Chap 3

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Je secouai la tête pour tenter de me débarrasser de mon horrible mal de crâne. Depuis près d'une heure déjà, je réfléchissais à un moyen d'arriver à la voiture à temps. J'étais en mathématiques, en troisième étage : je n'arriverai jamais à l'heure si je ne sortai pas un peu avant la sonnerie et étrangement, Charles me faisait bien plus peur qu'une possible punition de la part de mon professeur.

Je me rappelai de cette fois où j'étais arrivé un peu en retard. J'avais passé un peu plus de temps dans la salle pour poser des questions sur le cours et j'étais arrivé six minutes plus tard devant l'homme qui me servait de beau-père. Il m'avait crié dessus devant tout le monde et j'avais fini par fondre en larmes sur le parvis. C'était lors de ma première année de lycée mais je me souvenais encore des regards curieux des autres adolescents et de celui, déçu, de Charles.

Quand j'avais raconté cela à Nathan, il avait voulu débarquer chez moi pour incendier l'homme. Je l'en avais empêché, intimant convaincu que les cris de rage d'une petite furie en collants à paillettes ne feraient qu'énerver davantage Charles.

Ma décision était prise, il était hors de question que je vive cette humiliation pour la seconde fois. Je levai la main en me tortillant sur ma chaise, demandant au professeur à aller aux toilettes. Il leva les yeux au ciel et me demanda si c'était vraiment urgent. J'opinai vivement. Il finit par accepter et retourna à son cours sans se préoccuper plus de moi. J'entassai mes affaires au fond de mon sac sous le regard interrogateur de mon meilleur ami. Je lui souris brièvement puis m'éclipsai discrètement sous les yeux curieux de certains de mes camarades.

Je sautai quelques marches, manquant de me rompre le cou. Je vérifiai l'heure sur mon téléphone, vu un message qui m'informait que Charles était garé devant l'entrée depuis déjà cinq minutes et arrivai à l'entrée au moment où le portail s'ouvrait et où la sonnerie retentit. L'homme me jeta un regard désobligeant et enclencha une marche arrière pour sortir de sa place. Ses gestes transpiraient l'assurance et j'étais déjà mort de peur par ce qui pouvait m'arriver dans les minutes qui venaient.

— Lorsque j'ai rencontré ta mène, je ne savais pas qu'elle avait un fils comme toi sinon je n'aurai jamais entamé cette relation. Si tu savais à quel point j'étais en colère lorsque j'ai rencontré ton PD de meilleur ami ou que j'ai découvert tes passions de femmelette !

Je baissai la tête et serrai les poings. L'art me passionnait et plus particulièrement la photographie qui était un véritable exutoire. J'aimai photographier le ciel, la lune, les étoiles et les paysages nocturnes mais je manquai de temps avec le bac qui arrivait en fin d'année scolaire...

— J'aurais pu supporter ces choses-là si seulement je n'avais pas découvert que tu dormais avec mon fils comme de sales déviants !

Je m'immobilisai, des nœuds de stress dans le ventre. Comment avait-il pu découvrir ça ? Il perçut mon malaise et continua sur sa lancée.

— Tu pensais que je ne le remarquerais pas ? Ne me prend pas pour un con Léo ! Tes habitudes de déviants n'échappent à personne ! Tu te comportes comme une fillette, tu traînes avec l'autre mariole et tu demandes encore à être consolé quand tu fais des cauchemars ! Tu es tout sauf un homme Léo ! Alors à partir de maintenant, je ne veux plus que tu gâches mes plans de vie ! Je ne veux plus te voir avec mon fils, c'est clair ?

J'acquiesçai sans répondre, les larmes aux yeux. Il se gara devant la maison et sortit sans un regard pour ma personne. Je me précipitai aussitôt dans ma chambre, ignorant la voix un peu inquiète de ma mère. Je balançai rageusement mes chaussures contre le mur et me roulai en boule dans mon lit. Le matelas s'enfonça sous moi et la main délicate de ma génitrice se perdit dans mes cheveux.

— Tu as passé une mauvaise journée trésor ? Tu veux m'en parler ?

Je marmonnai une vague réponse, le cœur lourd. Je m'en voulai de ne pas pouvoir défendre mon meilleur ami, à défaut de pouvoir préserver ma fierté...

— Repose-toi un peu d'accord ? Je te préviendrai quand le repas sera prêt, dit-elle d'une voix douce et rassurante.

Elle resta un instant près de moi et sa présence m'apaisa un peu. Je savai qu'elle ne me jugerait jamais comme Charles le faisait depuis notre rencontre.

Je me rappelai un instant de sa mine sévère, de sa chemise entr'ouverte et de sa poignée de main ferme. Je l'avais vu pour la première fois un mardi midi, en rentrant plus tôt des cours. J'avais découvert plus tard que je les avais interrompu lors d'une partie de jambe en l'air. Ils s'étaient mis ensembles quelques mois plus tard et j'avais dès lors commencé à le détester. Nous avions déménagé, m'obligeant à changer de collège, maman avait eu moins de temps pour moi et les remarques désagréables de Charles avaient commencé, m'empoisonnant la vie...

Je soupirai avec un petit sourire, félicitant mon moi du passé pour l'avoir autant embêté à ce moment. Ma mère posa un petit baiser sur ma joue puis me laissa seul. Je roulai sur le lit en fixant mon plafond et finis par attraper mon casque, posé sur ma table de chevet. Je lançai ma playlist et fermai les yeux pour tenter de me reposer un peu.

Rien ne nous sépareraOù les histoires vivent. Découvrez maintenant