Avant que tout implose

Chapitre 8

À écouter durant la lecture "In the end, it's you" de Marcus Warner

Paris sonna une heure du matin quand les deux héros commencèrent à baisser leur garde. Cela faisait une heure qu'ils attendaient de pied ferme la nouvelle attaque de Papillon suite aux événements de ce soir, en vain. Le choc pour Papillon, alias Gabriel Agreste, l'avait été tout autant que pour son fils s'ils en croyaient son soudain silence. Chat Noir s'était calmé, retrouvant un comportement que Ladybug reconnaissait ; une jambe dans le vide, l'autre plié, ses bras l'entourant, le jeune héro avait posé son menton sur son genoux et semblait admirer la capitale. Seulement, son regard absent indiquait à sa coéquipière le fond de ses pensées.

Après l'avoir enlacé durant de longues minutes, Chat Noir s'était finalement détaché. Il avait séché ses joues et avait cherché à cacher ses émotions. Il n'avait pas la force de lui adresser un faux sourire ou même une réplique pour changer de sujet. Il en était incapable. Alors, comme si c'était ancré en lui, Chat Noir lui avait fait simplement comprendre qu'il voulait être seul. Pour une fois, il ne chercha pas à rassurer la jeune fille ; il voulait juste se retrouver avec lui-même après les fortes émotions qui l'avaient animé en cette fin de soirée. Malgré son calme apparent, Chat Noir grondait encore et la simple idée d'imaginer son père devant lui suffisait pour faire battre son cœur plus fort et répandre l'adrénaline dans son corps. Pourtant, il sentait aussi le vide l'envahir. Qu'est-ce qu'il ferait une fois son père arrêté ? Son seul foyer venait de voler en éclat ; comment ses amis pourraient le croire quand il clamerait son innocence face aux actes de son père ? Comment aurait pu t-il ne pas savoir ce qu'il se passait dans sa propre maison ? Chat Noir réalisa douloureusement que l'ironie du destin l'avait choisi pour rendre justice, même lorsque tout le monde l'accuserait des crimes de son père alors qu'il avait passé l'année entière à le combattre. Qui pouvait bien se jouer de lui ainsi ? Qu'avait-il fait pour que son père devienne son ennemi ?

Plus loin, de l'autre côté du toit, Ladybug était debout et guettait le moindre mouvement suspect. En même temps, elle jetait toutes les deux minutes des coups d’œil à son partenaire, enfermé dans le silence depuis la révélation qu'il lui avait fait. L’héroïne était nerveuse, ses mains s'agitaient, elle était incapable de tenir en place, et surtout, se demandait comment aborder son meilleur ami pour le soutenir. Elle respectait son choix quant à sa solitude, mais cela faisait une heure et elle doutait que ruminer son chagrin allait l'aider. Pour la première fois depuis qu'ils se connaissaient, Ladybug ne savait comment réagir face à Chat Noir. Entre eux, tout était si simple, l'alchimie et la confiance avaient solidifié une relation solidaire, comme s'ils étaient destinés. Mais à présent, comment Ladybug pourrait-elle lui assurer qu'elle était là pour lui après leur dispute ? Chat Noir avait été déçu et ils n'en avaient toujours pas parlé. Ladybug souffla et serra les poings. Les yeux fermés, elle calma les battements effrénés de son cœur. C'étaient les réflexions et la peur qui avaient créé un gouffre entre eux ; la jeune fille devait recommencer à penser comme au bon vieux temps, lorsqu'ils se complétaient et que la cohésion suffisait. Ce fut pourquoi Ladybug, sans attendre une nouvelle seconde, se dirigea vers Chat Noir et franchit la distance qui les séparait.

Malgré ses sens aiguisés qu'il empruntait au chat, le héro ne se rendit compte de la présence de l’héroïne à pois noirs que lorsqu'elle s'assit à ses côtés. Les jambes dans le vide, tournée vers la ville, il sentit son regard cherchant à le déchiffrer. Chat Noir aurait autrefois certainement payé pour qu'elle lui accorde autant d'importance ; cependant, à l'heure actuelle, il ressentit une étrange sensation, bien différente à la timidité. La nervosité faisait presque rougir ses joues tant il était mal à l'aise. Ses poils se hérissèrent, sur la défensive, et il se retint de se déplacer plus loin de la jeune fille. Il ne supportait plus qu'une tierce personne puisse lire en lui comme dans un livre ouvert. Était-il si prévisible qu'un simple regard suffisait pour connaître ses faiblesses ?