Chapitre 36 - page 2

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Au beau milieu de la nuit, il se trouvait tout près des quais, à quelques rues à peine de son objectif.

Il se cacha dans une ruelle, suffisamment sombre pour se changer discrètement, s'équipa de ses armes et outils, puis grimpa par les murs des habitations, en s'aidant de sa dague, la plantant parfois entre les briques, ou bien dans le bois des poutres, comme le ferait un félin avec ses griffes.

Quelques voltiges plus loin et il arriva sur le toit de la maison voisine à celle du Marquis.

Cette demeure, plus petite que le somptueux hôtel, possédait un jardin, certes bien moins luxuriant, mais ayant l'avantage d'être dépourvu du moindre gardien canin.

Parmi les quelques arbres, il y avait un immense pin marin, qu'Uther avait vu, sans vraiment le voir, plus tôt dans l'après-midi et qui, à présent, par ses longues et épaisses branches, semblant vouloir étendre leurs ramifications jusqu'au-dessus du jardin de monsieur le Marquis, lui semblait faire une excellente passerelle, permettant de franchir le mur mitoyen bardé de pointes.

(Le second œil du voleur), se dit-il en souriant.

Il descendit dans le jardin, grimpa sans trop de mal, en passant de branche en branche, et trouvant finalement le meilleur point d'observation.

La position était presque parfaite : surplombant le jardin, suffisamment haut pour échapper au flair des molosses, assez touffu pour ne pas être vu, à parfaite distance des fenêtres, pour pouvoir tenter un regard, mais, hélas, trop loin pour envisager une intrusion.

Il resta caché, tout en observant les fenêtres s'allumant et s'éteignant tour à tour au gré des passages, car de cela il n'y avait aucun doute : Il y avait de la vie dans cette demeure.

Mais, avec tous ces va-et-vient perturbants, il n'arrivait pas à se figurer l'emplacement du bureau de monsieur le Marquis.

Après quelques longues minutes d'attente, une nouvelle pièce, située au deuxième étage s'illumina. Uther reconnut le Marquis, lorsque ce dernier apparut derrière la fenêtre.

Soudain, et curieusement, il se mit à lorgner à travers les carreaux, les sourcils froncés et l'œil attentif, cherchant à percer les ténèbres. Pris au dépourvu, autant que déconcerté, Uther eut le bon réflexe de s'immobiliser, comme il avait appris à le faire chez les voleurs.

Cette technique permettait de se fondre dans un environnement sombre, en réagissant à l'inverse de ce que l'instinct nous dicte, à savoir se crisper d'un geste vif et nerveux lorsqu'on est surpris, attirant d'un tel mouvement le regard de celui qui vous cherche et qui finalement vous trouve.

Mais, comme Uther n'avait pas bougé, même s'il n'était pas parfaitement caché, le Marquis ne remarqua rien.

Ses suspicions levées, il retourna à ce qu'il faisait. Uther se détendit, puis chercha à changer de branche, car son sujet d'observation venait de quitter son champ de vision.

Il le retrouva derrière une fenêtre de la façade Ouest, qu'il put approcher par une branche le laissant très à découvert, mais assez proche du rebord pour bien voir l'intérieur de la pièce.

Le manque de dissimulation était largement compensé par le fait que le Marquis, assis à son bureau, tournait le dos à la fenêtre. Dans le pire des cas, Uther se suspendrait. À peine eut-il fini d'y penser qu'il tressaillit, lorsqu'il vit le Marquis se lever, craignant qu'il ne s'adonne à une nouvelle inspection par cette fenêtre-ci.

Mais, ce dernier ne fit que contourner le bureau, pour s'approcher du mur du fond de la pièce. Il déplaça alors la toile peinte qui y était accrochée, laquelle représentait le château de Kastraëll, vu depuis les faubourgs de la cité.

Un reflet dans la lame 🏆 (Roman)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant