Chapitre 4-2

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Elouan acquiesça silencieusement et obéit, abandonnant sa tante, toute à sa préparation, dans la cuisine. Elle se dirigea vers la pièce principale. Il fit volte-face et s'enfonça dans le couloir pour rejoindre sa chambre. Le lit était fait et de petits baluchons de fleurs séchées et odorantes avaient été déposés sur celui-ci. Comme à son habitude, Dellwina avait rangé sa chambre en son absence. Elle profitait toujours de cette occasion pour vérifier que le garçon n'y cache rien qu'elle aurait désapprouvé.

Il déposa ses affaires sur le coffre près de son lit et chercha le flacon d'huiles parfumées qu'il avait acheté à Mordez. La précieuse fiole en main, il la considéra un moment avec tristesse, assis sur son lit, et soupira. Pour la première fois, il avait décidé d'offrir un cadeau à sa tante. Et à présent, le ressentiment lui faisait presque regretter sa générosité.

Après ces cinq ans passés, Dellwina n'arrivait toujours pas à se faire au climat et à la vie dans le centre. Bien sûr, vivre ici avait quelques avantages. En fuyant leur contrée, Hoel avait décidé d'installer sa famille sur les terres de ses grands-parents et entreprit de restaurer la vieille bâtisse. Presque antique, ses dimensions imposantes offraient aux deux enfants leur propre chambre. Leurs moutons disposaient également de bien plus d'emplacement pour la pâture sans devoir les conduire trop loin. Son oncle avait reconstruit le four à céramique que son grand-père utilisait jadis et il commençait à produire ses propres poteries pour les vendre. Au regard de ses activités de pêche, c'était un grand changement pour lui. En définitive, sa nouvelle situation lui convenait très bien et lui donnait l'occasion de mettre à profit l'enseignement dispensé par son père. Cependant, après ce brusque changement de vie, Elouan avait constamment la pénible impression que sa tante lui en faisait le reproche. Sans nul doute, sa présence les avait contraints à quitter le sud...

Elouan soupira une nouvelle fois. Il enveloppa le flacon dans un morceau de tissu et le glissa dans sa poche. En rejoignant sa tante, il passa devant la chambre de sa cousine. Par la porte laissée ouverte, il découvrit qu'elle était vide de son occupante. Elouan retrouva Dellwina occupée à servir le thé. Il s'installa face à elle et constata avec soulagement son expression détendue.

- As-tu fait bon voyage ? demanda-t-elle en lui offrant une tasse de thé.

- Oui... merci...

- Tu as dû te faire surprendre par la neige, où as-tu passé tes nuits ?

- Pour l'aller, je n'ai logé qu'une seule nuit dans une auberge, Aux Quatre Chemins à Galdi. Pour le retour j'ai voyagé avec une caravane de marchands, comme ça, j'ai pu rentrer plus vite.

- Bien, et tu n'as pas eu de problème ? Personne ne t'a posé de question ?

- Non.

Elouan but une gorgée de son infusion avant de demander :

- Hoel et Theona ne sont pas là ?

- Hoel est parti tôt dans la matinée pour Illess livrer des poteries. Il sera bientôt de retour et ta cousine doit certainement être avec les bêtes. Enfin ! Si tout s'est bien passé, tant mieux. Hoel te posera d'autres questions ce soir. La neige est arrivée, tu ne redescendras plus dans le sud avant un moment et dans un sens, c'est une bonne chose. Les rumeurs qui courent sur le sud font craindre des dangers. Il vaut mieux t'en tenir éloigner.

- J'ai discuté avec des marchands : le commerce avec le sud des Pleines Fluviales a, quasiment, été interrompu. Peu de marchandises remonte vers le nord.

- Comment ? S'étonna Dellwina.

Soudain la porte d'entrée claqua et une fillette de dix ans apparut dans l'encadrement, enveloppée de plaids en laine qu'elle laissa choir avec négligence sur le banc près de l'entrée. Tandis qu'elle se débarrassait de son manteau, elle croisa le regard d'Elouan. Son visage s'illumina instantanément.

L'héritage de DoanacOù les histoires vivent. Découvrez maintenant