Chapitre 8

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Les rues de Paris, comme d'habitude, étaient bondées de monde. Entre les touristes qui prenaient en photo le moindre détail, bloquant la fluidité des trottoirs, et les acharnés du travail qui bousculaient chaque personne se trouvant sur leur passage; c'était loin d'être un trajet calme. 

Enfin arrivées au passage piéton qui menait sur la petite terrasse d'un café, Agathe et Maëva firent un grand signe à Gabriel, déjà installé sur l'une des chaises en osier. Elles étaient assez modernes-nature, à l'image de la petite enseigne. Une dizaine de tables rondes offrant un mix de verre et de bois vernis jonchaient la petite terrasse délimitée par des jardinières aux fleurs vives. La devanture donnait un air du sud à la petite place, "Epistolaire" en grosses lettres blanches contrastaient sur la moulure au jaune méditerranéen au dessus de la longue baie vitrée. Ils avaient l'habitude de venir ici: c'était assez éloigné de chaque appartement du petit groupe pour les dépayser mais tout de même assez proche pour s'y rendre à pieds. Pourtant, ce n'était que très rarement qu'ils avaient eu la chance de voir ce café sous un soleil si chaud et présent, d'ailleurs le large store en toile blanche était sorti pour procurer de l'ombre aux quelques clients.

Les deux jeunes femmes traversèrent la route aux pavés usés pour atteindre le jeune homme. Gabriel avait tout du bon chic bon genre nota Agathe: sa paire de ray-bans à l'armature dorée et aux verres noirs posée sur le bout du nez, une chemise en lin beige, les deux premiers boutons ouverts sur son torse basané et un short en toile foncée. En même temps, ça ne pouvait que coller avec son physique ajouta-t-elle à sa réflexion. Une chevelure brune et légère qui se prêtait au jeu du vent, des yeux clairs, un teint adapté au soleil d'été, une carrure assez élancée et un sourire éclatant. Elle savait que, d'image, tous les parents le voudraient pour leur fille.

-Vous avez marché au ralenti? Ça fait dix minutes que je vous attends!

S'exclama le jeune homme quand les deux filles s'installèrent à leur tour autour de la table. Maëva ne cacha pas son exaspération alors qu'Agathe fit un léger signe de la main au serveur, elle aurait pu mettre sa main à couper que c'était un tout jeune étudiant en job d'été. Elle pouvait l'affirmer à sa démarche peu assurée quand il s'approchait, aux traits encore bébés et au style assez adolescent. Alors qu'il sortit de la poche arrière de son jean délavé un calepin tout chiffonné, il essaya de réchauffer la mine de son stylo bic avec son souffle. 

-Bonjour, qu'est-ce que je peux faire pour vous?

Il avait une voix plutôt grave, du moins plus grave que ce que son visage pouvait laisser imaginer. Il n'avait pas regardé une seule personne à cette table dans les yeux, le regard fuyant.

-Je vais prendre un chaï latte au lait d'amandes; annonça Maëva les lunettes relevées dans son carré blond, et vous?

-La même chose.

Répondit Agathe en accrochant son sac au dossier de sa chaise. Le petit jeune notait avec rapidité les commandes en fredonnant comme pour dire que les commandes étaient bien prises en compte.

-Pour moi ce sera un simple expresso!

Le serveur hocha simplement de la tête en refermant le calepin et pressa le pas vers le comptoir animé du petit café. Ce n'est que quelques minutes plus tard qu'il revenait avec un large plateau noir et les trois boissons attendues. Il les déposa agilement sur la table accompagnées d'une petite coupelle où l'addition y était coincée. Après avoir reçu des remerciements il disparu à nouveau entre les clients.

-Je vous invite.

Annonça Gabriel en étirant son bras vers la table d'à côté pour récupérer le cendrier en verre, vide.

Sprezzatura // N.O.SOù les histoires vivent. Découvrez maintenant