Chapitre 49

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     Le lendemain matin, je me rendis au poste de police aux côtés de Salomé. Côte à côte, nous marchâmes sur le trottoir tout en nous racontant nos vies, nos galères et nos déceptions. On ne parla pas beaucoup de bonheur et de légèreté. Ce qui me désola.

Nous étions deux jeunes filles de 19 ans, pas comme les autres.

J'eus soudain l'impression de me retrouver des années en arrière, au cours de piano de Mme Carter ; Salomé et moi qui pouffions de rire en répétant notre morceau du jour.

Ce fut mon dernier bon moment avec elle.

Étonnement, cette connivence était toujours là entre nous. Elle n'avait pas complètement disparu. Peut-être serait-il possible de reconstruire notre amitié après tout ? J'eus la certitude à cet instant que nous en serions capables. Il y avait de l'espoir. Et je lus dans le sourire de Salomé qu'elle espérait, elle aussi, de belles retrouvailles. De nouveaux souvenirs inoubliables.

C'était un nouveau départ.

De vraies amies finissent toujours pas se retrouver, pas vrai ?

Lorsque nous arrivâmes devant le poste de police. Anaïs et Églantine étaient déjà sur place. Elles attendaient leur tour, anxieuses. 

Je fus surprise de constater qu'elles n'étaient pas seules sur le parking.

D'autres anciens élèves avaient répondu présents à l'appel à l'aide d'Anaïs. Certes, son mail avait été écrit dans la panique et elle avait conscience que nous ne pouvions pas faire grand-chose pour les aider, mais notre présence leur prouvait notre soutien et notre amitié.

Je reconnus Romane, Margareth et Robyn. J'eus le souffle coupé face à cet élan de solidarité. Nous n'étions pas seules pour venir témoigner. Nous avions toutes une histoire à raconter. Peut-être serait-ce suffisant pour prouver aux policiers que la version d'Eléah n'était pas fiable, que cette fille était une menteuse ? Églantine disait la vérité. Elle ne conduisait pas son véhicule ce soir-là. De plus, Eléah avait certainement besoin d'une aide psychologique. Elle ne pouvait plus continuer à faire du mal aux autres gratuitement.

Tout à coup, je remarquai au milieu du groupe une silhouette qui fit bondir mon cœur.

Zachary.

Zachary était là.

Lorsque je croisai son regard et qu'il me sourit spontanément, je compris quelque chose. Il m'avait tellement manqué et je n'étais pas près de l'oublier. En fait, j'avais toujours espéré le croiser quelque part par hasard. Mais ce n'était plus jamais arrivé.

Peut-être était-il mon « Léopold » à moi ?

J'eus une pensée nostalgique pour Mme Léonie. Demain, je lui raconterais les derniers évènements. Elle sera sûrement très fière de moi. J'avais enfin osé agir. J'avais repris ma vie en main.

Zachary.

Je ne pensais jamais le revoir et voilà qu'il était à quelques pas de moi à me sourire. Sans hésiter un seul instant, je lui rendis son sourire.

Deux policiers s'approchèrent de notre groupe atypique. Ils nous dévisagèrent avec curiosité :

-Que faites-vous là ? demanda l'un d'eux.

-Nous venons soutenir nos deux amies., expliquai-je.

-Avez-vous été témoins des faits ?

-Non, aucun de nous n'était là ce soir-là ! répondit Margareth, soudain mal à l'aise.

-Mais alors que faites-vous là ? Vous ne pouvez pas rester ici. Seules les deux jeunes filles ont rendez-vous.

-Nous sommes là pour soutenir Églantine et Anaïs. Elles disent la vérité, insista Salomé.

-Mais ça, nous le savons déjà.

Ils invitèrent Anaïs et Églantine à les suivre jusque dans le commissariat afin de leur expliquer l'avancée de l'enquête. Nous restâmes sur le parking à la fois hilares et soulagés. De quoi avions-nous l'air ? D'une bande de jeunes totalement immatures et naïfs.

Mais une chose était sûre, notre petit groupe était beau à voir. Brusquement, je me mis à rire toute seule. Je n'avais plus envie d'être triste. Je n'avais plus envie de pleurer. Mon rire spontané fit rire les autres également. 

À cet instant précis, entourée de mes amis, je sus que je serais heureuse.

Et cette fois, Eléah ne gâcherait pas mon bonheur.

Plus personne ne le gâcherait.


J'aurais tout fait pour toiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant