Chapitre 19- Baby-sitter jour n°277 DOC

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Je tourne en rond comme un con devant l'entrée de ce lieu que je connais pourtant bien. Je suis incapable de prendre une décision. Luck me regarde aller et venir avec son putain de sourire en coin qui me fou en l'air. Ça fait plus de neuf mois que je bosse pour Mia, neuf mois qu'on discute, qu'on rigole et tout. Neuf mois qu'elle croit tout savoir de moi et moi d'elle. Et pourtant...

— Et pourquoi tu ne lui dis pas franchement ce qu'on trafique ? C'est bon, on est au 21e siècle. Elle doit savoir ce que c'est.

— Bin non, justement ! Elle ne sait pas ! grogné-je. Tu savais ce que c'était, toi, avant que ça nous tombe sur le coin de la gueule ?

— À vrai dire non et je sais que j'ai galéré à l'avouer à Monica mais là, cette femme, elle, elle n'est pas censée être juste ta patronne ? Et comment ça se fait que tu stresses comme ça ? T'as qu'à rien lui dire, après tout ! Ce que tu fais te regarde !

Ses questions me figent un instant et je sens le feu gagner ma face. C'est vrai, en fait. Pourquoi je me prends la tête ?

— Tu ne comprends pas ! m'agacé-je autant contre Luck que contre moi même.

— Bon, on y va ? Tu me soules à force de tortiller du cul pour chier droit !

— J'arrive, j'arrive...

Nous nous mettons en chemin sans un mot. Nous avons conscience tous les deux que ce truc, c'est une vraie merde mais nous n'avons pas le choix. Nous devons nous y frotter sans chercher à fuir nos responsabilités.

***

Alors que je m'en retourne vers l'immeuble le cœur lourd par ce que j'ai dû faire par nécessité, je croise Carmelle qui marche d'un pas lent sur le trottoir. Elle est de dos ce qui fait qu'elle ne s'aperçoit pas que je la talonne. Elle porte son tablier de la supérette et un grand cabas anormalement rempli et à première vue très lourd.

— Laisse, tu vas te péter les bras, fais-je en la délestant sans prévenir de son paquetage.

— Ah ! Le Doc, c'est toi ! Tu m'as fait peur !

Je l'embrasse en remarquant à la seconde son expression étrange. Nous évoluons ensemble vers l'immeuble en silence. Inutile de dire à voix haute que le silence de la mère Walker est plus que déstabilisant.

— Que se passe-t-il ? finis-je par prononcer, rongé d'inquiétude.

— Monsieur Frank m'a renvoyée.

— Quoi ?

— Je n'ai plus de travail, le Doc et à mon âge, j'ai conscience que sous couvert de licenciement économique, c'est une mise à la retraite forcée.

Je tombe des nues. Merde, alors. Je n'ai jamais connu de personne aussi dévouée que Carmelle et honnêtement, je pensais que ce serait la mort qui l'ôterait de cette superette dans laquelle elle s'échinait depuis au moins quinze ans. Malgré la bonne humeur qu'elle souhaite afficher, je sens bien, et parce que je la connais qu'elle est ébranlée par la nouvelle.

— Comment vas-tu faire ? lui demandé-je alors que nous gravissons les marches de l'immeuble.

— Tu sais, Monsieur Karson me relance depuis au moins un an pour que j'occupe le poste de concierge en titre de l'immeuble. Je n'ai jamais accepté parce que j'avais mon poste de caissière mais maintenant que je suis dédouanée de cette charge. Je pense que je vais accepter. À peu de choses près, mon salaire sera le même.

— Mais tu ne penses pas que c'est relou de gérer un immeuble dans ce quartier, ma'm ?

— Quoi ? fronce-t-elle des sourcils en stoppant sa marche aux portes du sas. Tu crois que je suis vieille pour me faire respecter, c'est ça ?

My sweet baby-sitter/ Sortie prévue sur Amazon en juillet 2021Où les histoires vivent. Découvrez maintenant