Chapitre 8 | Disparaître

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  Après cet interminable trajet, le train s'arrêta et nous descendîmes devant une muraille surmontée de barbelées. Des militaires nous escortèrent devant deux immences battants de métal, qui s'ouvrirent sur un gigantesque terrain. Il y avait de l'herbe à perte de vue, mais aussi une forêt, des pistes de sport goudronnées, un lac artificiel et tant d'autre choses que je ne pouvais pas voir. Le terrain était une sorte de colline, au sommet de laquelle trônait un imposant bâtiment circulaire, qui s'élevait sur cinq étages. Nous étions face au Centre. À quoi pouvait bien servir cet endroit? Nous n'étions pas censés être envoyés au Jeu directement? Nous parcourûmes les quelques 500 mètres qui nous séparaient du bâtiment, il semblait bien plus impressionnant de près, nous donnant la sensation d'être écrasés.
  À l'interieur, à gauce de l'entrée, il y avait un grand refectoire, séparé en deux parties par une grille. D'un côté, il y avait des tables et des chaises en bon état, et de grandes fenêtres permettaient de voir l'exterieur, apportant une clarté naturelle à la pièce, quelques plantes ajoutaient une touche de verdure. De l'autre côté, tout semblait bien plus morne. Des blocs de béton abîmés faisaient office de table et de bancs, et il y faisait sombre. Malgré le fait que cette partie soit plus grande que l'autre, il y avait beaucoup moins d'espace entre les tables et il semblait plus dificile de circuler. La porte d'entrée se referma et se verouilla dans un bruit métallique, et on nous conduisit devant une porte au dessus de laquelle était écrit "informations" qui donnait sur une grande salle surmontée d'une estrade. Nous étions si nombreux que nous étions entassés, malgré la taille de la pièce.
  Un militaire demanda le silence et une jeune femme entra dans la salle avec assurance et prit place sur l'estrade. Elle n'était pas plus grande que moi, et certains d'entre nous la dépassaient d'une bonne tête, mais elle avait l'air importante. Elle se tenait droite, la tête haute, et affichait un air serein et serieux. Ses cheveux châtains étaient attachés en une queue de cheval haute. Elle portait un pantalon et des bottes militaires, et un haut noir moulant, laissant apparaitre sa sithouette musclée. Malgré son jeune âge, vingt ans tout au plus, elle semblait être une personne implacable, et dangereuse. Cette femme nous balaya du regard, c'est là que je remarquai que ses yeux avaient quelque chose de spécial: l'un était bleu, et l'autre marron-doré. Puis, après ce silence durant lequel nous étions dominés par sa prestence, elle se présenta d'une voix autoritaire:

"- Mon nom est Joss. Abygaïl Joss."

  Cette simple phrase finit d'asseoir sa superiorité. Elle était la fille de Joseph Joss, le dirigeant de la France. Des murmures d'étonnement se firent entendre parmi la foule, qui s'arrêterent immédiatement lorsqu'Abygaïl Joss reprit la parole.

"- Je serai responsable de vous pendant les deux mois à venir, autrement dit, j'ai deux mois pour faire de vous des Joueurs capable de survivre plus de quinze minutes au Jeu. Des questions?"

  Personne n'osa parler, puis au bout de quelques secondes, une voix s'éleva timidement:

"- Ça veut dire qu'on va rester deux mois ici?
- Exact, le but du Centre est de vous mettre à niveau, parce que je suis certaine que sans ça, vous ne serez pas dix pour-cent à passer le Niveau 5. Sauf si vous vous pensez capable d'aller au Jeu dès maintenant, dans ce cas là dites le moi et vous y partirez d'ici trois jours avec la vague précédente."

  Sa voix était calme, personne ne protesta. Bien qu'elle nous jugeât faible, elle n'était pas hautaine. Seulement expérimentée. Elle avait dû voir des centaines de Joueurs partir pour le Jeu et y mourir en moins d'une heure. Quelqu'un posa une autre question:

"- C'est quoi les vagues? 
- Et bien, c'est une sorte de groupe de Joueurs. Vous, par exemple, vous êtes la vague n°64. Et mon cousin Arthur Joss prend en charge la vague 63 en ce moment même, il sera parfois en charge de vous.
- Pourquoi avoir créé le Centre?
- Le Centre est mon idée. Je l'ai créé pour remplacer l'ancien centre de formation des Tricheurs, mais mon but est surtout d'améliorer le potentiel des Joueurs, afin de mieux pouvoir exploiter vos talents de Magicy. Car, les impôts et la pension ne suffisent pas à financer le Jeu, et les augmenter serait catastrophique pour la population. C'est pour ça qu'il est télévisé, l'audience nous permet de ramacer un peu plus d'argent, et personne n'aimerait regarder quelque chose d'ennuyeux à la télé." Expliqua-t-elle.

Leur Jeu : SurvivreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant