Je crois que je n'ai jamais aussi bien dormi. Pourtant, je n'ai pas de quoi. Mon père est sûrement en train de trouver un moyen de me faire quitter les Beaux-Arts et ce mystérieux Owen semble prêt à en découdre avec moi.
D'ailleurs, je n'aurai jamais imaginé qu'Owen soit flic. Il n'en avait pas l'allure, mais bon, si on suit ma logique, il n'avait pas non plus l'air aussi sournois.
Et dire que je le trouvais mignon. Désormais, j'espère juste l'éviter le plus possible pour ne pas me trahir. S'ils inspectent la mansarde, ils se rendront bien compte que je me rends régulièrement là-bas pour y peindre. Mais ils ne sauront pas depuis quand je n'y ai pas remis les pieds. La peinture à eu le temps de sécher.
Sauf si Milo décide d'avouer ce qui s'est réellement passé. Il ne connaît pas la vérité, mais il a pris le risque quand même. Pourquoi donc ?
Je tends le bras pour regarder l'heure sur mon téléphone. 19 heures. Effectivement, un bon petit coma. Mais maintenant, je vais avoir du mal à dormir cette nuit. Je soupire. Que puis-je faire à cette heure-ci ? Je n'ai plus de peinture et personne avec qui passer le temps. A moins que...
Animé par la curiosité, j'enfile un peignoir et me faufile en toute discrétion dans le couloir.
Je passe devant la porte de mon père en prenant garde.
— Non, ils n'ont trouvé aucune emprunte cet après-midi. Je sais qu'Azhlei continue d'y aller. Je ne peux pas tout lui interdire.
Ma respiration se bloque en entendant mon père parler au téléphone. J'ai dû rêver. Le principe même de son éducation est de m'interdire absolument tout. Je tends l'oreille pour en savoir davantage.
— Elle est comme sa mère. Ce fichue caractère et ses mauvaises manies.
Je roule des yeux. Bien sûr que j'avais rêvé.
Je poursuis mon chemin dans un calme olympien. Une fois la porte d'entrée passée, je cours pour traverser l'allée pavimenteuse qui mène au musée.
Il fait sombre et comme prévu, Milo est scotché à l'ordinateur, silencieux et une barre de chocolat en main. Je me demande comment le voleur a fait pour échapper à la vigilence de Milo. Il a toujours le nez rivé sur l'écran. A moins qu'autre chose l'ai distrait. Non. Rien ne distrait Milo de son écran et de sa barre de chocolat.
Je frappe délicatement au carreau puis pénètre dans la pièce. Sans lui demander son avis, je viens m'installer dans le fauteuil de bureau à côté de lui. Thomas s'occupe sûrement de faire le tour du bâtiment et en vu des derniers évènements, il risque de prendre tout son temps.
Malgré ma présence, Milo reste Milo. Aucun intérêt pour ma personne, même s'il m'a fait entrevoir récemment une certaine loyauté. Je scrute son profil parfaitement concentré sur les diverses caméras. Ses cheveux retombent un peu devant ses yeux, mais ses cils noirs et épais papillonnent avec aise. Son nez est franc mais appréciable, quant à ses lèvres...
Une barre de céréales emballée me sort de ma contemplation. Milo me la tend du bout des doigts sans même me regarder dans les yeux.
— Merci, le remercié-je en l'ouvrant pour prendre un premier croc.
— Que fais-tu ici ?
— Je tenais à te remercier pour cette nuit et...pour aujourd'hui. Mais qu'as-tu fais de la clef ?
D'un geste du menton, il me désigne derrière lui la boîte accrochée au mur. Sur la droite, celle de la mansarde, avec son manche en céramique bleu et ses gravures dorées.
— Mais comment as-tu pu...? Tu étais avec George ce matin et aucun ne vous deux ne savait pour la mansarde.
Est-ce que Milo serait le voleur ? En tout cas, c'est clairement ce que je viens de sous-entendre.
Son regard noir et intense plonge dans le mien, me déstabilisant grandement. Il lâche un petit rire avant de se redonner contenance.
— Vous savez Azhlei, je ne vous ai pas posé de questions concernant l'état de la fenêtre. J'espère que vous comprendrez que j'aimerais moi aussi garder mes petits secrets.
C'était un avertissement. Et le regard sûr de lui qu'il m'adresse me donne presque des frissons. Coincée dans mon siège, je le lorgne suspicieusement. Quels petits secrets ?
— George reviendra vous dire au revoir, déclare-t-il pour changer de sujet.
— Comment je peux être sûre que tu ne diras rien ?
— Parce que mes secrets sont plus terribles que les vôtres.
Comment ça ? C'est un mafieux ? Un espion ? Un sérial Killer ?
— Mais je ne connais pas les tiens.
— Tant mieux. Ne vous en faites pas. J'ai plus à perdre à parler et je tiens à garder ma place ici.
Lorsqu'il me regarde à ce moment précis, une étrange lueur brille dans ses yeux. Je ne comprends toujours pas ce type, en revanche, je ne le verrais plus de la même manière. Lui aussi cache des secrets. Des terribles secrets qu'il ne peut évoquer. Lesquels ?

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MA PRÉCIEUSE
RomantikAzhlei n'est autre que la fille de Robert Delaunay, directeur de la célèbre fondation d'art du même nom. Alors que d'autres rêvent de sa vie, Azhlei fait tout pour échapper à la prison doré dans laquelle son père essaye de l'enfermer. Ce monde de p...