Chapitre 1 | Prendre un risque

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  Ce matin, c'est un bruit d'explosion qui me réveilla. J'avais l'habitude de ce genre de choses, car nous traversions une période de conflits. Nous avions la chance de ne pas habiter dans une zone très exposée, enfin, c'est ce que nous croyions jusque là. Soucieuse, je me redressai, à l'affût du moindre son, quand une voix ensommeillée retentit:

"- Qu'est ce qu'il se passe? Il est une heure du matin !"

  Je reconnut aussitôt la voix de ma petite sœur. En passant la tête par l'entrebâillement de ma porte, je la vis dans le couloir, les yeux mi-clos et ses cheveux châtains en bataille.

"- Ambre! l'appelai je à voix basse. Viens!"

  Ma fenêtre était du côté d'où le bruit venait. Une autre explosion se fit entendre tandis que ma cadette me rejoignait d'un pas traînant. Nous nous approchâmes doucement du châssis, inquiètes ce que nous trouverions derrière. Le volet était fermé, mais en ouvrant la fenêtre, le son filtrait au travers du bois, laissant penser que des dizaines de personnes marchaient dans la rue. Après un bref échange de regard avec Ambre, je poussai les battants du volet. En effet, des gens marchaient, portant des pancartes, taguant des murs, certains transportaient même des feux d'artifices et des pétards quand... BANG!

"- C'est pas vrai Stéphane !! T'es vraiment un abruti !" s'énerva un homme.

  Le dénommé Stéphane venait de faire exploser un pétard par accident. Un autre reprit:

"- C'est vrai, t'exagères à la fin ! t'as envie de voir les flics débarquer ou quoi?

- Roh ça va, je suis sûr que personne a entendu.

- Mais t'es con ou tu le fais exprès ?! Regarde la maison en face, il y a deux filles! A mon avis elles sont pas là parce qu'elles sont somnambules!"

  Ambre ouvrit des yeux énormes et s'accroupit pour se cacher derrière le mur, tandis qu'un homme nous pointait du doigt. Je n'y prêtai pas attention scrutais les visages dans l'obscurité. Tous avaient l'air jeunes, aucun ne me semblait familier. Sauf peut-être...

"- Éris? appela une voix.

- Hiro?" répondis je.

  Hiro était un garçon de ma classe avec qui je m'entendais plutôt bien. Je voulus le rejoindre mais je détournai les yeux vers ma sœur qui semblait avoir compris mon idée. Elle fit non de la tête, mais ne dit rien. Il est vrai que si je faisais ça, je prenais un risque; celui de me faire arrêter. J'avais cependant très envie de savoir ce qu'ils préparaient. Ambre, toujours accroupie sous la fenêtre, attrapa ma main et essaya a nouveau de m'en dissuader. Une partie de moi savait qu'elle avait raison, mais un élan de curiosité me poussait vers l'extérieur. C'est un signe de main de la part de Hiro qui me décida. Alors je chaussai mes baskets et attrapai une veste que j'enfilai en enjambant le châssis, avant de m'asseoir sur le rebord de la fenêtre en cherchant le meilleur endroit pour me réceptionner. "Juste un étage, c'est trois fois rien" pensais je avant de m'élancer au dehors, dans l'air frais de la nuit. Je réprimai une plainte due à ma réception hasardeuse et rejoignis Hiro qui me faisait coucou.

"- Qu'est ce que tu fais là ?" demandai je

  Il ne me répondit pas, mais je voyais sur son sourire une lueur de moquerie, et son regard braqué sur mes cheveux ébouriffés. Je levai les yeux au ciel devant son rire narquois avant d'aplatir mes mèches rebelles du mieux que je le pouvais. Je répétai ma question:

"- Donc qu'est ce que vous fabriquez ici?

- On cueille des champignons!" Lança-t-il d'un ton joyeux et ironique.

 J'aimais bien Hiro, en partie pour son sens de l'humour, même s'il est parfois douteux, mais surtout pour sa bonne humeur permanente, et cette capacité à dédramatiser la situation. Bien qu'il soit d'un naturel à faire le pitre, il savait aussi se montrer sérieux quand les évènements l'exigent. Je répliquai alors à sa tirade:

Leur Jeu : SurvivreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant