Chapitre 10: Secret

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Le temps était le meilleur remède aux maux du cœur.

C'est ce que Crepus lui avait toujours dit lorsqu'il parlait du chagrin dû à l'absence de sa défunte épouse. Diluc n'a que peu connu sa mère, à peine pour se souvenir d'elle, l'image qu'il s'en faisait venant surtout à travers les souvenirs racontés par son père. Sa voix tremblait toujours d'une certaine affection mêlée à de la tristesse quand il énumérait les différents moments passés avec la femme de sa vie. Selon lui, elle avait toujours été douce et avenante, mais ne se cachait pas d'un tempérament fort. C'était pour ça qu'il était tombé amoureux d'elle. Il concluait très souvent sur le fait que son fils avait beaucoup pris de sa maman au niveau caractère. Et de ses yeux.

Quand Diluc lui demanda un jour comme il faisait pour ne pas avoir mal, sa réponse marqua son esprit :

"J'en souffre. Tous les jours. Mais chaque jour un peu moins que le précédent. C'est un peu triste, mais on finit par s'y habituer, et les bons souvenirs aident à supporter ta tristesse. C'est comme une blessure physique: elle arrête de saigner, puis de faire mal, et enfin elle cicatrise avec le temps, même si elle laissera toujours une marque sur toi."

À l'époque, le jeune garçon, déjà grand frère adoptif de Kaeya, avait eut du mal à comprendre, car il avait projeté la situation de son père sur la sienne. Si un jour, il devait perdre son petit frère, il ne le supporterait pas, que ce soit après un mois, un an ou cent ans, il était sûr que la douleur resterait la même. Encore jeune, il n'avait aucun sens de la mesure, et sans doute s'était-il aussi un peu trop retrouvé dans la description des sentiments que son père vouait à sa mère. Kaeya était la seule autre personne signifiant autant dans sa vie avec son père, et il ne voyait personne d'autre combler le vide qui existait dans son cœur. Il avait construit son univers autour de cet enfant étranger, seul et perdu comme lui dans un monde d'adulte.

Dire qu'il avait été détruit le jour où Kaeya lui avait avoué sa trahison, le même jour de la mort de son père, était encore loin de la réalité.

Après avoir épargné la vie de son ancien partenaire, il n'aurait pas cru pouvoir s'en sortir dans son chagrin. Alors il avait pris la décision la plus radicale : partir. Partir pour se reconstruire. Partir pour faire son deuil... Voire ses deuils. Partir pour remettre de l'ordre dans ses idées. Et partir pour trouver des réponses. Son voyage, ses rencontres et ses découvertes lui permirent de retrouver un peu de résilience. Petit à petit, son mental revint, sa personnalité se recomposa autour de ses expériences, et il arriva à prendre du recul sur sa situation. Au bout de trois ans et après avoir frôlé la mort, il se crut prêt à revenir à Mondstadt, et refaire face à ses fantômes du passé.

Mais rien ne l'avait préparé à ce qu'il allait retrouver.

Kaeya aussi s'était reconstruit, à sa manière, laissant fleurir des aspects de sa personnalité qu'il n'a jamais osé exprimer aussi librement. La timidité laissant place à l'audace. Du sarcasme qui se mariait très mal à l'entièreté de Diluc. Cet antagonisme entre leur caractère, à l'image de leur élément respectif, donnait désormais lieu à des échanges tendus où la menace d'une explosion était toujours présente. Mais au-delà de cette apparente incompatibilité subsistaient les blessures communes que peu connaissaient. Elles s'étaient ravivées lorsqu'ils se revirent pour la première fois en trois ans, et ce fut dur, pour l'un comme pour l'autre, de rester stable dans ce qu'ils avaient construit. Alors pendant un temps, ils gardèrent leurs distances.

Un événement vint les aider à faire le premier pas.

Une fille mystérieuse de Sumeru, une explosion étrange, et un complot des Fatuis à déjouer, le tout lié à l'événement qui avait tué leur père. Diluc avait accepté de s'asseoir sur ses ressentiments pour porter le même masque d'amabilité que Kaeya, et accueillir ces gens chez lui afin de mieux récolter des informations sur leurs sombres desseins. Sa rencontre avec Dottore fut des plus... spéciale. Il avait aussi fait un compromis avec Kaeya pour tendre un piège aux Fatuis avec l'œil maléfique de son défunt père, allant jusqu'à accepter de jouer le mauvais rôle dans l'histoire pour laisser à Kaeya le beau rôle. Il n'avait pas fait tout ça en vain bien sûr: les Fatuis étaient repartis bredouilles, la gamine était (presque libre) et Amber, Jean et Lisa étaient satisfaites.

La chaleur de tes brasOù les histoires vivent. Découvrez maintenant