6. Ours grognon & Légendes

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Le lendemain matin, j’ai la surprise de ne pas trouver mes grands-mères dans la maison. Ces dernières ont dû partir. À la Réserve pour Aquene, et Kachina qui devait rester ici, a été appelée en milieu de nuit pour assurer une randonnée très matinale d’un groupe de touristes ayant réservé à la dernière minute sur Internet.
Leur mot m’attendant sur la table de la cuisine m’apprend donc que je suis seule jusqu’à onze heures du matin environ. Je prépare une tasse de café grâce à la machine expresso présente sur le plan de travail, à côté de la gazinière, et sors sur la terrasse profiter de l’assise moelleuse de la balancelle qui me fait de l’œil.
La journée s’annonce belle au vu du ciel bleu sans une seule trace de nuage. Je suis vite tentée de faire un footing à travers les bois, mais pas trop loin pour être sûre de ne risquer aucun danger. Après tout, Kachina et Aquene m’auraient déjà averti d’un potentiel danger s’il y en avait vraiment.
Les hurlements de loups de la veille trottent légèrement dans un coin de ma tête, mais je ne m’y attarde pas sous peine de tergiverser longuement sur tout ce qu’ils engendrent en moi, notamment, le retour de mes rêves d’enfance, qui, étonnement, se sont apaisés depuis mon départ pour cette ville.
J’ai pu comprendre, lors de mes discussions avec mes grands-mères, que Kachina arpentait sans cesse toutes les forêts avoisinantes, donc en partant de là, je sais que la nature, qui nous entoure, accueille les randonneurs sans problèmes et ne représente aucun risque pour quiconque souhaite la parcourir.
Je retourne à l’intérieur mettre une tenue adéquate pour courir. Une fois en legging, brassière sportive et chaussures de course, je farfouille dans le garage que je découvre derrière la porte à côté de la cheminée. Je déniche un petit sac idéal pour la randonnée et hausse un sourcil en remarquant une étagère contenant des bombes lacrymogène.
Kachina, étant guide touristique dans la Isha National Wildlife Refuge, est une habituée de la randonnée et son garage fourmille d’équipement pour son activité, mais je ne vois pas l’utilité de ces dernières. Cette petite bourgade perdue au milieu des montagnes est-elle dangereuse finalement ? En me rappelant la charmante ville paisible que j’ai traversé la veille, j’ai beaucoup de mal à y croire.
Je m’équipe donc de mon sac rempli d’une petite bouteille d’eau, d’une barre protéinée et, dans un haussement d’épaules, je glisse également une des fameuses bombes au poivre, en cas de pépin.

C’est avec joie que je m’engage sur la route à la sortie du chemin qui mène jusqu’au chalet et prends la direction de la INWR. Je passe devant le panneau de bois comme j’ai pu le voir la veille en arrivant, et continue ma course sans prêter attention aux inscriptions que contiennent quelques écriteaux plus petits que celui se trouvant à l’entrée.
Enhardie par ma course, je prends plaisir à fouler cette terre légèrement humide et brune. L’air embaume la forêt que j’inhale en de profondes respirations qui inondent mes poumons de cet air bienfaisant tout en gardant un bon rythme dans ma foulée. J’ai toujours aimé courir et suis plutôt douée  en athlétisme, d’ailleurs. Mais faire cette activité dans pareil décor est d’autant plus grisant.
Je parcours quelques kilomètres lorsqu’un mouvement sur ma droite attire mon attention. Je jette un coup d’œil et aperçois un type d’une cinquantaine d’années, mais je ne suis pas trop objective vu la distance qui nous sépare, me faire de grands signes. Je lui rends la pareille par politesse en lui retournant un coucou de la main. Cependant, ce dernier s’évertue à me faire de plus grands gestes faisant ralentir mon allure sous l’incompréhension.
Je fronce les sourcils et lui fais signe de mes mains que je ne comprends pas. À force de le voir faire son speech avec ses gestuelles incompréhensibles, je laisse tomber d’un revers de la main en reprenant un rythme soutenu.
L’instant d’après, il me semble entendre un son grave provenir dans mon dos, je tourne la tête tout en continuant de courir et crie d’effroi en apercevant un ours noir me poursuivre. Ce dernier trottine derrière moi en humant l’air de mon passage et je ne vois que sa truffe se tordre dans tous les sens et sa gueule ouverte quand il recommence à grogner.
Je hurle de terreur.

Isha (Sous Contrat D'édition "Bookmark" )Où les histoires vivent. Découvrez maintenant