-Chapitre 1-

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               Deux mois, 9 semaines, 65 jours, 1 632 heures, 97 920 minutes, et des poussières de secondes plus tard, il rentrait de l'école, le menton levé vers le ciel en passant dans son jardin, il répétait le même rituel en revenant des cours, descendant de la moto de Sunghoon, le saluant jusqu'à ce qu'il démarre et pénétrant dans sa propriété quand sa bécane disparaissait au bout de la rue. Qu'il pleuve, neige, vente jusqu'à lui en glacer le sang, il ne loupait jamais ce petit regard vers les nuages ou le ciel bleu où habitait son ange. C'était comme un "je suis rentré !" où la réponse ne venait jamais. Il se refusait de l'oublier, de passer à autre chose, de même penser qu'il ne reviendrait pas le voir, il voulait garder espoir. Sa rupture avec lui avait été très douloureuse, il pleurait encore parfois dans son jardin en le saluant silencieusement, et elle était encore vive. Pour lui, il était impossible de lui dire au revoir ainsi, il le savait toujours vivant quelque part là-bas. Alors peut-être qu'il l'avait laissé sans un mot, avec une image désastreuse avant de disparaitre mais ce n'était pas ce souvenir qu'il gardait quand il pensait à lui, c'était toujours une plus jolie, dans l'herbe ou quelque part où ils étaient seuls, que leurs doigts se frôlaient ou s'entrelaçaient. Il y avait toujours ce petit doute au fond de lui qui se demandait si ça valait vraiment le coup de vivre comme ça, en pensant à quelqu'un qui ne reviendrait jamais, qui l'avait sans doute rayé de sa mémoire ou avait honte de ce qu'ils étaient avant, tous les deux, mais à lui ça lui faisait du bien de penser qu'il avait rythmé sa vie de dépression d'une manière inattendue et pleines de surprises. Il n'allait pas se mentir, il lui manquait toujours plus chaque jour, il y avait constamment ce froid et ce trou dans sa cage thoracique, il ne préparait plus ces fameuses lasagnes qu'il avait savouré, il ne parlait plus de ses projets d'avenir à succès, de vivre à l'étranger. Il se taisait sur tous ça, et sur plus, parce qu'il ne voulait en parler qu'à lui. Il n'avait pas postulé dans cette fameuse université, celle de ses rêves, à l'autre bout du monde qui aurait pu lui donner un dossier en béton et des expériences de dingue, parce que ça n'aurait finalement aucune saveur maintenant. Il n'avait demandé qu'à deux université dans le pays, dont une tout près du lycée car, il ne savait jamais, il pourrait ré-apparaître un jour près de l'endroit où ils s'étaient parlé pour la première fois, sourient pour la première fois, qu'ils avaient parlé roman et romance. Jungwon souriait chaque fois nostalgiquement en repensant à cette fois où il avait porté son courage pour lui indiquer la bonne page la première fois qu'il s'était présenté en classe, s'asseyant juste devant lui, tout perdu dans un groupe de personne qui le regardaient comme une bête curieuse qui ne savaient pas trop comment ils allaient passés l'année avec un gars dont il ne savait strictement rien et qui ne parlait pas beaucoup. Jungwon n'était pas du genre à entreprendre beaucoup de choses dans la vie, surtout avec les autres. Il ne parlait pas littérature avec ses camarades ni même Sunghoon et pourtant il était parti recommandé à Heeseung un livre d'un amour impossible et encore maintenant il se demandait ce qui lui était passé par la tête à ce moment-là. Il s'était motivé toute la soirée avant d'aller l'aborder pour lui demander s'il voulait sortir la première fois avec lui, mais Jake avait tout gâcher. Tant pis, il avait quand même réussi à se retrouver seul avec lui. La première fois qu'il avait enfin réussi à lui faire comprendre qu'il voulait aller plus loin qu'une amitié plus ou moins ambiguë avec lui aussi, il rougissait chaque fois qu'il y repensait. Toutes ses premières fois, sauf le premier bisou, avaient été avec lui et il n'avait pas une once de regret. Certes lui avait-il donné son premier vrai baiser mais ses lèvres avaient déjà été volé par un autre.
             Il ouvrit la porte de sa maison, déposant son sac dans l'entrée pour se déshabiller de sa veste en jean noir que Sunghoon lui avait offert récemment pour fêter ses excellentes notes à l'examin blanc.

"- Ah ! Woonie tu es déjà là !, s'exclama sa tante en venant à se rencontre, l'embrassant sur la joue pendant son accolade."

            Elle était parfaitement au courant de la disparition soudaine du garçon et avait prit cette habitude de lui donner toujours plus d'amour tactile en autre en ébouriffant ses cheveux ou l'embrassant sur le front ou la joue lorsqu'il revenait des cours, quand elle n'était pas en déplacement bien sûr. Et il ne refusait plus ses contacts, il se ré-ouvrait à ceux-ci avec ses proches et ça lui faisait du bien. Il ne se sentait plus vraiment seul, il se rendait compte de l'importance de la famille ou de ses amis dans ce genre de situation. Bien que tante Mi ait maudit Heeseung d'être parti sans un mot, elle ne lui avait souhaité aucun mal, parce qu'il avait énormément aidé Jungwon. Elle s'était quand même étonné quand il refusait de se re-teindre les cheveux en châtain mais finissait par comprendre pourquoi il ne le faisait plus.

Déchu   -- HeewonOù les histoires vivent. Découvrez maintenant