xv. avant // july

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Tell me somethin' girl
Dis-moi quelque chose
Are you happy in this modern world?
Es-tu heureuse dans ce monde moderne ?
Or do you need more?
Ou as-tu besoin de plus ?
Is there somethin' else you’re searchin' for?
Il y a-t-il autre chose que tu recherches ?

~

Main dans la main avec Andrew, nous nous promenions le long des rives du lac. Le vent d'hiver fouettait nos visages, emmêlaient mes cheveux roux, nous enveloppaient d'un cocon de froideur, parfaite allégorie de notre attitude l'un envers l'autre. Mais on essayait, c'est déjà ça.

- Tu veux qu'on voit ta famille pour Noël ? je lui demande, histoire de faire la conversation.

Tout à coup, il s'arrêta brutalement, sa paume contre la mienne me coupant dans mon élan et, par énergie cinétique, m'attirant violement en arrière. Son visage exprimait la même amertume que si je l'avais giflé, et mon estomac s'est tordu à cette vision.

- Et encore devoir sentir leurs regards accusateurs sur moi, parce qu'ils n'ont toujours pas pu assister à une certaine cérémonie de mariage ?

Je soupirai. Pourquoi, pourquoi, pourquoi, faut-il qu'il la ramène toujours à ça.

- Andrew, je tente juste d'être conciliante, tu ne devrais pas t'inquiéter de leur opinion de toi, puisque c'est moi la fautive dans cette histoire.

J'ai failli ajouter "vous me l'avez tous bien assez fait sentir", mais je me suis retenue. Comparé à d'habitude, nous étions dans un état absolument paisible, je n'allais encore pas pousser le bouchon trop loin et encore faire tout dégénérer.

- Désolé, répète-t-il.

Ce petit mot n'arrangeait en rien ma mauvaise humeur, mais il me fit immédiatement me remercier intérieurement de ne pas avoir envenimé les choses avec ma fierté. Désolé. Son refrain du moment. Le même que celui qu'il m'a servie l'autre soir quand je suis rentrée de mon escapade avec Kendra et Evan. D'ailleurs, depuis une semaine que ça s'était passé je n'avais revu ni l'un, ni l'autre, avec à peine quelques messages de mon amie. Mais bon, je savais qu'elle n'était pas très férue de conversations virtuelles, alors rien d'exceptionnel. Je soufflai :

- C'est rien.

Non, ça ne l'est pas. Mais comment lui exprimer ça sans qu'il pense encore que je l'accusais ou le jugeais ?

Je réfléchis un peu, penchant le pour et le contre. Mais si je voulais que ça marche, il allait falloir que j'y mette du mien.

- Tu sais, je pense vraiment qu'on devrait y aller. Ils le prendraient mal si on leur faussait compagnie en cassant l'habitude.

- Parce que tu crois vraiment que tu vas réussir à me faire gober que tu as envie de passer encore toute une journée dans cet univers de convenances et de traditions ?

Pas vraiment, non. Mais comment ne pouvait-il pas voir les sacrifices que j'étais capable de faire pour lui?

- Je peux bien y arriver, pour toi. Tout ce que je peux faire pour te faire plaisir, je le fais, dans la mesure du possible. Faut pas croire.

À son froncement de sourcil, je vis bien qu'il avait décelé le sous-entendu. Il détourna les yeux, préférant sans doute ne pas avoir à répondre. Pourtant, moi, j'aurais donné n'importe quoi juste pour qu'il me dise : "ce n'est pas ta faute, je comprends, tu n'as rien à te reprocher." Au lieu de ça, il laissa ma main, lâchement.

- Ne remettons pas le sujet sur le tapis, fut tout ce dont j'eus le droit. Je ne suis pas sûr que ça soit une bonne idée.

Je résistai à l'envie prenante de me frapper le front avec ma paume.

malinconia estiva - mélancolie d'été Où les histoires vivent. Découvrez maintenant