XXVIII - Contrôle

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Ce matin, lorsque je me réveille, je retire les bandes autour de mes yeux, tout doucement. Je souffle tout l'air que j'ai inspiré puis j'ouvre les paupières. La lumière me fait larmoyer légèrement mais je vois enfin, même si j'ai encore mal aux yeux. Esmeralda n'est pas là, ce qui est étonnant.

Alors je décide d'inspecter les lieux, ce n'est que ma curiosité qui me pousse à cela. Nous sommes dans ce qui ressemble à une petite cabane conçue là, dans la roche. Les pièces sont spacieuses, des guirlandes, des bougies, des lustres... il y a de la lumière partout.

Elle fait pousser beaucoup de plantes, elles sont toutes déposées sur un établi, elle n'a pas de four, pas de cheminée mais je suppose qu'elle sait se réchauffer toute seule. Je récupère le manteau qui repose sur le dossier d'une chaise et l'enfile. Il est resté à ma taille, parfaitement cintré.

Je me dirige vers le son de la cascade, je pousse le rideau et ouvre de grands yeux en découvrant toute cette eau qui m'éclabousse et vient s'échouer plusieurs mètres plus bas, dans les gorges de cette énorme falaise. L'eau qui tombe est similaire à un rideau translucide, bruyant et puissant.

Sur ma gauche se trouvent des escaliers que je remonte en admirant le paysage qui s'offre à moi. Des montagnes, de la neige, des oiseaux, de l'eau... c'est très vivant ici. Un vrai coin de paradis. C'est difficile à croire que tout autour, c'est détruit par les Ténèbres.

Une fois au sommet, j'enfonce les pieds dans la neige qui semble commencer à fondre à certains endroits mais qui est encore gelée à sa surface. Je revois ce jeune renard roux, il me fixe de ses beaux yeux, furtif, puis il s'échappe quand je tente de l'approcher.

— Où est-ce que vous la détenez ?!

J'entends cela de loin, alors je tends l'oreille.

— Comment souhaites-tu mourir ?

— Je souhaite mourir le corps à l'endroit ! Je ne suis pas un lapin qu'on vient de chasser.

J'esquisse un faible sourire.

— Tristan... soufflé-je.

Je cours, tentant de me repérer au son de leur voix et j'aperçois Esmeralda de dos, elle joint ses deux mains puis les écarte, formant alors une grande boule de lumière et d'énergie, qui grossit à mesure qu'elle écarte ses mains l'une de l'autre.

— Non attendez ! M'écrié-je.

La lumière s'éteint aussitôt et elle se tourne vers moi. Je distingue enfin son visage. Ses cheveux sont blancs, soyeux et longs, avec des tresses pour surélever quelques mèches, ses yeux sont d'un gris pur et hypnotique. Ses lèvres sont fines, roses et ses joues rosie par le froid ou tout simplement parce qu'elle arbore une beauté étincelante.

— C'est mon ami...

Je la vois froncer les sourcils. Il semblerait qu'elle n'ait vraiment pas l'habitude d'épargner les individus comme Tristan et moi.

— Vos yeux sont guéris, alors je veux que votre ami et vous-même disparaissiez avant la tombée de la nuit.

Après avoir dit cela, elle se tourne, et d'un geste de la main, j'entends la corde se couper et le corps de Tristan qui tombe dans la neige. Elle se trouvait cachée derrière des buissons, alors je pousse ceux-ci et rejoins Tristan qui se redresse tout juste. Je m'accroupis devant lui alors il s'immobilise et plonge ses yeux dans les miens. Le voilà de nouveau avec un œil jaune et un teint de cadavre.

— Tu es venu, soufflé-je.

— Je vois que t'as réussi, remarque-t-il.

Je l'enlace, il semble surpris mais finalement, je le sens qui entoure ma taille de ses bras. Je ferme les yeux, un sourire qui ne peut quitter mes lèvres.

Invocatrice de l'OmbreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant