Chapitre 4 - Les cerises

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Alors qu'elle descendait de la monture et atterrissait lourdement sur le sol, Pieck levait les yeux vers le châtain.

- Merci pour le trajet. Je te revaudrais cela à l'occasion.

Elle commençait à marcher pour s'éloigner de Jean en soulevant sa robe pour ne pas la salir dans la boue. Puis, la femme aux cheveux noirs s'arrêtait sans oser regarder le grand châtain. Elle murmurait :

- Tu regrettes vraiment ce qu'il s'est passé ?

Le châtain déglutissait.

- Oui.

- Je comprends, ce n'était que l'histoire d'une nuit de toute façon.

Pieck partait sans rien ajouter d'autre alors que Jean descendait enfin de sa monture. Il observait tristement la jeune femme s'éloigner de lui et rentrer chez elle.

Quelques semaines étaient passées et Jean n'avait pas reparlé avec Pieck. Quand il la voyait au loin et la saluait, elle ne le lui rendait pas. Ou même quand elle se retrouvait chez les Braun et que le châtain passait en coup de vent, la jeune femme changeait de salle. Et c'est exactement ce qu'il se passait ce jour-là.

Dénoyautant une grande quantité de cerises, Karina Braun, Licht, madame Kirstein, Pieck, Annie et Gaby qui surveillait les cuissons, faisaient de la confiture. Les femmes riaient entre elles et se racontaient tout ce qui leur passait par la tête.

S'étant retrouvées chez le couple Braun qui avait une des plus grandes maisons, tout le monde y entrait comme dans un moulin.

Après s'être déchaussé, Jean se rendait directement vers la cuisine pour s'y laver les mains et saluer les femmes.

- Vous savez où se trouve Livaï ? Reiner aimerait qu'il amène Irvin et aussi Emil. Il veut leur montrer la tonte des moutons.

Un torchon en main pour se les sécher, Licht s'approchait du châtain en fronçant les sourcils.

- Emil est encore trop petit.

Jean retirait son fedora et plaquait ses cheveux transpirant en arrière.

- Mon filleul est un dur à cuir. Même s'il n'a qu'un an, c'est un homme qui doit assister à la tonte.

Il lançait un regard à Pieck qui restait concentrée sur les cerises.

- Pas vrai chère marraine d'Emil ? Notre petit est un homme, un vrai.

La jeune femme aux cheveux noirs hochait de la tête sans lever les yeux.

- Livaï et les petits sont dans le verger juste derrière. Prends-leur un chapeau, le soleil semble taper fort.

Licht le jetait presque de la cuisine en lui lançant les deux chapeaux et se retournait pour en lancer un troisième.

- Celui-là est pour Livaï, si Reiner n'en a pas, tant pis pour lui. Je lui avais dit d'en prendre un.

Karina riait en fond. Il faut dire que Licht avait l'impression de materner pas deux, mais quatre hommes dans cette maison.

Alors qu'il allait sortir, le châtain fut attiré par Pieck qui se levait précipitamment. Elle avançait pourtant d'une démarche gracieuse et se rendait vers les toilettes une main plaquée sur ses lèvres.

- Qu'arrive-t-il à Pieck ?

Le châtain était pâle alors que Licht haussait les épaules.

- Elle m'a dit avoir mangé quelque chose de pas très frais ce matin. Ce n'est pas la première fois qu'elle se lève pour se rafraîchir aux toilettes.

Donnant un coup de coude au châtain, elle lui lançait un regard sournois.

- Si elle avait un partenaire, j'aurai pu me poser des questions surtout avec la fréquence de ses départs précipités.

Le sourire de Licht se fanait quand elle remarquait l'expression du visage de Jean.

- Tu vas bien ?

Même s'il avait ses chaussures, Jean rentrait une seconde fois dans la maison et se dirigeait directement vers les toilettes. Heureusement pour lui, Pieck n'avait pas eu le temps de fermer.

- Tu es enceinte ?

La jeune femme qui se trouvait à genoux devant les toilettes sursautait. Elle maintenait d'une main ses cheveux et n'osait pas regarder Jean ; elle se sentait pitoyable.

- Ne dis pas de stupidité.

Elle déglutissait avant de tout lâcher dans la cuvette. Jean s'approchait d'elle et retenait les cheveux qu'il attachait rapidement dans une queue de cheval. Avec ses propres cheveux qui devenaient rapidement longs, il avait l'habitude de se les attacher et avait donc toujours à disposition un élastique ou deux au poignet.

- Suis-je le père ?

Elle roulait des yeux en continuant de déglutir. Jean se mettait à genoux derrière la jeune femme et lui caressait le dos.

- Ne me touche pas.

Pourtant, il continuait.

- Tu es donc enceinte ?

- Tais-toi. Arrête vraiment de parler si c'est pour dire de la merd...

Jean l'enlaçait et posait son visage contre le dos de Pieck.

Alors qu'il resserrait son étreinte autour de la jeune femme, ses yeux s'embuaient.

- Je pensais qu'en me retirant, tu ne tomberais pas enceinte aussi facilement.

Pieck tapotait de sa main sur le genou de Jean.

- Ne t'inquiète pas, je ne veux rien de toi. Tu n'es même pas obligé de reconnaître l'enfant.

Elle souriait en douceur.

- Je saurais m'en occuper seule.

Là, en entendant la validation de sa grossesse, Jean resserrait sa prise autour de la taille de la jeune femme.

- Non, je veux être le père de cet enfant. Épouse-moi.

Lâchant un hoquet de surprise, Pieck repoussait le châtain.

- Tu n'es pas obligé et tu n'as pas à te forcer. Comme dit, je ne dirais pas que tu es le père.

- Épouse-moi.

- Ce n'est pas si simple que cela Jean. Il faut au moins un peu d'amour si l'on veut se marier.

À vrai dire, durant ces longues semaines sans Pieck, Jean avait eu tout le loisir de réfléchir à ce qu'il s'était passé à l'auberge. Il s'était au début senti misérable d'avoir pris la pureté de Pieck, puis stupide d'avoir dit regretter et abruti de ne pas l'avoir suivi. Il n'était qu'un abominable homme sans cœur de ne pas être revenu pour lui parler et surtout lui parler sérieusement de la situation. Discrètement, il l'avait guetté pendant ces longues semaines.

En l'espace de quelques semaines, il avait plus ressenti le manque de la présence de Pieck qu'il ne l'avait jamais ressenti pour Mikasa. Son choix avait été fait.

- Tu ne le regretteras pas. Épouse-moi.

Pieck se pinçait les lèvres en sachant qu'elle ne devait pas avoir une haleine des plus séduisante.

- Vous allez vous marier ?

Dans l'embrasure de la porte, Licht les fixait un immense sourire aux lèvres. Ses pommettes se tenaient bien hautes à cause de l'immense sourire qu'elle avait dévoilant une dentition parfaite.

Une bonne odeur de cerise se faisait sentir en fond.

Un désir si simple (Jean x Pieck) Où les histoires vivent. Découvrez maintenant