6. Un peu de peroxyde d'hydrogène

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"Journal de bord : dix-huitième jour. Je perds la notion du temps…" raconta Harold, adossé contre le mur, l'un des côtés de leur valise.

Ils avaient terminé leur puzzle à mille pièce et mangé le dernier biscuit aux noix… quand on commence à parler aux murs, c'est forcément qu'il y a un problème.

"Ça. Sem-be-le. É-vi-dent." répondit Cecil en pianotant sur son clavier vocal. "Ça. Fait. Pas. Si-i-i-i-i-i-i-i-i-i… Lon-tant."

"T'as un beug sur ton i !"

"Non. Je. Fais. Du. Sa-re-ca-se-me. Ha-ha-ha."

Harold et Cecil auraient dû passer quelques heures dans la valise, juste le temps de passer les douanes. Red leur avait promis de les sortir pendant la journée et qu'ils pourraient profiter de l'air conditionné de la chambre d'hôtel tant qu'ils ne se baladaient pas sans elle. Elle avait prévu quelques journées vides d'intérêt pour eux, le temps que les trois autres s'emballent et finissent par oublier leur chagrin.

"J'en ai marre ! Je suis sûr qu'elle nous a oublié…"

"Ce-la. Me. Sem-be-le. É-vi-dent. She-re-lo-cke." se moqua Cecil.

"T'as une idée pour nous sortir de là ?"

"J'ai. Eu. Le. Temps. D'y. Ré-fe-lé-chi-re."

"Ré… Fe… quoi ?"

Cecil le foudroya des sourcils, froncés au-dessus de ses lunettes noires qui cachaient ses yeux aussi blancs que ses cheveux. Harold réalisa qu'il ressemblerait presque à Praesepe et que lui... lui serait Logium, dans ce cas. Gloups.

"Ré-fe-lé-chi-re !" répéta-t-il mais Harold n'eut aucune réaction. "Pen-ser ?"

"Aaah ! Réfléchir ?! D'accord… ouais bah utilise plutôt un autre mot. Pourquoi tu t'obstine à chercher un vocabulaire soutenu et tellement complexe ?"

"Tu. Sais. Quoi ? Je. Vais. Te. Lai-sser. Co-gi-ter. Se-le."

Il y avait plusieurs alternatives pour déverrouiller la valise de l'intérieur, faire basculer le circuit caméléon qui les protégeait et faire péter la fermeture moderne, dernier obstacle jusqu'à la liberté. Harold était spécialisé en runes et potions : il aurait pu invoquer un passage, infiltrer un produit de dissolution ou sa spécialité : tout faire péter. Cecil lui, était spécialisé dans les magies de l'esprit… ça ne servait à rien dans cette situation mais il avait aussi une baguette magique (neuve) et un womatou (moins neuf). Tout le monde sait qu'un womatou, c'est un énorme atout !

"Ha-se-ta. La-vi-se-ta… Ba-i-Be !"

Il y eut un rugissement, une exposition et… Harold n'eut pas le temps de comprendre ce qui venait de se passer que Cecil était déjà parti. Il avait refermé la valise derrière lui, évidemment.

"ESPÈCE DE POULPE AÉRIEN SANS COEUR !" hurla Harold, furieux avant de rajouter : "Je suis qu'un crétin."

Il n'aurait jamais dû se moquer de son frère, Cecil avait encore du mal à gérer certains mots mais il avait créé son clavier tout seul. Et lui, qu'avait-il fait, pendant l'année ? Il n'avait qu'appris quelques potions et des bouquins entiers d'études runiques… déjà pas mal mais rien d'extraordinaire.

"Volt ? Il est temps de sortir ! Viens ici, mon petit dragon."

Il attendit quelques secondes. Rien.

"Volt ? Vooolt ? Fichu dragon !"

De toutes évidences, son petit lézard volant s'était fait la malle quand Cecil avait ouvert la valise... sans mauvais jeu de mot. Enfin si, ce jeu de mot est mauvais. Très mauvais mais un peu drôle, sous un certain angle.

"D'accord, il est temps de montrer ce que je sais faire puisqu'on m'a abandonné ici."

Du feu, des flammes et des explosions… mouhaha. Ahem, sans doute devrait-il réfréner ses pulsions ? Cette valise était vraiment tout confort mais y'avait pas de quoi évacuer ni la fumée ni les flammes et il ne souhaitait pas finir en barbecue.

"Harry ne serait pas content mais une mousse corrosive me semble être un meilleur choix…" marmona-t-il. "Un peu de peroxyde d'hydrogène mélangé avec cette horrible potion qui effraie même le Professeur Rogue : du savon."

Cecil n'était pas là pour rire à sa blague et Harold regretta le fameux "Ha. Ha. Ha." tellement mécanique qu'il pouvait transformer un véritable fou rire en sarcasme amer.

"On rajoute un p'tit catalyseur et de la potion acide !"

La mousse gonfla jusqu'à la fermeture éclair de la valise et sa potion corrosive à base d'yeux de tritons (il avait amélioré trois fois la recette originelle) mis quelques secondes à ronger le cuir. Red allait le tuer ! Mais pour sa défense, elle n'avait qu'à pas les abandonner…

"Tu. En. As. Mis. Du. Temps. Mo-vi-ette." commenta Cecil qui s'était étalé de tout son long sur le lit king-size de l'hôtel.

"Hé ! J'aurai bien aimé t'y voir."

"Ju-se-te-ment." nargua le petit garçon, un sourire béa sur le visage. "I-le. M'au-ra. Fa-lu. Deux. Ou. Tre-ou-a-a-a… Tr-ois. Se-con-des. À. Tout. Pé-ter."

Harold aurait bien voulut lui signaler que son animal à lui s'était barré mais Cecil aurait pu trouver un moyen de sortir, avec ou sans womatou… avec ou sans lui... avec ou sans tout le reste. Il était brillant.

"Dégage tes chaussures boueuses de là ! On ne s'allonge pas sur le lit de Red… t'as perdu la tête ou quoi ?"

"Ne. T'in-qui-è-te. Pas. Pou-re. Moi : J'ai. Un. Bou-que. É-mi-sse-ai-re."

D'abord, Harold fut soulagé avant de comprendre que le bouc émissaire en question ne serait ni Volt ni Womatou. Merde.

Harold, Cecil et VoltILLUSTRATION OFFICIELLE

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Harold, Cecil et Volt
ILLUSTRATION OFFICIELLE

Livre 2,5 : Le Voyage de la Meute ©Où les histoires vivent. Découvrez maintenant