Lundi 15 mai 2017

10 2 1
                                    

Ce matin, je me réveille péniblement. Il me faut quelques secondes pour me rappeler d'où vient cette morosité qui me pèse dans l'air.

Ha, oui. Mon irréparable erreur.

Et ma promesse de ne plus fermer les yeux.

Le premier pas allant dans ce sens semble évident : je dois m'excuser.

Voilà une idée guère charmante, mais que je crois nécessaire.

Chaque pas qui m'amène aujourd'hui vers le lycée me rapproche aussi du moment.

Je n'aime guère demander pardon.

Surtout à mon bourreau.

Mais je vais le faire. Seulement j'espère trouver Miki seule.

Huit heures quarante-cinq. Ça me laisse le temps de la chercher. La cour ne m'a jamais paru aussi grande qu'en cet instant.

Mais soudain, bingo ! La voici, sans aucun de ses copains aux alentours.

Sans me poser plus de questions, je m'élance, de peur de renoncer.

Miki ne semble pas me remarquer. Pas avant que je ne me tienne juste devant elle.

Elle me jette un regard en biais puis m'ignore. Gênée, je n'ose pas commencer la discussion. Alors je ne bouge pas, attendant qu'elle réagisse.

"Tu me veux quoi ?

- Rien. M'excuser."

Mes mots s'entendent à peine, aussi Miki me fait répéter.

"Je viens te dire, je reprends plus fort, que je n'aurais pas dû raconter toutes ces choses là semaine dernière."

Elle lève un sourcil.

"Tu veux t'excuser. Dis-le clairement."

Merci. J'essaie juste de faire quelque chose de bien, tu pourrais le voir.

"Je racontais n'importe quoi pour t'agacer, c'était puéril. Voilà.

- Très bien. Merci."

Sur ce Miki prend son téléphone et l'allume, m'ignorant à nouveau. La manche de son haut tombe légèrement de son épaule. J'entrevois encore un hématome.

"Tu te fais toujours battre ?"

La question me brulait les lèvres depuis si longtemps qu'elle finit par s'échapper, presque malgré moi. Miki relève la tête, profondément choquée par mon audace.

"Ça te regarde pas.

- Ça me regarde.

- Pourquoi ? Parce que ça blesse ton ego de ne pas y avoir cru à l'époque ?"

Je serre les dents. Elle rit.

"Tu changeras jamais.

- Si, je...

- S'il te plaît, non. Tu ne peux pas, sous prétexte que je t'ai épargnée la semaine dernière, te permettre de venir me demander ce genre de choses. Surtout qu'en vérité, tu t'en fiches complètement.

- C'est ce que tu penses de moi ?" je m'énerve.

Miki lâche un soupire de son sourire vainqueur. Elle répond d'un simple "oui" avant d'ajouter :

" Tu viens ici pour toi. Pour te donner bonne conscience."

Aucune de nous ne parlons après ça.

Si d'abord sa réponse me met en colère, j'en viens à y réfléchir. Me voit-elle comme une égoïste ? Mon caractère, ses deux dernières années d'amitié, ne brillait certes pas par son altruisme.

"J'essaie juste de changer les choses, je lance froidement.

- Il fallait y penser avant. Regarde bien la situation dans laquelle je me retrouve, maintenant."

Son regard lourd de sous-entendus ne me lâche pas, jusqu'à ce que je réponde :

"Ne me rejette pas la responsabilité de tes mauvaises fréquentations et de ton comportement  !

- Oh ! Non, bien sûr..."

Sa désinvolture m'exaspère. Nous n'arriverons pas à avancer si elle continue comme ça.

Petit à petit, une idée défaitiste s'empare de moi. J'abandonne.

Je venais pour m'excuser, pas pour recevoir une leçon de morale. Si Miki ne veut pas faire d'efforts sur ce coup-là, je ne peux rien y faire.

Alors je décide juste de partir. Nul doute qu'elle s'en voie ravie.

Par Le PasséOù les histoires vivent. Découvrez maintenant