Chapitre 12

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Trois ans plus tôt

En sortant de chez mes parents, Félix bombait le torse, fier à outrance du repas que nous avions partagé avec Fanny et mes parents. Ce n'était pas la première fois que nous passions du temps tous ensemble, mais aujourd'hui, nous leur avions annoncés que non, nous n'étions pas que des amis proches. Je n'avais pas eu peur de leur réaction, ma famille était au fait de mon orientation sexuelle depuis mon adolescence. À défaut de pourvoir dévoiler la moindre parcelle de mes goûts avec eux, je leur avais exprimé le maximum qu'ils pouvaient entendre et accepter.

Dans la voiture, je m'installai côté passager, puis me retournai pour attraper un sac en papier cartonné, ce qui fit soupirer mon amant.

— T'en as encore acheté ? me demanda-t-il d'un ton emprunt de fatigue.

Mes sourcils se froncèrent imperceptiblement, l'espace d'une toute petite seconde avant de s'élever, affichant mon étonnement.

— Oui. Mais...

— Faudrait que t'arrête, me coupa-t-il d'un ton abrupt, ne laissant aucune place à la discussion que j'aurais voulu instaurer. Les enfantillages, ça va deux secondes. À partir de maintenant, tu t'habilleras comme un homme. Je vais te commander des boxers. J'en ai marre que tu portes ce genre de chose. C'est dégradant, autant pour toi que pour moi.

Mes doigts s'agrippèrent aux petites anses en cartons en même temps que des milliards de questions assaillaient mon cerveau englué dans une incompréhension teintée de gêne.

— Mais j'aime porter ces dessous.

Un nouveau soupir las répondit à ma maigre défense.

— Oui de temps en temps c'est sympa. Mais je suis gay, je veux pas vivre avec une femme.

Sa phrase me fit l'effet d'une gifle, cinglante, humiliante. Je me rembrunis inexorablement.

— Je ne suis pas une femme !

— Alors tâche d'arrêter de porter leurs sous-vêtements. Tu sais, t'es pas le genre de gay efféminé qui se balade la main en l'air et en roulant du cul. Encore si t'avais l'air d'un travelo, j'aurais compris, mais là, c'est juste bizarre.

Mon cœur s'effrita en se compressant trop fort. C'était la première fois qu'il me disait ces choses ignobles. Je croyais qu'il m'acceptait, qu'il me soutenait, mais à voir son comportement et ses mots à l'instant, ce n'était pas le cas. Sa main caressa l'arrière de ma tête à un feu rouge alors que je gardais ma vision fixée sur le petit sac.

— Je te dis ça parce que je t'aime, Ethan. Tu sais bien qu'il faut grandir et te conduire comme un homme. Je ne veux pas passer ma vie avec un gars qui se déguise et qui cache ça tous les jours sous ses vêtements. C'est la honte.

Mes épaules tressaillirent pendant que je retenais difficilement des larmes. Mes poings se fermèrent, blessant mes paumes et je baissai la tête, comprenant ce qu'il me commandait implicitement de faire.

— En arrivant on jettera tout et tu porteras mes boxers en attendant les tiens.

Je ne répondis pas. Je n'aurais pas été capable de contenir ma détresse. Je m'étais gravement fourvoyé. Il ne m'aimait pas, il ne me comprenait pas, pire, il avait honte de moi, de ce qui me rendait heureux.

Nous arrivâmes chez nous, au terme de la demi-heure la plus longue de ma vie dans cette voiture où j'avais eu l'impression d'étouffer une bonne dizaine de fois. Gravir les marches jusqu'au second fut une telle épreuve que mes jambes en compote menaçaient de se dérober sous mon poids. Je me voyais avancer vers la guillotine que j'avais réussi à éviter durant des années. Celle de la honte, du rejet, du dégoût. Il ouvrit la porte et plaça une main dans mon dos qui se voulut tendre, pourtant, je m'écartai un peu violemment.

Panties for all [MxM] [Terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant