Les Grands Virages

4.

Le casque lui gratte la tête, il fait froid et l'odeur des moteurs est étouffante. Elle n'a que sept ans et préférerait rentrer à la maison mais une fois le kart démarré il n'y a plus que la vitesse et la victoire qui comptent.
Elle fini sur le podium, ses parents sont là cette fois ci, fiers.

Célia revient au collège heureuse après avoir passé le week-end dans un championnat de Karting où elle a finit deuxième. Tout le monde ne parle que de l'anniversaire d'Heloïse, les gens racontent qu'il y avait de la bière et qu'ils ont dansé mais Célia ne peut pas comprendre, elle n'était pas là.

Pierre lui attrape la main et la retient, cachés derrière le grand sapin de l'internat. Il l'embrasse, remplaçant l'adrénaline des courses du week-end. Elle répond à son baiser. Il fait chaud, le bac approche.

Célia est sur le podium, le champagne lui brûle les yeux mais l'euphorie coupe la douleur. Son cœur explose de bonheur, elle part dans la cours des grands.

Tout ses souvenirs se bousculent dans sa tête et elle est obligée de relire la page devant elle. Tout les moments qui l'ont amené jusqu'ici se regroupent. Est-ce la bonne décision ? Est-ce le bon moment ?
Quatre hommes en costards la regardent et le stylo est lourd dans sa main. Célia se redresse en fixant attentivement le mur devant elle et se concentre sur le grésillement irrégulier des néons. L'idée de décevoir Pierre ou encore Alpine lui sert le ventre mais la peur du regret prend le dessus, Diego avait raison, elle ne laissera personne l'éloigner de son but, jamais. Célia lève la tête, un petit sourire sur les lèvres et sans vraiment regarder,
son stylo frôle le papier et son nom apparaît. Ça y est, elle s'en va pour de bon.
"Welcome to Redbull miss Weber !"

Les hommes lui sourient et lui sert la main. Les papiers sont repartis et après quelques dernières formalités la pièce est vidée. Célia se retrouve seule avec son avocat et Christian Horner, son futur patron.
"Je suis heureux de te voir dans notre équipe l'année prochaine, on va prendre le temps de mettre tout ça en place" Lui dit il avec son accent anglais parfaitement découpé et son sourire parfait. Célia se rappelle des blagues qu'elle faisait à Pierre pour lui remonter le moral, le comparant aux méchants dans James Bond. Ce méchant est maintenant son boss. "Ils vont tout faire pour t'éteindre" Les mots de Pierre lui reviennent et la peur remonte. Elle tente de se ressaisir et ne laisse rien montrer, ce n'est clairement pas le moment de paniquer.
"Nous pensons faire une annonce officielle dans un mois à peu près, en attendant rien ne doit sortir et surtout il va falloir faire profil bas pour ne pas attirer les foudres au moment de l'annonce. Le départ de Checo pour Alfa Romeo ne passera pas auprès de tout les fans donc essayons de faire au mieux". "C'est typiquement la phrase d'un méchant" se dit Célia et elle se frappe intérieurement de se faire peur toute seule. Elle acquiesce, tout va bien se passer.

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La semaine passe rapidement et le week-end de la course approche. Personne dans le garage ne parle du nouveau contrat de leur pilote, l'ambiance est bon enfant, même Fernando semble de bonne humeur malgré son résultat de la course précédente. Célia est appuyée contre le mur à l'extérieur appréciant le soleil d'automne, bientôt ils seront à l'autre bout du monde pour les prochaines courses qui s'annoncent épuisantes.
"T'as reçu mon GIF ?" Marin la coupe dans ses pensées.
"Ton quoi ?" "Mon GIF"
Elle rit.
"On dit un GIF". Marin la fixe perplexe. "Je suis sur qu'en France on prononce ça GIF"
"et je suis sure que non". Marin se retourne vers le garage. "Gilles ! Viens voir, comment tu prononces ça toi ?" Il s'éloigne, son téléphone à la main. Célia rit à nouveau et sort le sien, un message d'un numéro inconnu attire son attention. Elle décide de l'ouvrir et son cœur fait un bond, le monde autour d'elle devient silencieux.