Chapitre 2 : Le manque

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    Manque (n. m.) : 1. Fait de manquer, absence ou grave insuffisance d'une chose nécessaire. / 2. Absence péniblement ressentie de quelqu'un, de quelque chose, qui laisse une impression de vide ou d'incomplétude.

    Ce matin-là, Jimin se réveilla en pleurant. Il était sûr d'avoir fait un mauvais rêve, mais il n'arrivait pas à s'en rappeler. Le miroir fixé au mur en face de son lit lui renvoya une image triste, qui contrastait fortement avec la lumière du soleil qui perçait ses rideaux beiges.

    Ses jolies mains vinrent sécher ses larmes avec précaution, même s'il n'arrivait pas à s'arrêter de pleurer. Que se passait-il ? Son cauchemar avait-il été si horrible ? Il se recroquevilla sur lui-même pour se calmer. Cela lui donnait l'impression qu'on lui faisait un câlin, et ça le calmait toujours. C'était une technique qu'il avait apprise par empirisme, il ne comprenait rien à ce phénomène. Il était déjà incapable de savoir pourquoi il pleurait.

    Après un instant, sa respiration s'apaisa et avec elle, ses sanglots. Il resta immobile encore quelques minutes, avant de finalement se lever.

    Sa chambre était grande, spacieuse, pleine de lumière. Vide. Son lit trônait au beau milieu de la pièce, en face d'une jolie commode de bois au-dessus de laquelle figurait un large miroir rectangulaire au cadre doré.

    Il ouvrit lentement la porte de sa chambre pour ne pas faire de bruit. Il était sûr qu'il était encore assez tôt, et si c'était bien le cas, ses parents dormaient encore. Il déboucha sur le salon, et sur la pointe des pieds, se dirigea vers la cuisine. Il faisait beau, et les rayons du soleil se répercutaient sur les grands murs pâles.

    Le silence qui régnait dans le grand salon aurait pu lui être inhabituel, mais c'était bien commun pour lui de se lever avant tout le monde ; ou alors, d'aller se coucher après tout le monde. C'était toujours un peu étrange et dérangeant, cette absence de bruit. Ça lui donnait l'impression d'être seul à la maison, et il n'aimait pas toujours ça.

    Plus largement, il avait souvent l'impression d'être seul un peu partout : chez lui, dans les bus, à l'université. Et pourtant, il était en général plutôt doué pour engager des conversations et se faire des amis, mais voilà, ce n'étaient pas souvent des amis bien proches et sur qui il savait qu'il pouvait toujours compter. Ce n'était pas non plus le genre d'amis avec qui il partageait tout ce qu'il aimait, ni le côté le plus sincère de sa personnalité. Alors se sentir seul lui paraissait presque normal.

    Bien installé dans le canapé, il dégustait son petit-déjeuner en rêvassant. Ses cauchemars dont il n'avait jamais de clairs souvenirs perturbaient énormément son esprit, parce qu'il ne savait ni ce qui les provoquait, ni pourquoi il finissait toujours par en pleurer au réveil. Une chose était sûre, c'était un phénomène récent chez lui.

    Parfois, il avait vaguement l'impression d'avoir besoin de quelque chose, mais il n'arrivait pas à correctement mettre le doigt dessus. Et puis ce n'était qu'une impression floue, alors ce n'était sans doute pas important.

    Il posa lentement son bol sur la table basse, se dirigeant vers sa chambre à pas de loup pour récupérer son téléphone et ses écouteurs. Il avait besoin de musique pour faire taire le silence assourdissant. Lançant sa playlist préférée sur mode aléatoire, il vint se rasseoir pour finir de manger.

    Et puis le temps passa, et son bol atterrit dans l'évier. Blotti dans le canapé, recroquevillé sur lui-même, il ferma les yeux et se laissa porter par la musique qui résonnait dans ses oreilles. La journée promettait d'être longue. À travers le brouillard de ses pensées, il entendit une porte s'ouvrir, et alors il comprit que son temps de solitude dans le salon touchait à sa fin. Toutefois, il ne bougea pas d'un iota, jusqu'au moment où une main tendre ébouriffa ses cheveux. Ses yeux s'ouvrirent et il dut pivoter un peu pour trouver le visage de sa mère. Il baissa le volume de sa musique.

    — Bonjour mon trésor.

    Il ne répondit que par un sourire, alors elle ajouta :

    — Tu fais déjà une sieste ? Eh bah.

    Il rigola un peu.

    — Le réveil est compliqué, maman.

    — Je vois ça.

    Et l'ambiance se fit plus légère.

    Jimin se redressa dans le sofa pour l'observer s'activer dans la cuisine, un fin sourire sur les lèvres. Sa mère était un petit soleil toujours empli de bonne humeur et d'énergie. Il adorait sa présence. Quand il était enfant, il était exactement comme elle, mais le temps qui passe n'épargne personne, alors il avait un peu changé. En revanche, leur complicité était restée la même, à son plus grand bonheur.

    Elle chantonnait, alors Jimin coupa complètement la musique qui jouait dans ses écouteurs.

    — Bien dormi, mon ange ?

    Il hésita un instant.

    — Moui... mais bon j'ai connu mieux.

    — Ah ?

    — J'étais un peu agité.

    Sa mère hocha la tête pour montrer sa compréhension et ne posa pas plus de questions. Elle vint ensuite s'asseoir près de lui, posant sa nourriture sur la table basse. Et puis la discussion prit la direction des futilités, de la pluie et du beau temps. À aucun moment Jimin ne mentionna ses cauchemars. Ce n'était pas important.

    Son père finit par les rejoindre, et la journée prit son cours routinier. Et Jimin finit par rester dans sa chambre la majeure partie du temps, rêvassant en écoutant de la musique.

「La Légende du fil rouge」❈ ᴠᴍɪɴOù les histoires vivent. Découvrez maintenant