Chapitre 4 | Numéro 421

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  Lorsque le véhicule s'arrêta enfin, Hiro avait eu le temps de se relever. Il avait repris silencieusement sa place adossé au mur. Les militaires nous firent signe de rester assis jusqu'à l'appel de notre nom. Je commençais à stresser, ce que mon camarade sentit. Il chuchota:

« - N'aie pas peur, c'est ce qu'ils recherchent. »

  Le militaire le plus proche de nous le fusilla du regard, sa mitraillette braquée sur le garçon. Visiblement, ces hommes étaient capables de tout. Il n'hésiteraient pas une seconde à blesser des adolescents, voire les tuer si quelqu'un le leur ordonnait. Les minutes passèrent et enfin, j'entendis mon nom. Mes jambes engourdies peinaient à me relever, alors un soldat me tira brusquement en dehors du camion. Il me projeta d'une telle violence que je tombai au sol à l'extérieur du véhicule, face contre terre. J'avais mal, et honte. Mais au moins, le soldat n'avait plus son arme pointée sur Hiro.
  Soit leur temps était si précieux qu'ils ne voulaient pas prendre la peine d'en perdre quelques secondes, soit ils cherchaient vraiment à nous apeurer pour garder le contrôle.
Lorsque je me relevai, je vis que l'endroit était immense. Nous étions à l'intérieur d'un grand hangar où des dizaines de véhicules semblables au notre étaient garés, déchargeant des centaines de personnes.

« - Quel âge? me demanda un homme, un calepin à la main.
- Quatorze ans.
- Ton nom?
- Éris Alcyone.
- Tu es le numéro 421 »

  L'homme détacha une étiquette avec mon numéro d'un papier et me la colla sur la manche, puis il pointa un groupe de jeunes filles que je rejoignis. Pour la première fois, c'est une femme qui me prit en charge. Mais je ne me sentais pas en sécurité, malgré le visage calme et confiant de cette femme. Je venais d'être séparée d'Hiro, celui que je voyais comme mon allié.

  Je regardai les gens aux alentours. Tous semblaient avoir entre 12 et 17 ans, et étaient répartis dans des groupes à la sortie de leur camion. Je n'étais entourée que de filles qui semblaient avoir mon âge. Je tentai ensuite d'écouter ce que disaient les militaires. L'un d'eux demanda son nom à quelqu'un, comme il l'avait fait pour moi. Mais au lieu d'un nom, j'entendis "je suis le sujet n°12".

« - Hein? » fis-je en regardant là d'où provenaient les voix.

  Mais il était impossible de savoir qui était ce fameux sujet numéro douze au milieu de cette foule, et quelques minutes après, la femme qui nous prenait en charge nous compta et informa qu'elle n'emmênerait pas plus de douze enfants et que nous étions au complet. Des enfants. Je voulais bien comprendre que nous étions jeunes, mais nous n'étions pas non plus des gamines.
  À sa demande, le groupe se mit en rang et la suivit dans des couloirs gris sombres, faits de murs de métal contre lesquels le bruit des talons de notre accompagnatrice se répercutaient. Il y avait quelque chose d'angoissant dans ce couloir, que ce soit dans les murs métalliques, qui semblaient rétrécir à mesure que nous avancions, l'absence de fenêtres, la lumière discrète qui pleuvait du plafond comme une fausse promesse de sécurité, ou le bruit régulier des pas de la femme, qui étaient les seuls à résonner dans mes oreilles, avec les battements de mon cœur.

  Nous arrivâmes enfin devant une porte verrouillée qui s'ouvrit silencieusement au contact d'un badge. Une salle blanche équipée pour seul mobilier d'une douzaine de chaises nous fit face. Après nous avoir fait asseoir, la femme se présenta:

« - Bonjour à toutes, je suis Mme Termend et c'est moi qui vais vous accompagner dans vos tests tout au long de la journée. Mais avant, celles qui souhaitent prévenir leur parents peuvent se lever trois par trois pour utiliser les téléphones que voici. »

  Elle désigna le mur auquel étaient fixés trois combinés avant de reprendre:

« - Je vais vous donner un papier avec leurs numéros au cas où vous ne les connaissez pas. »

Leur Jeu : SurvivreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant