1er décembre

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Good morning ! 

On entame ce calendrier de l'avent avec un (bon ok le seul) chapitre préparé voilà déjà quelques temps. 

J'espère qu'il vous plaira. 

Bonne lecture 

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La goutte d'or rouge glissa sur ses lèvres, lentement, puis disparut dans un coup de langue. L'extase monta avec les effluves qui se répandaient dans son palais. L'homme ferma les yeux et s'abandonna dans cette divine joie céleste. Il flottait sur des nuages vaporeux, moelleux à souhait, bercé par les chœurs d'anges dont les voix mélodieuses résonnaient autour de lui. Obscurius nageait dans le bonheur, il était au paradis. Il resserra les doigts et attira à nouveau à lui le poignet frêle et ensanglanté dont il s'abreuvait.

Voilà trois jours qu'il n'avait quitté le Scarlet rose, un bar lounge dissimulé dans le sous-sol d'un recoin de Manhattan, destination favorite d'une communauté, pour ne pas dire secte, victorienne-gothique-chic fondée deux siècles auparavant. Obscurius, en toute humilité, était le plus jeune fils de l'un des fondateurs de ce lieu au croisement entre mythologie, modernité, et phantasme. Humains et vampires se côtoyaient dans une douce euphorie chargée d'opium, de PVC et d'un catalogue de drogues à faire pâlir tous les rois des cartels. Repère des âmes perdues en quête d'une identité qu'un col à jabot, une paire de bottes d'équitation et un décor aussi sombre qu'élégant pouvaient apporter. Il y régnait un respect naturel, une acceptation d'autrui, à la fois précieux et originaux, que seule une poignée de chanceux découvrait. Ici les poignets s'offraient aux crocs, les lèvres aux bouches, et les narines s'imprégnaient de la plus douce des neiges.

— Si l'on doit me tuer, que mon heure sonne à l'instant et je serai en paix, murmura Obscurius en rejetant sa tête dans un coussin.

— Si l'on doit te tuer, alors que mon corps dardé d'un poignard soit ton ultime oreiller, lui répondit son goûter.

— Les dieux n'égalent pas la force de mon amour, épouse-moi ! s'exclama le vampire avant de reprendre une gorgée du breuvage chargé en opioïdes.

— Je le veux mon carnivore d'amour ! Fait de moi ton immortelle âme sœur.

Les vampires du club ne se droguaient jamais directement. Pour eux, pas de rail de coke, de seringues ou de pilule dans le verre. Ils étaient bien trop nobles pour s'abaisser à de si mortelles addictions. Cependant... Le sang des drogués... Obscurius, grâce à son goûter, avait une haleine à tuer un chien de la brigade des stups. Il avait perdu toute notion du temps et tout bon sens, mais il était heureux. Il se redressa et embrassa passionnément son goûter qui lui rendit sa fougue.

— Marions-nous ! Je t'offrirai l'immortalité et notre vie ne sera que joie et ces cachets roses que tu as pris tout à l'heure.

— Oui, filons à Vegas et demain nous serons unis devant Dieu pour l'éternité.

Etait-ce le nom du saint créateur ? L'effluve de la flatulence laissée par un passant ? Obscurius regagna un brin de lucidité. Non, il ne pouvait s'enfuir à Vegas, il existait des règles dans sa famille, le patriarche devait autoriser le mariage et, avec un peu de chance, les unirait lui-même.

— Non, nous devons aller voir mon bisaïeul.

— Ton quoi mon doux ?

— Mon arrière-grand-père, si je ne demande pas son autorisation, sa colère sera terrible.

— Cela ne peut pas être si horrible, lui fit gentiment remarquer son goûter tout en reprenant un biscuit magique.

Obscurius secoua la tête, si cela se pouvait. D'affreuses images tirées de son enfance se mélangèrent aux hallucinations qui remplissaient son cerveau de couleurs depuis un moment. Il annonça à son goûter qu'ils iraient rendre visite au bisaïeul dans les prochains jours, aucune minute n'était à perdre.

Quitter New-York ne les enchantait guère, le goûter s'y opposait farouchement, ne voulait rien savoir et sa fermeté s'accrut lorsqu'Obscurius annonça la destination : un petit village au nord de l'Angleterre, isolé, glacial, dans lequel le bisaïeul se rendait tous les ans pour les fêtes de fin d'année. Une dispute s'en suivit, le goûter refusait de laisser la tradition les obliger à parcourir un aussi long trajet pour finir perdus en Grande-Bretagne et obéir à un vampire aussi vieux que le monde. Il était certes effrayant, visiblement, mais de là à quitter la terre du rêve américain. Non, il n'en était pas question et rien de ce qu'Obscurius pourrait dire ne contrerait sa décision. Chose que le vampire prit à cœur de faire. Son bisaïeul était un monstre, un vrai, et il avait assez d'histoires pour le prouver.

— Lorsque je n'étais pas sage, mon père me racontait toujours que son grand-père avait un jour crucifié une vampire sur les remparts de son château et qu'elle y était encore. Imagine ta chair se détacher par lambeaux, ta peau cuire, brûler, pourrir sous des pluies diluviennes, geler en hiver. Imagine les oiseaux dévorer ton corps alors que tu es en vie.

— Oh mon dieu, s'horrifia le goûter. C'était vrai ? Ton bisaïeul a réellement crucifié un vampire ?

Obscurius sourit. Ils partiraient pour l'Angleterre dès leur sobriété retrouvée.

— Oh non, mon bisaïeul n'a jamais fait cela.

Son goûter favori soupira de soulagement, la fiction dépassait la réalité. Mais le vampire poursuivit.

— Son père en revanche...

Direction Greyhall. 



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Merci d'avoir lu ce chapitre ! 

Axel.

Un diable pour Noël - Avent 2021Où les histoires vivent. Découvrez maintenant