Chapitre 6: pumpkin pie

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James Jones était un fermier d'une cinquante d'années. Trapu, les cheveux grisonnants et la mine accueillante, il vivait seul sur son terrain, situé aux alentours de San Francisco. James était un homme très solitaire, bien qu'il n'existait pas plus gentil homme que lui. Sa famille était également installée dans l'état de Californie, ses parents, ses frères et sœurs, et ses neveux, et nièces. Il ne les voyait que très rarement et généralement lors des fêtes de fin d'année. Il était trop débordé par ses exploitations pour se permettre de prendre du repos. Il n'était pas non plus un homme qui délaissait facilement son travail. Il employait un ou deux ouvriers, et seulement lors des pleines saisons. Le reste de l'année, il était seul. Cela ne le gênait pas, il aimait ce sentiment de calme qui rythmait ses longues journées. Il n'aurait échangé cela pour rien au monde. Sauf peut-être pour plus de sécurité. Travailler et vivre seul dans un endroit retiré signifiait se tenir sur ses gardes à tout moment. Il était en retrait des autres voisins et se méfiait des voleurs de nuit. Car, dans son sommeil, il ne les entendait pas arriver.

Le moment qu'il craignait le plus était le matin durant les mois où le soleil se levait plus tard. Il quittait sa petite maisonnette dans une vieille camionnette rouge dont les phares clignotaient à chaque anomalie de la route. Sa maisonnette était au centre de quelques-uns de ses champs, principalement là où il gardait ses bêtes, mais pas tous.

Durant la saison automnale du mois d'octobre, James Jones était fortement sollicité pour ses citrouilles, reconnues comme les meilleures de la région. Il ne s'amusait pas à essayer d'atteindre des tailles vertigineuses ou alors à leur donner une couleur parfaitement orangée. Il cultivait, s'assurant qu'elles reçoivent du bon engrais et qu'elles soient entourées de conditions idéales. Cela résultait en des citrouilles parfaitement naturelles qui même si elles n'étaient pas bien régulières, attirées une forte clientèle.

Il se rendait sur le champ de citrouilles le matin et l'après-midi, dès que la saison de culture débutait. C'était un travail acharné surtout qu'il fallait se méfier des gamins de quartiers en plus de mère nature. La nature était un élément imprévisible, indomptable. Mais les saccageurs de nuit étaient les pires. Ils n'avaient pas de but prédéfini, ils arrivaient et détruisaient une bonne partie de la récolte. Ils se concentraient sur les plus belles citrouilles. Les petites malformées ne valaient pas le détour.

Au fil des années, il s'en était fait une idée. Il n'essayait plus d'éviter quoi que ce soit. Les malins s'en sortaient toujours, même lorsqu'ils étaient pris la main dans le sac. James avait installé des systèmes de surveillance, tous détournés, un par un.

Mais ce qu'il découvrit ce matin, surpassait tout ce qu'il avait pu voir auparavant.

Il partit une nouvelle fois dans sa camionnette, une dizaine de minutes plus tôt que les autres matins. Il était seul sur la route. C'était samedi et nombreux étaient en week-end et échappaient donc au réveil matinal. Il vira à droite et se gara sur la zone couverte de graviers, là où les clients arrivaient. De son véhicule, il remarqua déjà l'étrange brume qui recouvrait sa culture. Il décida de ne pas y prêter trop d'attention, après tout, c'était la saison.

Seulement, en sortant de la camionnette, il ne pouvait plus nier que quelque chose clochait. Une odeur de putréfaction arriva à ses narines. Il fut obligé de se couvrir le nez et la bouche pour ne pas succomber à l'odeur. Il passa outre ses hauts de cœur, et continua à avancer. L'odeur était insupportable, mais la vision de son champ l'était encore plus. Ses magnifiques citrouilles n'étaient plus qu'un lointain souvenir. Dès lors, elles ne formaient plus qu'un cimetière. Les citrouilles étaient en décomposition, elles étaient envahies par les mouches et les charognards. Un autre détail attira l'attention de James. La brume qu'il avait remarqué auparavant ne s'étalait que sur son champ, et s'arrêtait pile aux extrémités. Autre chose, qui n'était pas facile à discerner. Mais avec un peu de concentration, sept lettres perçaient la brume et formaient, les unes à côté des autres "Hypnose".

Hypnose (the wattys 2021)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant