Le Sanctuaire Perdu | Rejetée Par Sa Meute

Chapitre 14

Publié le 23/06/2021

***

Tout s'était passé très vite. Un frémissement dans les broussailles, un bond, et un coup de dents : j'avais tué le lapin à la seconde où il m'a vue – et du premier coup.

Je refermai la gueule sur ma prise, avant de l'emporter en trottinant, fière de moi. Habituellement, les loups chassaient en meute pour pouvoir encercler leur proie, même quand elle était petite. J'étais donc particulièrement contente d'avoir réussi à attraper ce lapin toute seule. Maintenant, il ne me restait plus qu'à partager ma joie.

Je débouchai rapidement dans une petite clairière, où je trouvai Flavien à moitié habillé à côté des casiers en bois. Son visage s'éclaira quand il me vit le rejoindre joyeusement.

« Ah, tu es là ! S'exclama-t-il. Je me demandais si tu n'étais pas en train de rentrer, comme tu ne revenais pas. »

J'émis un jappement d'excuse – c'était vrai que je m'étais éloignée un petit moment, quand j'avais senti la présence des lapins. L'instinct de chasse m'avait temporairement distraite de notre exploration, et je n'avais pas remarqué tout de suite que Flavien n'était plus avec moi.

L'alpha baissa les yeux vers ma proie, légèrement étonné, et il s'accroupit.

« C'est pour moi, ce lapin ? » Demanda-t-il en tendant la main.

La lueur d'humour qui brillait dans le regard de Flavien vint troubler mon assurance. Est-ce qu'il allait se moquer de moi ?

C'était peut-être bizarre de lui rapporter ma proie, en fin de compte. On n'était pas censé offrir du gibier à n'importe qui... C'était un geste qu'on réservait à ses proches, souvent même à sa famille. Est-ce que j'avais l'air d'un louveteau en quête d'approbation ?

Je n'avais pas vu les choses comme ça, sur le moment, mais maintenant, j'avais comme un doute – et je reculait d'un pas quand il fit mine de prendre le lapin.

J'allais peu-être le garder pour moi, finalement.

Flavien éclata de rire, et il se jeta en avant : cette fois-ci, il fut trop rapide pour que je l'évite, et il parvint à refermer la main sur ma proie. Déterminée à conserver ma prise, je tirai obstinément en arrière, sans parvenir à lui faire lâcher le lapin. C'était impressionnant : pour rivaliser avec un loup en restant sous forme humaine, il fallait être sacrément fort.

« Et bien ? Fit Flavien, Tu gardes ton cadeau ? »

J'étais embarrassée, mais l'air rieur de Flavien m'empêchait de m'énerver – je me sentais en confiance, même s'il me taquinait.

Et puis, sans signe avant-coureur, je reculai vivement en tirant d'un coup sec. Surpris, Flavien laissa échapper la proie, et je partis aussitôt en courant, ravie de mon coup.

J'avais définitivement oublié le projet initial de notre promenade, qui était de me faire visiter tout le territoire de la meute. Nous avions déjà fait une longue course jusqu'à la cascade et j'avais le sentiment d'avoir atteint mon content de nouveautés pour le moment. Maintenant, je me sentais d'humeur joueuse, et il n'y avait personne pour gâcher ce moment : Flavien et moi étions résolument seuls.

J'entendis un bruit de pattes fouler le sol – l'alpha, à nouveau sous forme lupine, courait pour me rattraper. Je tentai d'accélérer, mais je ne pouvais pas rivaliser : moins d'une minute après m'avoir prise en chasse, il était déjà à mon niveau. Il se jeta contre moi, et, emportés par son élan, nous roulâmes tous les deux au sol. Le lapin s'envola pour retomber à plusieurs mètre de là, mais nous l'avions oublié.