L'héritage de Doanac

Chapitre 2-2

Soudain, un groupe d'une vingtaine de jeunes enfants sortirent du camp et coururent dans leur direction. La première, une fillette de moins de huit ans arriva à leur hauteur. Elle était la plus âgée du groupe. Avec plusieurs autres enfants, ils avaient tous des petits paquets dans les mains. La fillette s'adressa timidement à Enora et à Daï.

- C'est vous que Shenkeol a envoyé pour nous aider ?

C'était plus une affirmation qu'une question, et Enora lui répondit en s'accroupissant devant elle pour se placer à sa hauteur. Elle avait le nez et les joues rosies par le froid. Ses petites mains tremblantes serraient le paquet contre elle, comme s'il s'agissait d'un trésor.

- Oui ! C'est bien nous !

A ces mots, le visage de la fillette s'éclaira et elle tendit son précieux paquet à Enora. Les autres enfants se rassemblèrent autour des deux agents de l'Alliance, sans les lâcher du regard. Et leurs regards étaient remplis de curiosité et d'admiration.

- C'est pour vous ! Maman l'a fait lorsqu'on a appris votre arrivée !

La jeune femme ne s'était pas encore saisie du paquet offert avec enthousiasme que, déjà, ses petits camarades se bousculaient pour lui offrir, tour à tour, le leur. Un garçon tira doucement sur le pan du manteau de Daï. Il s'accroupit lui aussi à son niveau et l'enfant lui tendit alors son présent.

Enora prit en premier le cadeau de la jeune ambassadrice du groupe. En l'ouvrant, elle y découvrit une dizaine de petits gâteaux ronds. A cet instant, son cœur se serra et elle se mit à détailler plus attentivement chaque enfant. Elle fut alors frappée en constatant ce qu'elle n'avait pas remarqué dès le début de leur rencontre. Certes, les fillettes portaient leurs cheveux savamment nattés et les garçonnets avaient le visage propre. Malheureusement, leurs vêtements révélaient toute l'ampleur de leur misère. Aucun d'eux ne portaient de gants. Et, pire encore, leurs vêtements n'étaient pas du tout adaptés au rude climat des Plateaux Arides. Ils semblaient confectionnés en lin ou en coton. Peu d'entre eux portaient des lainages. Leur teint halé montrait bien qu'ils étaient beaucoup plus habitués au climat chaud des plaines du sud. En arrivant dans cette contrée, leurs parents, démunis, n'avaient pas eu les ressources suffisantes pour leur offrir de chauds vêtements. A l'évidence, ils avaient sacrifié les leurs comme en témoignaient les tuniques et surcots arborés par les enfants au-dessus de leurs propres effets. Et pourtant, en dépit de leurs faibles moyens et de leurs maigres provisions, ils avaient consenti à ce sacrifice et avaient élaboré des présents à leur intention. Enora caressa tendrement les cheveux de la fillette.

- Merci beaucoup ! Dit-elle, émue, ils ont l'air délicieux.

La fillette lui adressa un sourire radieux, avec le sentiment du devoir accompli. Les deux jeunes gens déballèrent les paquets qu'on leur avait présentés : Ils contenaient du pain, du fromage, des fruits secs, mais également des rubans blancs et des fleurs façonnées avec des chutes de tissus blanc. L'une des petites filles prit l'initiative de mêler à la chevelure d'Enora l'une des fleurs qu'elle avait elle-même façonnée.

- Tu es jolie, lança-t-elle spontanément, tu ressembles à une princesse !

La jeune femme lui sourit affectueusement. C'est alors qu'elle sentit Daï lui prendre la main. Ces gens avaient tant perdu et pourtant ils étaient prêts à donner tellement. Daï échangea un bref regard avec elle. Il était déterminé.

- Nous ne les abandonnerons pas ! Assura-t-il.

Elle serra la main de son compagnon.

- Nous ne les abandonnerons pas, répéta-t-elle.