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Entre les verres de jus de fruits, la bière, la nourriture omniprésente, j'ai mangé et bu pour un mois complet ; je n'exagère même pas, mon ventre est à deux doigts d'exploser, il a pris 5 mois en une soirée. Chifuyu est si social qu'il a eu peur de me perdre. Du coup, il est resté à côté de moi tout le temps. Heureusement, je suis ce genre de personne à une soirée : dans le coin, verre en main et regardant avec méfiance les autres comme s'ils allaient se transformer en loup-garou affamé d'une seconde à l'autre. C'est comme ça que je le vois en tout cas. 

- Oh non. 

- Quoi ? 

Chifuyu me fait un signe que je comprends immédiatement. Alerte rouge de niveau trois. Crush en approche. Par crush, j'entends le mec à la chevelure rayée comme un tigre, le seul, l'unique, Kazutora. Deux mèches de ses cheveux encadrent sa tête et le reste tient derrière son crâne par un élastique solide. Un grain de beauté siège sous son œil droit (je ne l'avais jamais remarqué avant) et sa chemise lui sied à merveille avec son pantalon noir. 
Kazutora ne laisse personne indifférent, c'est vraiment un mystère. 

- Hey. 

Panique puissance 1000 pour Chifuyu. Kazutora est venu vers nous comme si nous étions potes depuis toujours. En vrai, il n'a juste aucun mal à parler avec les autres. Et certainement pas de deux crétins qui se tiennent à l'écart de tout le monde.
À moins que... 

Ah ouais, d'accord. À l'opposé de nous, à l'autre bout de la pièce, des gars nous regardent en ricanant. Kazutora a dû perdre un pari. 

- On peut parler ? 

Je n'entends pas la réponse de Chifuyu mais je suppose qu'il est d'accord : il change de pièce avec Kazutora. Je me retrouve vraiment seul. 
La wonte, comme dirait ma petite cousine. 
Je soupire. Qu'est-ce que je vais bien pouvoir faire ? La musique ambiante change de ton pour quelque chose de plus posé. Et là est le problème. Au même moment, Hina a eu la bonne idée de débarquer à la fête (légèrement en retard).
Avec sa copine. 
Sa copine. 

Mon esprit disjoncte et je me sens soudainement mal à l'aise, très mal à l'aise. Je connais Hina depuis longtemps. Si elle me reconnaît, elle va vouloir me taper la discute (je n'ai pas envie) et sa copine sera juste à côté. Être dans le même espace que Yuzuha, non merci. Pas que je l'aime pas, mais nous n'avons pas trop de bons rapports. 

- MER-...! 

Hein ? 
Je sens du froid au niveau du bras, mais pas que. Une odeur forte me fait plisser le nez et je m'écarte d'un bond. Des gars se disputaient pour un verre et le contenu a atterri sur moi. Super. Je fulmine. Pas contre les fautifs, mais contre moi. 
Je dois partir, et vite. 
Déjà, quelques regards se tournent vers moi. Les gars s'excusent mais je ne les écoute pas. Mes yeux restent bloqués sur Hina qui me regarde au loin, paraissant inquiète. 
Des sueurs froides se glissent dans ma nuque et j'ai envie de vomir. Je serre le poing, fends la foule et esquive Hina qui m'appelle par mon nom. Je donne pas de réponse. Je claque la porte de la maison derrière moi et j'envoie immédiatement un texto à Chifuyu que je vais prendre l'air, que je reviens plus tard. 
Je range mon téléphone. 

Je m'engage dans la rue sombre, seulement éclairée par les lampadaires et, les mains dans les poches, je ne sais pas où je vais. Peu importe la direction, je veux rester loin de la soirée. La honte s'est emparée de moi. J'ai fui comme un lâche. Mais qu'est-ce que j'aurais fait de plus à cette soirée ? Rien. 
Les rues s'entrecroisent et se ressemblent. Mes pas me guident. La lune veille seulement à ce qu'il ne m'arrive rien. (Et encore.) 
À un autre croisement de rue, j'arrive devant un bâtiment en sale état. Les murs couleur cendre datent de Mathusalem, le toit est éventré et tout un tas de ferrailles rouillées jonche le sol avec les gravats. Sans savoir pourquoi, je ressens l'énergie de cet endroit. Une énergie à la fois apaisante et suffocante. J'entre à l'ouverture d'une ancienne porte et enjambe la ferraille sans faire de bruit, comme si un ours habitait là. Ce serait dangereux tout de même. 

Je ne connaissais pas cet endroit de la ville. Peut-être que j'y retournerai. 

En avançant un peu plus, mon cœur s'emballe brusquement. Je me stoppe net en voyant une silhouette se découper dans la lueur de la lune qui traverse le plafond éventré, une silhouette assise sur un tas de choses métalliques, jouant avec un briquet ; à l'allumer, et à l'éteindre. Ses cheveux noirs me paraissent courts et un tatouage de dragon grimpe dans sa nuque, il porte un maigre débardeur noir et une veste blanche qui ne couvre même pas ses épaules, son pantalon noir remonte sur ses genoux. 

- Takemichou ? 

Je cligne des yeux. Il me connaît ? 
Il se lève, époussetant son pantalon et descend en un saut de sa montagne de ferrailles. 

- T'es bien Takemichi ? demande-t-il, un peu plus sceptique parce que je ne lui réponds pas. 

Je déglutis. L'alcool commence tout juste à me faire tourner la tête pendant que l'autre garçon de mon âge se rapproche. 
En y regardant de plus près, sa tête me dit vraiment quelque chose. 
Je mets un petit temps à réaliser qui il est et mes jambes se pétrifient. 

Mikey. 

Un mec de mon lycée qui a été renvoyé à cause des troubles qu'il causait. Le genre bad boy et à aimer la violence. Elle était quotidienne. Des rumeurs circulaient comme quoi, même en primaire, il se battait déjà contre des plus grands que lui, et personne n'a jamais réussi à le battre. Au lycée, (et au collège), on le surnommait : Mikey l'intouchable. Son vrai nom, qui ne rappelle pas une pâle copie d'une souris connue chez Disney, c'est Sano Manjiro. 

- Qu'est-ce que tu fous là ? 

Son ton est bien plus sombre. Ce n'est plus un briquet qu'il tient dans les mains mais... une arme à feu. 

𝐝𝐞𝐮𝐱 𝐠𝐚𝐫𝐜̧𝐨𝐧𝐬 | ₍ᐢ ̥ ̮ ̥ᐢ₎ 𝐭𝐫Où les histoires vivent. Découvrez maintenant