Chapitre 1 : La solitude

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Solitude (n. f.) : 1. Situation de quelqu'un qui se trouve sans compagnie, séparé, momentanément ou durablement, de ses semblables. / 2. État d'une personne qui est isolée par manque d'amitié, d'amour, d'affection, de relations, par défaut de communication.

Taehyung rangeait les livres en silence.

Il était presque vingt heures, et sa dernière heure de travail touchait à sa fin. Un dernier tome neuf de glissé sur les étagères de la librairie, et un soupir las s'échappa de ses lèvres. Il dégrafa soigneusement son badge accroché à sa chemise, signe qu'une longue journée se terminait, et que le masque de l'employé pouvait être enlevé.

Le carton vide qui, un quart d'heure plus tôt, contenait encore une multitude de livres neufs atterrit près des poubelles à l'arrière du magasin. Taehyung s'empressa de refermer la porte pour empêcher la fraîcheur nocturne de s'engouffrer dans la petite boutique.

- Tu es encore là ? demanda une voix.
Taehyung fit volte-face pour tomber sur Seokjin, le gérant du magasin, et par conséquent, son patron.

- J'étais sur le départ, je sortais juste les cartons.

Les yeux de Seokjin descendirent sur son buste et il remarqua alors qu'il avait déjà ôté son badge.

- Ah, je vois. Bon, rentre bien alors.

Taehyung hocha la tête en souriant, avant de repasser de l'arrière-boutique à la grande pièce remplie d'étagères et de sortir.

La porte claqua derrière lui alors qu'il poussait un autre soupir. Dehors, les voitures passaient sans s'arrêter, les feux de circulation étaient pris dans leur danse interminable de couleurs différentes, et les fenêtres des maisons et appartements laissaient entrevoir la lumière artificielle dans laquelle baignaient leurs occupants. L'air était frais, et Taehyung frissonna un peu sous sa chemise. Alors il décida de se presser pour rentrer chez lui.

Le trajet n'était pas très long, la librairie n'étant qu'à quinze minutes à pied de là où il vivait avec ses parents. Le vent soufflait et décoiffait ses cheveux châtains qui étaient un peu trop longs, mais qu'il n'avait pas encore eu le temps de couper. Son quartier était tranquille. Les familles étaient toutes dans leurs maisons, en train de dîner, de regarder la télévision, ou peut-être juste en train de discuter et rire ensemble.

Sa maison à lui était au bout de la rue. Il entra sans toquer, referma la porte derrière lui et se déchaussa automatiquement, par réflexe.

Une voix lui parvint du salon.

- Tu es rentré, Taehyung ?

- Oui, maman !

Celle-ci apparut bien vite dans le champ de vision de son fils. Elle était presque entièrement engloutie par le grand pull qu'elle portait. Un pull que Taehyung reconnut comme celui de son père. Enfin, c'était un peu leur pull à tous les deux.

- Il y a de la nourriture pour toi dans le micro-ondes, chéri.

Il hocha la tête.

- Merci.

Alors il se dirigea vers la cuisine pendant que sa mère repartait vers le salon. Il lança le minuteur du micro-ondes puis s'installa à la table en silence. La cuisine de sa maison était petite mais confortable et chaleureuse, une impression renforcée par les meubles en bois qui prenaient la majorité de la place. Pourtant, ce soir, elle semblait cruellement vide. C'était malheureusement toujours le cas les soirs où il travaillait.

Le "bip" strident du micro-ondes le sortit de ses pensées et il sursauta légèrement.

Le bol de bibimbap préparé par sa mère sentait très bon et lui ouvrit un peu plus l'appétit. Alors il se mit à manger tranquillement, assis seul à la table qui pouvait accueillir six personnes. Il entendait le faible chuchotement de la télé qui lui parvenait du salon, et les commentaires de son père qui surgissaient de temps en temps, suivis d'un rire ou d'une réponse de sa mère.

Il était fatigué.

Une fois son bol fini, il le déposa dans l'évier et le lava immédiatement. Ensuite, il alla vers le salon.

- Alors, ta journée ? demanda son père.

- Oh, ça va. Un peu fatigante. La routine, quoi.

La lumière de la télé éclairait tout le petit salon plongé dans l'obscurité, projetant des nuances froides sur les murs, le petit canapé beige, et les visages de ses parents.

- Tu restes avec nous ? s'enquit cette fois-ci sa mère. Il y a un film qui va commencer.

Il y réfléchit quelques secondes.

- Je pense que je ferais mieux d'aller me coucher. J'ai une longue journée de cours demain.

Sa mère fit une petite moue déçue.

- Désolé, maman, dit-il alors en s'approchant d'elle pour la câliner. J'aurais bien aimé regarder le film avec vous mais je suis épuisé.

- Ce n'est pas grave, ce sera pour une autre fois.

Malgré ces mots, elle parut tout de même un peu peinée.

- Bonne nuit, mon chéri.

Elle déposa un tendre baiser sur sa joue.

Une main masculine se tendit et ébouriffa les cheveux de Taehyung, ce qui le fit faiblement glousser.

- Dors bien, fit alors son père.

D'un pas lourd, il monta les escaliers qui menaient à sa chambre et à la salle de bain. C'est dans cette pièce qu'il entra tout d'abord. Il n'avait ni la force ni l'énergie de prendre une douche, alors il se contenta de se brosser les dents et de laver son visage. Son reflet dans le miroir avait les traits quelque peu tirés, et ses paupières clignaient de façon paresseuse, signe que Morphée le guettait, quelque part.

Il fila vers sa chambre et s'engouffra sous sa couverture dès qu'il eut pénétré la pièce. Cela dit, malgré la fatigue, il ne s'endormit pas. Il fixa le plafond un bon moment, la tête trop pleine de pensées parasites. Ses études étaient compliquées. Ses journées étaient déjà longues rien qu'avec l'université, et c'était pire avec le travail juste après. Mais même si sa famille n'était pas miséreuse, elle ne roulait pas non plus sur l'or, alors il n'avait pas trop le choix.

Surtout, il ne voyait personne. Il n'avait pas le temps. Il avait un peu perdu contact avec ses amis du lycée, mais c'était parce qu'ils étaient tous débordés avec leurs emplois du temps chargés. Il n'avait pas vraiment beaucoup d'amis dans sa filière à la faculté, et il n'arrivait pas à savoir si c'était parce que personne ne venait vers lui ou parce qu'il n'allait vers personne. Peut-être un peu des deux. Il n'avait pas de vrais collègues, hormis son patron. Et ses longues journées engendraient son absence presque permanente de la maison familiale, alors il ne voyait pas vraiment ses parents non plus.

Un énième soupir s'échappa de ses lèvres. Il se retourna dans son lit et serra un oreiller dans ses bras. Il devait dormir.

***

Notes de l'autrice : fiction originalement publiée dans le cadre de la Fest organisée par BTSFicFestfr, disponible sur archiveofourown.org. Merci aux admins d'avoir organisé cette Fest et merci à ma merveilleuse bêta-lectrice @/Bangtear7 (sur Twitter) pour son travail incroyable et ses conseils tout au long de l'écriture ♡

「La Légende du fil rouge」❈ ᴠᴍɪɴOù les histoires vivent. Découvrez maintenant