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Ce soir, le cliquetis de la clé dans la serrure résonne encore de toute sa solitude et, en poussant la porte de son appartement du troisième étage, Izuku tombe son masque en soupirant de détresse. 

La main encore refermée sur la poignée, il stoppe ses pas sur le tapis de l'entrée pour prendre le temps d'observer le salon qui se dessine devant lui.
Rien ne change ici, jour après jour, les murs toujours aussi froids entourent un foyer toujours aussi vide, et la table basse trône toute seule devant le canapé comme deux survivants de l'enfer.
La télé éteinte pour témoin silencieux, la lumière de fin de journée se couche sur le carrelage pour éclairer un tant soit peu la maigre décoration accrochée ici et là, quelques rayons sauvages venant se perdre jusque sous le buffet. 

Comme à chaque fois, ses émotions se mélangent quand il s'attarde sur son propre chez lui, alors que l'ambiance de cet endroit lui donne des frissons, autant qu'il ravive les souvenirs du passé et la brûlure des regrets. 

Ses paupières tressautent, une marée acide remonte son œsophage, rappelant la nausée perpétuelle que lui inspire cet appartement, et un nœud se forme dans sa gorge comme une envie soudaine de se mettre à hurler son désarroi. 
Parfois, s'il s'écoutait, il se mettrait à genoux sur le carrelage, et appellerait à l'aide jusqu'à ce qu'un voisin vienne le chercher, n'importe qui, peu importe, du moment qu'il peut pleurer les déchirures de sa poitrine sur une épaule quelconque. 

_ Je suis rentré. souffle t-il doucement en refermant derrière lui. 

Puis, s'avançant de quelques pas, un mince sourire s'étire à ses lèvres quand il s'accroupit sur le sol pour recevoir la visite de bienvenue de son chat. 
Visiblement tout juste sorti d'un sommeil confortable, le petit animal étire son dos en baillant de toutes ses forces avant de venir se frotter au genou de son propriétaire, balançant sa queue à droite et à gauche en ronronnant bruyamment. 
Quelques longs poils gris viennent se coller au jean d'Izuku et, en prenant son petit compagnon dans ses bras, il se redresse sur ses jambes pour mieux le câliner. 

Son chat dans ses bras, il entre complètement dans la pièce principale pour rejoindre l'assise du canapé et s'y installer, déposant son téléphone sur la mousse avant de caresser le dos de son animal en le regardant fermer les yeux de confort. 
Blottit contre le ventre de son maitre, Milo profite de son affection pour se rendormir sur ses jambes, et Izuku le regarde en silence, s'accrochant à sa petite présence pour oublier la solitude qui baigne ses murs. 

Pourtant, en sa qualité de maniaque, il pensait ne jamais accepter les allées et venues d'un animal dans son quotidien, les poils piqués dans les tissus, les jouets roulants sous les meubles et la corvée d'une litière à changer. 

Mais, il doit le reconnaitre, l'arrivée de Milo dans sa vie l'a souvent aidé à supporter les fins de journées, quand le soleil se couche sur l'appartement, amplifiant les vibrations lourdes du silence assourdissant. 
Depuis un peu plus de six mois, Milo le maintien en vie sans s'en rendre compte, à la force de ses ronronnements quand il vient se coucher sur son ventre pendant ses longues nuits d'insomnie. 
Souvent, pour retenir une tempête de larmes menaçant de s'échouer sur son visage, il apaise son cœur en s'asseyant par terre, en tailleur, pour y faire rouler une petite balle et jouer avec lui. 
Sur ses mains, quelques marques de griffures témoignent du manque de délicatesse de l'animal quand il s'emporte un peu trop dans son amusement, mais Izuku ne lui en veut pas. 

_ Pardon mon chaton. s'excuse t-il en déplaçant le chat endormi sur un coussin à sa droite. 

Bien à l'aise dans son rêve, il secoue à peine une oreille sans ouvrir les yeux, et Izuku sourit en le regardant se remette en boule sur son lit improvisé. 
Son estomac gronde quand il se redresse sur ses jambes en passant sa main dans ses cheveux, et la faim qui tiraille doucement son ventre force une grimace à son visage alors qu'il s'éloigne vers la salle de bain. 
Comme toujours, il attendra que ses boyaux lui fassent mal avant de se décider à entrer dans sa cuisine pour s'y préparer quelque chose. 
Parce qu'il déteste cette pièce et les images qui y sont rattachées. 

Breαthe meOù les histoires vivent. Découvrez maintenant