Chapitre 3: Chien et chat

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« Un chat, dans sa vie , rencontre toujours un chien dont il ne peut plus se passer. Il supporte difficilement tous les autres chiens, mais ce chien-là il l'aime. C'est comme ça. »

Daniel Pennac


Pff.

Vous avez vraiment cru que c'était de Taylor dont je parlais ?

Foutaises ! Taylor était plus digne de la fouine, du chacal ou de la hyène.

Ou bien du bousier, cet insecte qui habite et mange des bouses d'éléphants et diverses animaux aux flatulences à la masse intéressante.

Mais laissons cet abruti dans son élément et parlons du chien en question. Ou plutôt d'Agathe.

Je ne sais pas comment j'aurais survécu sans ce petit bout de fille. Dès qu'elle avait compris que la situation n'était pas du tout du domaine de la plaisanterie, j'ai pu compter sur elle, ses cigarettes, son rire et son obsession pour les fesses des beaux mecs pour me consoler.

Plutôt solitaire, je n'avais jamais apprécié autant la présence de ma meilleure amie qu'en ces temps particulièrement durs où le lycée tout entier avait les yeux rivés sur moi, comme deux singes béats regardant la bouche grande ouverte un épisode de télé-réalité.

En fait, je sais pas si vous aviez remarqué, mais je détestais un peu tout le monde, même si le monde en question s'obstinait à m'apprécier. En général j'étais toute seule, au beau milieu d'un groupe sans rien dire ou avec Agathe, non parce que personne ne voulait de moi, mais parce que je ne voulais pas d'eux. J'ai toujours été un peu intolérante comme fille, apparemment pas depuis toujours mais en seconde, j'étais aussi bavarde qu'une pierre tombale. Je crois que si j'avais mis une capuche j'aurais pu nager entre les briques des murs, mais apparemment ça plaisait aux mecs, le charisme mystérieux.

Bof. Moi qui voulait être désagréable et ignorée c'était raté.

« Juliet! Je suis tellement heureuse que tu aies abandonné cette idée de démissionner !

Comme à l'accoutumée, je reçus d'un air blasé Agathe entre mes bras et je caressai machinalement ses cheveux châtain en baladant mon regard sur la cour. Bizarre. Il était 7h40 et ce stupide pion n'était pas encore là. Agathe s'écarta de moi, et un immense sourire illuminant son visage 

« Tu vas participer aux interclasses de sport j'espère ? Avec toi on est sûrs de gagner !

-Bof, rappelle-toi que 10 mètres de course est synonyme de mort pour la camée que je suis, ai-je souri en me traînant vers le bus à pas lents

-N'importe quoi !!

-D'accord, 12 mètres

-Juliet ! Tu rigoles ou quoi ?, intervint soudain Tiphaine en surgissant derrière moi et m'entourant du bras, tu es notre championne de badminton, de gym, de sprint, d'échecs...

-Bon, tu ne vas pas me citer tous les clubs ou je suis, ai-je ri, gênée qu'on me rappelle toutes mes compétitions tout en montant dans le véhicule

-Je te rappelle tous les trophées que tu as rapporté à St Marc !, sourit Tiphaine en s'installant derrière Agathe et moi avec Marina, tu m'étonnes que De la Rosière t'aime bien ! Tu as eu ta photo dans les journaux du collège à chaque publication !

-Ce qu'il me tue c'est qu'elle n'a l'air jamais contente en plus, sourit Agathe en me tendant un biscuit que je refusai, je vais finir par t'appeler « Poker Face » si tu continue à bouder !

Je restai silencieuse, les yeux rivés vers la fenêtre. Je n'étais jamais contente parce qu'à chaque fois, ce n'était pas à la première place que j'arrivais. C'était stupide, j'étais tout de même sur le podium à une compétition régionale mais je n'y pouvais rien, mon esprit compétitif était déchiré en deux quand je n'arrivais pas à atteindre mon objectif. C'était comme les notes, j'étais dans le top 5, mais je n'étais pas la première, alors je restai dans une éternelle insatisfaction qui enrageait tout mon entourage, en particulier mon père, qui aurait été content même si j'avais été dans le peloton de fin. Depuis toute petite, je tendais la main vers un idéal qui m'était inaccessible, comme si j'avais quelque chose à prouver à quelqu'un. C'était sans doute à moi-même.

Ecrits d'une Ex-LooseuseOù les histoires vivent. Découvrez maintenant