Chapitre 5 - Petite taille, Gros problèmes

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Le navori blessé par Olaxian ayant repris connaissance, Moïra avait fait signe aux acolytes qu'il était temps de lever le camp et tout le monde s'était exécuté sans broncher. Sans enthousiasme non plus d'ailleurs. En effet, si le Colosse semblait avoir perdu tout envie de s'en prendre aux nouveaux amis de leur cheffe, personne ne semblait pour autant transporté de joie à l'idée de se rendre dans un camp de la Fraternité, lui encore moins.

D'autant plus que Moïra leur avait précisé que cette escale chez les navori allait peut-être durer plusieurs semaines. Et encore, ce n'était pas certain.

En bref, ça allait être rude, et Ren sentait bien que l'ambiance était déjà électrique au sein du petit groupe. Au moment de partir, les camarades du navori avec lequel Olaxian s'était battu étaient resté un moment à fixer le Colosse sans bouger. Une manière comme une autre de faire passer le message « toi, on t'aime pas du tout », même si ça avait laissé son destinataire de marbre.

Marchant en tête avec les trois soldats navori, Moïra avait une attitude assez différente de d'habitude. Un œil normal ne l'aurait pas remarqué mais ça avait tout de suite sauté à celui de Ren. La cheffe d'escouade avait une main posée sur la poignée du sabre pendant à sa hanche gauche. Une arme très particulière à la lame incurvée et plus épaisse que celle d'un sabre classique d'Ionia. Le jeune acolyte n'avait jamais vu Moïra s'en séparer. Ses doigts tapotaient frénétiquement le métal cuivré de l'objet et Ren en déduit ainsi deux hypothèses. Soit Moïra était nerveuse, ce qui lui paraissait incongru mais pas totalement impossible. Surtout étant donné qu'ils allaient bientôt se retrouver entourés de membres d'une organisation supposément ennemie à leur ordre. Soit elle avait envie de tuer quelqu'un, et Ren espérait de tous cœur que ce n'était pas de lui dont il s'agissait.

Se remémorant le regard qu'elle lui avait lancé un peu plus tôt, et son effrayant rictus, le jeune homme préféra de nouveau déporter son attention sur autre chose.

Et d'ailleurs plus loin, il aperçut justement les lueurs d'un feu de camp percer en contrebas. Ce dernier brillait intensément au travers des branches tordues de la forêt morte, bien qu'un obstacle de taille sembla se dresser entre lui et le petit groupe.

De hautes ombres aux formes pointues qui ressemblaient à des palissades, sans doute tissés à partir des cadavres sylvestres et des ronces qui se répandaient çà et là dans cette partie de la forêt. Ren songea que les navori devaient donc compter un tisseur, voire plusieurs d'entre eux, dans leurs rangs. Et des plutôt doués avec ça. Les personnes capables de faire naître de tels infrastructures, qui plus est avec de la matière morte, étaient peu nombreuses. Très peu nombreuses.

- « Nous y sommes », déclara sèchement l'un des hommes de la Fraternité les accompagnant.

*

Le moins que l'on pouvait dire de la Fraternité, c'était qu'elle ne lésinait pas sur les moyens employés lorsqu'elle avait quelque chose à y gagner. Et il fallait croire que c'était le cas à Tuula.

Dans la baie déjà, mouillaient deux immenses navires de guerre aux couleurs des navori. L'un d'eux était de fabrication ionienne, clairement. Sa coque avait été tissée à partir de matériaux que l'on ne devait probablement pas trouver dans le coin, étant donné que celle-ci semblait d'une qualité nettement supérieure aux palissades du camp. Sa proue se terminait en une sorte de vague déferlant vers l'avant et surtout, la ligne de flottaison du navire était très basse. L'une des caractéristiques principales des vaisseaux que l'on tissait à Ionia. Quant à l'autre navire, c'était l'inverse. Sa coque ressortait totalement de l'eau et sa proue se terminait en une pointe menaçante à laquelle était hissée une effigie en bois. Elle avait été taillée à la main visiblement. Typiquement le genre de coutume qui était étrangère aux petites gens des terres premières, au sein desquelles une telle chose pouvait être considérée comme un blasphème.

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