Chapitre 4-1

23 3 0
                                    

"Défiant les risques et me reposant sur la volonté de Wieg Baloc'hant, je me suis rendue sur le champ de bataille pour voir de mes yeux ce qu'il était impossible pour certains de raconter.

En tant qu'historiens de la Chambre des Sages, nous avons un devoir de mémoire. Nous devons coucher sur le papier les événements qui se passent ici.

Mais, comment décrire avec justesse ce que j'ai vu et le sentiment d'impuissance qui m'a envahi en voyant ces champs de tombes à l'extérieur des villes et partout où ils étaient passés ?"

Notes d'un historien de la Chambre des Sages – Chambre des Sages

Chap. 4

Ce n'est que tôt dans la matinée qu'Elouan trouva, pour quelques heures seulement, le sommeil, avant d'être réveillé par les premiers rayons du soleil. Après un bref petit-déjeuner, il quitta la demeure familiale en compagnie de la marchande d'huiles et de son père.

La caravane partirait dans moins d'une heure. Cela lui laissait juste assez de temps pour rendre visite au cartographe de la ville. Elouan lui acheta la plus grande carte qu'il possédait. Elle représentait la Tobrea dans son ensemble et les frontières des trois royaumes étaient tracées. Relativement bien détaillée, elle mentionnait les principales villes et lieux d'échanges. Elouan se félicita d'avoir trouvé une carte avec des dimensions telles qu'elles lui permettraient d'étudier et de marquer ses trajets plus facilement.

Pendant que le père de la jeune fille vérifiait si tous ses paquets se trouvaient bien en place, Olva resta avec Elouan. Le garçon monta à l'arrière d'un des chariots et elle lui tendit un sac en toile de lin.

- Tiens, pour le voyage ! Il devrait y avoir assez de provisions jusqu'à ton arrivée. Enfin, si tu es raisonnable bien sûr, ajouta-t-elle en souriant.

Elouan le récupéra et le glissa dans une de ses besaces.

- Je le suis, ne t'inquiète pas ! Et tu remercieras ta mère pour moi.

Elle acquiesça d'un autre sourire.

Combien de fois avaient-ils déjà échangé ces simples mots avant son départ ? Elouan ne les comptait plus. Pourtant, cette fois, il éprouvait un étrange sentiment. Comme si ces 'au revoir' étaient les derniers. Olva resta silencieuse un moment à observer les marchants chargeant les chariots et donnant leurs ordres.

- Si un jour tu décides de t'installer ici, dis-le-moi, dit-elle enfin. Ma famille s'arrangera pour t'aider.

Le regard de la jeune fille sur Elouan devint insistant.

- Si tu n'as pas envie de parler de toi, de ce qui te tourmente et que j'ignore, nous ne poserons pas de questions.

Elle fit un pas en avant pour s'approcher de lui. Elle tendit les mains, les posa doucement autour de la tête d'Elouan coiffé de son habituel capuchon et appuya son front contre le sien. Il la laissa faire. Il émanait d'elle une douce odeur d'herbes sauvages, lui rappelant sa mère et ses tendres étreintes.

- Elouan, jeune tanneur des montagnes de Forgat, prononça-t-elle comme si ce titre n'appartenait qu'à lui, tu es ici chez toi à Mordez. Tous ceux qui commercent avec les gens de Mordez font partie de leur famille.

Elle le lâcha et se redressa. Le sourire qu'elle lui adressa lui serra le cœur. Ne pouvait-il pas rester ici plutôt que rentrer dans cette maison où sa tante avait constamment peur en sa présence ? Ici, personne ne le craignait. Personne ne détournait les yeux en voyant son physique singulier.

L'héritage de DoanacOù les histoires vivent. Découvrez maintenant