SIX

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Une route calme, enneigée, la nuit éclairée par les lumières de la ville au loin. Le bruit des voix d'un famille discutant tranquillement. Un virage. Une lumière aveuglante. Des cris. Un choc. Puis du sang, se déversant sur la route froide. Des corps. Des larmes, du sang. Partout.

Je me réveille en hurlant. J'agrippe les draps et me relève brutalement sur le lit. Je tremble comme jamais, et je suis trempée de sueur. J'entends derrière le sifflement assourdissant qui me vrille les tympans des pas se précipitant vers la chambre. Tyler débarque dans la pièce, alarmé. Je le regarde, avec de grands yeux effrayés et humides. Il se précipite vers moi, puis s'assied près de moi sur le lit. Il passe sa main sur ma joue.

— Tu es brûlante !

Je relève les yeux vers lui. Il me regarde toujours d'un air paniqué, qui ne comprend pas ce qui se passe. Cette fois ci, le rêve était plus intense, plus réel. Je revivais tout.

Je passe mes mains sur mon visage pour reprendre mes esprits.

— Je dois prendre l'air, réussis-je à articuler.

Je me relève du lit sous le regard inquiet de Tyler puis sors de la pièce. Je me dirige vers le salon, puis vers la baie vitrée, que j'ouvre sur un balcon. Le soleil au loin m'éblouit. Je sens la brise légère caresser mon visage, et soupire longuement. Mon coeur bat à tout rompre. Je m'accoude au bord du balcon et laisse reposer mon front sur celui ci. Je finis par m'accroupir et adopte une position recroquevillée. Je ferme les yeux et essaye de me détendre. Je me sens un peu mieux. Je ne transpire plus, et les battements de mon cœur ont repris une vitesse normale. Le sifflement dans mes oreilles a disparu.

Ce n'est qu'à ce moment là que je m'en rends compte que je suis toujours en sous-vêtements.

Je sens quelque chose glisser le long de mes épaules. Une couverture. Puis Tyler glisse près de moi. J'ouvre les yeux, puis me retourne et m'adosse au balcon, la couverture toujours sur moi. Je ne regarde pas Tyler, gardant les yeux rivés sur le salon illuminé par les rayons du soleil.

— Ça va Malia ? demande-t-il avec une certaine inquiétude dans la voix.

— Non, Tyler. Je ne vais pas bien. Ce que tu viens de voir en était une assez bonne démonstration. Je ne vais pas bien, hier je n'allais pas bien, et je n'irais pas mieux demain.

— J'aurais pas du te demandé ça, c'était idiot.

— Je confirme.

Il y a un silence pendant quelques secondes.

— Tu as fait un cauchemar ?

— Oui.

— J'imagine que tu ne m'en diras pas plus.

— Bonne déduction. Je n'ai aucune envie de parler.

— Malia...

— C'est bon Tyler. T'en a fait assez.

Je me relève et retourne dans le salon en reposant la couverture sur le canapé. Je continue mon chemin jusqu'à la chambre, me rhabille rapidement. Quand je retourne dans le salon après une minute, Tyler m'attend, avec une expression déterminée sur le visage. J'entreprends de l'ignorer et de tracer ma route jusqu'à la porte d'entrée, mais arrivée à celle-ci, il me barre le passage de son bras. Je ne lui lance aucun regard, mais reste plantée là, comme si j'attendais quelque chose de sa part. Ce que j'attendais arrive, il reprend la parole.

— Tu es compliquée. Trop pour moi. Mais je veux juste que tu sache que j'ai beau ne pas te connaître, je suis là si tu as besoin. Tu as vécu quelque chose qui t'a marquée, tellement que tu en fais des cauchemars la nuit. Et je suis désolé pour ça.

— Merci, Tyler.

Je passe ma tête sous son bras, puis m'en vais sans lui jeter un regard, le coeur battant.

Arrivée chez moi, je me laisse tomber sur le canapé en soupirant.

Ce Tyler...

Je me lève et prends une cigarette. Je la fume, tranquillement sur le balcon.

Je retourne dans le salon quelques minutes plus tard. Je prends un verre d'eau et vais m'asseoir sur le canapé en allumant la télé.

Après un peu moins d'une heure devant des émissions débiles, j'entends quelqu'un frapper à la porte. J'éteins la télé et vais ouvrir.

Je tombe nez à nez avec Tyler. Je referme tout de suite la porte. Je l'entends derrière celle-ci.

— Malia, laisse moi entrer s'il te plaît. Je ne vais pas te faire la morale encore une fois, promis.

— Va-t-en, lancé-je. C'était sympa de me laisser rester chez toi cette nuit, mais je veux pas parler maintenant.

— S'il te plaît...

Je fixe la porte pendant un long moment de silence. Je finis par déverrouiller la porte sans l'ouvrir pour autant. Tyler entre. Je me plante devant lui, les bras croisés.

— Je peux savoir comment tu as su où j'habitais ?

Il sourit sensiblement.

— Je sais me débrouiller quand j'ai des objectifs.

Je lève les yeux au ciel.

— Qu'est-ce que tu veux ?

— J'avais oublié de te dire que tu pouvais rester avec nous la journée, si tu veux.

— Oh, ça ne pouvait pas attendre lundi ?

Il rit doucement.

— Des gens biens sont là pour combler le vide en toi, souffle-t-il.

— Et t'en fais partie j'imagine ?

— Moi, même Hailey, et je suis sûr, plein d'autres gens dans le futur.

— Je l'ai déjà dit. Je n'ai pas besoin d'aide. Je me débrouille très bien toute seule.

— Arrête, tu ne me la fais pas.

Je le regarde droit dans les yeux. Il fait un pas de plus vers moi. Je ne lui réponds pas. Il ne lui a pas fallu beaucoup de temps pour comprendre que je faisais semblant. Semblant de tout. Bordel...

Nous restons silencieux. Il soutient mon regard, puis petit à petit, rapproche son visage du mien. Et quand il approche ses lèvres à quelques centimètres des miennes, il s'arrête.

— Alors maintenant, laisse toi aller.

Puis il recule. Je reste immobile pendant qu'il s'en va en me lançant un regard dans lequel je décèle de l'amusement.

Après qu'il ait fermé la porte derrière lui, je laisse échapper un long soupir. Avait-il vraiment l'intention de m'embrasser ?

AliveOù les histoires vivent. Découvrez maintenant