pourquoi, mais il hoche la tête.

-Salut, répond-il au bout de plusieurs secondes, réalisant que sa réaction n'était pas forcément la plus attendue ni la plus répandue après une salutation.

Il s'assied sur le canapé, laissant une distance entre Héctor et lui, comme pour signifier que tout n'est pas oublié, au contraire.

-Est-ce que tu es fâché ? demande l'Espagnol en jouant avec ses mains, et Valentin secoue immédiatement la tête.

-Déçu.

-Tu le savais. Ça a toujours été comme ça.

Valentin soupire, et Héctor plonge ses yeux dans les siens.

-Je ne te l'ai jamais caché. Dès le début, je t'ai mis au courant. Je ne peux pas être vu avec un homme.

Valentin sait que Héctor a raison. Mais il n'avait jamais vraiment pris conscience d'à quel point c'était un problème. Ne pas être convié aux fêtes du club était une chose. Ne pas pouvoir amener Héctor pour un repas chez ses parents était une autre chose.

Mais il n'avait jamais pensé aux événements d'une plus grande ampleur. Il n'avait jamais pris conscience que ne pas être vus ensemble allait devenir de plus en plus lourd à vivre.

-Donc tu ne rencontreras jamais ma famille ? Tu ne viendras pas aux mariages, aux anniversaires ?

-C'est pas pour toujours, se défend Héctor, mais Valentin secoue la tête, comme s'il n'en croyait pas un mot.

-Ah ? Jusqu'à quand, alors ? Parce qu'il me semble que tu ne peux pas être vu avec moi par rapport à ta carrière, et que, je touche du bois pour toi, déclare Valentin en touchant sa tête, elle ne va pas s'arrêter demain.

Héctor se mord la lèvre, et Valentin s'en veut de faire son rabat-joie. Ce n'est pas la faute de Héctor. Il n'a pas choisi cette situation.

Mais tout à coup, Valentin prend vraiment conscience qu'il n'est pas la priorité de Héctor.

-Je peux rencontrer ta famille, dit ce dernier, et les yeux de Valentin s'ouvrent, devenant ronds comme des billes. Je peux les rencontrer, je veux les rencontrer. Tu as raison, on ne va pas attendre ma retraite pour rencontrer nos familles à l'un et à l'autre. Mais pas au mariage. Quelque chose de plus intime.

Un sourire prend place sur le visage de Valentin, et le même mécanisme apparaît sur le visage de Héctor.

-C'est vrai ? Tu veux rencontrer ma famille ?

-Oui, répond Héctor, et pour toute réponse, Valentin comble l'espace qui les séparait en se jetant dans les bras de son amoureux.

Il n'est plus déçu, il est heureux.

Heureux de pouvoir enfin présenter l'amour de sa vie à sa famille.